
Pris au lointain, le champignon atomique d’Hiroshima a longtemps mis à distance l’horreur de l’acte lui-même. Cette image n’est pas sans parallèle avec les images de la Première Guerre du Golfe de 1991 prises à travers le cockpit des avions de la coalition. Outre le fait que ces images de la Première Guerre du Golfe semblaient directement issues de la dernière version de Flight Simulator, elles aussi mettaient le «spectateur» à distance et dissimulaient l’impact réel de ces frappes dites chirurgicales. Ces images du champignon et celle des cockpits d’avion mettaient la mort et la souffrance à distance.
Soixante ans plus tard, d’autres images viennent troubler le regard de l’Amérique et notre regard de l’événement «Hiroshima». Images de corps brûlés entassés dans les rues, elles soulignent la tragédie humaine et l’horreur à l’oeuvre sous le champignon. Difficilement soutenables, ces images risquent bien d’être tenues longtemps encore à distance de nos élèves et de nos manuels. Par contre, elles troublent aujourd’hui l’Amérique.
D’où viennent-elles?
Il s’agit de photographies tirées de pellicules trouvées dans une grotte et récupérées en 1945 par un soldat américain, Robert L. Capp. Plus de cinquante trois ans plus tard, Monsieur Capp fit don de ces images aux Archives Herbert Hoover avec pour instruction, l’interdiction de les rendre publiques avant l’année 2008. Aujourd’hui, elles sortent de l’anonymat de la fondation par le professeur Sean Malloy, de l’Université de Californie à Merced:
« I came across these will research my recent book on the bomb, Atomic Tragedy, » he tells DANGER ROOM. « They were found in a cave outside Hiroshima by a U.S. serviceman who was part of the occupation forces. We have no information about who took the photos, what became of him/her, or why the photos ended up in a cave. The serviceman held onto to them in his personal collection until 1998, when he donated them to the Hoover Archives [at Stanford University] with the provision that they not be reproduced until 2008. I included three of these photos in my book, but I wanted to make them all publicly available. »
Depuis elles font la tournée des blogs américains.
En regardant ces images, une partie du malaise provient certainement du fait que ces amas de corps ne sont pas sans faire référence à notre mémoire iconique et plus particulièrement aux images issues de la découverte des camps de concentration et de ces autres photos montrant d’autres amas de corps. Cela est-il susceptible de mieux nous faire comprendre les tenants et aboutissants du 20e siècle et plus particulièrement de certains invariants des guerres industrielles à interroger à l’aide concept de la brutalisation?
Photo d’Hiroshima – Robert L. Capp Collection 7/10

Photo d’Hiroshima – Robert L. Capp Collection 8/10
Image du Camp de concentration de Nordhausen
Source: http://carol_fus.tripod.com/army_the_camps.html
L’armée américaine oblige les habitants allemands de Buchenwald à visiter le camp peu après sa libération. Source: cndp
Sources : EnAmérique.com Blog @ Wired.com – Université de Californe, Merced (images) – Archives Hoover
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Le professeur Sean Malloy vient de retirer les photographies de son site. En effet, il se pourrait que les photographies retrouvées par Robert L. Capp ne soient pas des photographies prises à Hiroshima juste après l’utilisation de la bombe atomique, mais des photographies prises en 1923 lors du tremblement de terre de Kanton, près de Tokyo:
«The Robert L. Capp collection at the Hoover Institution Archives at Stanford University contains ten photographs purportedly showing the immediate aftermath of the Hiroshima bombing. Mr. Capp was assigned to the occupation forces outside Hiroshima after World War II. According to to Mr. Capp’s oral history (available along with the photographs in the Robert L. Capp collection), he found these photos among rolls of undeveloped film in a cave outside of Hiroshima. Since making these photographs publicly available, I have received reliable proof that at least two of these photos are actually of the 1923 Kanto earthquake. While I cannot speak for the entire collection, this evidence raises doubts about all of the photos and raises the strong possibility that the identification provided by the Hoover Archives is incorrect. I take full responsibility for my own failure to take additional steps to verify that the original archival designation was correct. I have removed the photographs until and unless their source can be verified by further research.» (lien: Page de Sean Malloy)
Le tremblement de terre de Kanto fit, selon les estimations actuelles, plus de 140’000 morts. Sur le tremblement de terre: Great Kanto Earthquake 1923
Sur son Flipbook, André Gunthert nous apprend que
« contrairement à ce que laisse entendre Le Monde, des photographies de victimes réalisées par des Japonais immédiatement après les bombardements atomiques existent et ont fait l’objet d’études détaillées par les spécialistes. La revue Etudes photographiques a notamment publié en 2006 des extraits des deux plus anciens corpus conservés, analysés par Michael Lucken (« Hiroshima-Nagasaki. Des photographies pour abscisse et ordonnée », Etudes photographiques, n° 18, mai 2006, p. 4-25). »