|
 |
 |
 | La Première guerre mondiale
|
 |
 |
 |
 |
 | Cliquer sur un lien ouvrira une nouvelle page. Cliquer sur le triangle déroulera le contenu ou le fermera
|
 |
 |
 |
 |
  | La première guerre mondiale est à l'affiche à l'automne 2004.
|
 |
 |
 |
 |
  | Au niveau éditorial, tout d'abord. Parmi de nombreux titres, on peut signaler la volumineuse Encyclopédie de la Grande Guerre (Bayard), pilotée par Jean-Jacques Becker et Stéphane Audoin-Rouzeau, l'étude de Nicolas Offenstadt sur Le Chemin des Dames (Stock) ou les images de ce photographe inconnu, Jacques Moreau (Nous étions des hommes, La Martinière), retrouvées par Béatrice Fontanel et Daniel Wolfromm.
Dans le domaine de la littérature, plusieurs romans de rentrée s'attachent à situer leur histoire au sein de la Der des der. Débarrassée d'une version officielle aussi glorieuse qu'irrecevable, la Grande Guerre vue des tranchées a pris une force brûlante, une saveur acre, propre à imposer des signatures puisque ce sont souvent les débutants qui osent la délicate relecture de la mémorable boucherie. Quatre auteurs relèvent le défi en cette automne littéraire. En premier lieu, Isabelle Condou qui, à partir d'une anecdote avérée - un soldat inconnu, parent de celui couché sous l'Arc de triomphe, attend, reclus à l'asile de Rodez, qu'on lui rende son identité -, invente les rêves de retrouvailles qui éclairciraient l'avenir obturé par la disparition au front de l'être cher. Plus de vingt nouvelles tissent la geste des attachements ordinaires, des passions légitimes ou contrariées, que la mort n'a pu solder. Plus classique, Le Rêveur d'étoiles, d'Yves Pourcher, est d'une sobre mais réelle efficacité. Professeur à Toulouse-Le Mirail, l'auteur est un historien scrupuleux qui s'affranchit de l'apparat critique sans sacrifier à la fiction la rigueur du savant. De Jérôme, Louis et Jean, frères d'enfance heureuse sur les terres de Lozère partis au front dès août 1914, un seul reviendra. Jouant des temps paradoxaux du front, Pourcher accorde à tous ses personnages une humanité authentique. Avec Blés bleus, Philippe Roch dit la violence d'un monde déstructuré en donnant à entendre la cacophonie des lignes où les identités ont sombré. Les hommes de Roch, qu'ils s'habituent à l'horreur ou justement désespèrent, en manque d'"extase", lancent des cris terribles. Frédéric Cathala joue le pari inverse avec Le Théorème de Roitelet, qui postule la rationalité du monde à l'heure où chacun vient à en douter, pour la joie de ceux qui enragent de voir l'action soumise au raisonnement et le profit de celles qui font commerce de deviner l'avenir. Ainsi Alexandre Roitelet veut-il établir la règle mathématique qui donnera à coup sûr la victoire aux Français. Mais ce patriotisme scientifique n'est pas plus du goût du deuxième bureau, voué au culte du secret, des codes chiffrés et du double jeu, qui s'alarme des pleins pouvoirs réclamés par le champion de la statistique. Et tandis que les espions animent les music-halls, que les concierges tirent les horoscopes et que les ordonnances sont victimes de l'humour potache de matheux inconséquents, les "poilus" dans les tranchées paient comptant la guerre.
Sur les écrans également, l'évocation de la Grande Guerre ne faiblit pas, et le film de Jean-Pierre Jeunet Un long dimanche de fiançailles a déjà été vu par 2 millions de spectateurs en France.
Par ailleurs, le Centre Pompidou organise, le 26 novembre 2004, un colloque international sur "L'empreinte de la Grande Guerre". En outre, depuis le 27 septembre, Thiepval, haut lieu de la bataille de la Somme (1916) et haut lieu de boucherie pour les troupes britanniques où périrent en quelques mois près de 40'000 soldats de l'Empire britannique, dispose d'un Centre d'accueil et d'interprétation. Ce centre reste un centre de pèlerinage : 160 000 à 180 000 visiteurs y passent tous les ans. Quant à l'Historial de la Grande Guerre, ouvert à Péronne (Somme) en 1992, il reçoit aujourd'hui 80 000 visiteurs par an. Celui-ci inclut aussi un Centre de recherche scientifique, créé et présidé depuis 1989 par l'historien Jean-Jacques Becker, qui a joué un rôle fédérateur dans le renouveau des études portant sur le conflit. Pour élaborer le concept mis en œuvre à l'Historial, Jean-Jacques Becker avait réuni autour de lui une équipe internationale de chercheurs. Ce regard international, doublé d'une approche sociale systématique sous l'angle des mentalités et de la vie quotidienne, a contribué au renouvellement de l'histoire du premier conflit mondial. Celle-ci est soudain confrontée à un événement dont le deuil n'est pas terminé, sans doute parce que le principe de commémoration retenu au lendemain de la paix a été à la fois trop lourd et trop bref.
Mais cette approche nouvelle n'explique pas la vogue persistante dont jouit la guerre de 14-18 auprès du grand public depuis une quinzaine d'années. "Cet intérêt redémarre à la fin des années 1980, constate Stéphane Audoin-Rouzeau (journal Le Monde du 10 novembre 2004). Il est le résultat de plusieurs facteurs concordants. Il y a d'abord la chute du mur de Berlin, dernier avatar géopolitique de la guerre de 14-18 : avec lui s'effondre la révolution bolchevique de 1917. Ensuite, au début de la décennie suivante, la guerre refait son apparition en Europe, dans les Balkans. On retrouve soudain le nom de Sarajevo, ville où est né le premier conflit mondial. Aujourd'hui enfin, la mémoire s'emballe parallèlement à la disparition des ultimes témoins. Trois, voire quatre générations nous séparent de 1914. Or le syndrome de la troisième génération est bien connu. Celle-ci est soudain confrontée à un événement dont le deuil n'est pas terminé, sans doute parce que le principe de commémoration retenu au lendemain de la paix a été à la fois trop lourd et trop bref. L'"héroïsation" des morts empêche le détachement, qui est à la racine du travail de deuil." Si la plupart des historiens s'accordent aujourd'hui pour considérer que la première guerre mondiale a bien été "la matrice du XXe siècle", avec son cortège de violences banalisées et de "brutalisations" de la société, une révision de l'historiographie est en cours, non sans grincements. Dès l'entre-deux-guerres, les combattants ont été perçus comme les victimes d'une violence anonyme qui les dépassait. "Or il s'agit là d'une construction culturelle, soutien Stéphane Audoin-Rouzeau. Car nous avons pu constater que les soldats de la Grande Guerre, en dépit de leurs souffrances bien réelles, restent des acteurs, même s'ils sont en situation de contrainte."
Lyonel Kaufmann - 2004
|
 |
 |
 |
 |
  | 1914-1918, guerre de tranchées entre historiens LE MONDE | 10.03.06 | 13h58 • Mis à jour le 10.03.06 | 14h02n
|
 |
 |
 |
 |
  | armi les historiens français, la guerre de 1914-1918 n'en finit pas de recommencer. Quatre-vingt-dix ans après la bataille de Verdun (février-décembre 1916), ce domaine d'études ressemble à un véritable champ de bataille. Sans cesse sur le qui-vive, deux troupes s'y font face, défendant pied à pied leurs positions, bien décidées à conquérir, d'un seul et même élan, les places fortes de l'université comme les larges espaces de l'opinion.
Pas plus que les autres, cette guerre-là ne se mène avec des gants blancs. Colloques fortifiés et embuscades éditoriales, assassinats académiques et comptes rendus ciblés, grosse artillerie médiatique et petits sabotages collatéraux : depuis la mémorable controverse sur la Révolution française, qui opposa les partisans d'Albert Soboul et ceux de François Furet dans les années 1970-1980, le monde savant n'avait guère connu pareille ruée. Gare aux traîtres, malheur aux tièdes ! […] […] Pour tous les protagonistes de l'actuelle bataille historiographique, donc, la question-clé est désormais identique : dans la boue, sous les obus, comment diable les soldats ont-ils tenu ? C'est que, pour l'écrasante majorité d'entre eux, le sacrifice avait valeur d'évidence, répondent en substance les historiens rassemblés autour de l'Historial de la Grande Guerre, inauguré en 1992 à Péronne, dans la Somme, et dont le centre de recherche est présidé par Jean-Jacques Becker (www.historial.org ). Elevés dans une société occidentale en voie de "brutalisation", les poilus auraient baigné dans une "culture de guerre" - messianisme patriotique, haine de l'ennemi, esprit de croisade - qui les aurait rendus globalement "consentants" : "Trèves et mutineries ont été marginales. Tout le mystère est là : massivement, la chair à canon a accepté d'être de la chair à canon...", résume Annette Becker, […], qui dirige le centre de recherche de Péronne avec Stéphane Audoin-Rouzeau, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS, Paris). […] Ensemble, les deux historiens ont signé un essai incisif, intitulé 14-18, retrouver la guerre, paru chez Gallimard en 2000. Définissant le premier conflit mondial comme la "matrice" du XXe siècle et de sa violence totalitaire, ils revenaient sur les cérémonies commémoratives qui avaient marqué, en 1998, les quatre-vingts ans de l'armistice, pour fustiger "la confusion intellectuelle" et la sensibilité "victimisante" qui auraient alors prévalu dans la conscience commune : "Non seulement les combattants n'avaient été que des victimes non consentantes, mais, plus encore, les révoltés étaient désormais les seuls héros véritables. Les 'mutins' de 1917 n'avaient-ils pas été, par leur révolte même, les précurseurs de l'unité européenne ?", ironisaient-ils. C'est ce livre qui a mis le feu aux poudres. Le 21 février, en effet, à l'occasion de l'anniversaire de Verdun, [les adversaire de l'Historial de Péronne] ont rendu publique la naissance du Collectif de recherche international et de débat sur la guerre 14-18 (www.crid1418.org ). [Ce collectif] est composé d'universitaires, mais aussi de chercheurs non professionnels. Alors que [«l'école de Péronne»] analyse mentalités et discours pour cerner les ressorts anthropologiques du "consentement" à la guerre, le CRID 14-18 préfère mettre l'accent sur les expériences concrètes qui expliqueraient la "ténacité" des combattants. "Nos travaux sont particulièrement sensibles aux pratiques ordinaires des poilus. Ainsi, quand on lit les correspondances de l'époque, on est frappé par le nombre de soldats qui valorisent les stratégies d'esquive permettant d'échapper aux tranchées. 'Chic, j'ai la bonne blessure !', disent par exemple les soldats qui ne sont pas gravement touchés, mais auxquels leur blessure permet néanmoins de quitter le front. Souvent, ils se réjouissent également que leurs proches ne soient pas versés dans des unités qui risquent de monter en première ligne", explique Nicolas Offenstadt, maître de conférences à Paris-I, qui a dirigé Le Chemin des Dames. De l'événement à la mémoire (Stock), […]. […] des stratégies d'esquive aux refus d'obéissance, et des mutilations volontaires à la désertion, insistent les membres du CRID 14-18, il y a toute une gamme de sentiments et de gestes que l'on trouve chez la plupart des soldats, y compris chez ceux qui tiennent par ailleurs un discours nationaliste. En ce sens, la tâche de l'historien consisterait d'abord à s'interroger sur les multiples formes de contrainte qui se cachent derrière le "consentement" patriotique. "La culture de guerre telle qu'elle est présentée par Péronne est une culture des élites et de l'arrière, explique Frédéric Rousseau, président du CRID 14-18 et auteur de La Guerre censurée (Seuil). C'est celle des politiciens et des faiseurs d'opinion, qu'on ne peut pas comparer avec la culture de ceux qui avaient les pieds dans la merde, et qui crevaient sous les obus. La haine de l'ennemi, l'esprit de croisade ont bien existé, mais l'essentiel est de comprendre comment le consentement se construit socialement, via la pression du groupe et l'attachement aux camarades, par exemple, bien au-delà des seuls gendarmes et des cours martiales. Les mutineries ont quand même concerné les deux tiers de l'armée française. Dans les travaux de l'Historial, cette dimension est évacuée. Si la réintroduire, c'est être gauchiste, tant pis !" Gauchistes ? Nous voici sur la ligne du front. Là, les slogans triomphent, les vieux clivages reprennent le dessus : partisans du "consentement" contre militants de la "contrainte", "patriotards" contre "néopacifistes", mandarins parisiens contre marginaux de province. […]. […] Ici comme ailleurs, les antagonismes théoriques s'articulent avec des questions d'affinités personnelles. Avec un sentiment d'affront académique aussi […]. "D'un point de vue institutionnel, Becker et Audoin-Rouzeau sont archidominants. Ils refusent le débat, et ne dialoguent qu'avec les morts... Sur '14-18', ils contrôlent non seulement les manuels scolaires, mais aussi les sujets d'agrégation et la bibliographie qui va avec. Et puis ils s'adossent à une puissante structure : l'Historial dispose de moyens importants pour financer des bourses, des colloques et une revue internationale... En termes de budget, y'a pas photo !", affirme Philippe Olivera [membre du CRID]. [Pour leur part,] les chercheurs de l'Historial ont le sentiment, eux, d'avoir définitivement perdu la bataille de l'opinion. "Quand on est amené à intervenir en public sur tel roman ou tel film qui popularise la mémoire pacifiste, on s'aperçoit qu'un discours nuancé et non 'victimisant' est complètement inaudible, témoigne Bruno Cabanes, professeur associé à l'université Yale (Etats-Unis) et auteur de La Victoire endeuillée (Seuil). Chez certains jeunes, il y a une identification spectaculaire avec les soldats de la Grande Guerre." Dans les bandes dessinées de Tardi comme dans les films de Jean-Pierre Jeunet (Un long dimanche de fiançailles) ou de Christian Carion (Joyeux Noël), l'équipe de l'Historial perçoit les signes de son inexorable défaite. […] "Ceux qui nous critiquent ne sont pas nombreux et leurs travaux m'intéressent peu, prévient Annette Becker. […] Pour le public, il est plus facile de croire que nos chers grands-parents ont été forcés de faire la guerre par une armée d'officiers assassins. Heureusement, j'ai la chance de travailler avec des collègues étrangers, loin de ces petites querelles franco-françaises..."
Jean Birnbaum Article paru dans l'édition du 11.03.06
|
 |
 |
 |
 |
 | Lorsque l’historiographie réfléchit l’histoire.
|
 |
 |
 |
 |
 | Compte-rendu de l’ouvrage de Prost A. et Winter J. (2004). Penser la Grande Guerre. Un essai d’historiographie. Paris: Points Histoire, 340p.
|
 |
 |
 |
 |
 | La Grande Guerre : Armées, Combats, Sociétés
(France, Allemagne, Royaume-Uni) Conférence d’Antoine Prost (compte-rendu)
Mercredi 21 janvier 2004 - Université de Caen
|
 |
 |
 |
 |
 | 1914-1918 sur internet : ressources en ligne
|
 |
 |
 |
 |
 | Ensemble de ressources en ligne sélectionnées par Daniel Letouzey de l’APHG de Caen, Chroniqueur internet de la Revue Historiens et Géographes. La page regroupe un ensemble de liens tant vers des compte-rendus d’ouvrages ou de conférences que de ressources documentaires ou de pistes pédagogiques. La page date de décembre 2004.
|
 |
 |
|
 |