
La rentrée académique approche pour mes prochain-e-s étudiant-e-s et futur-e-s enseignant-e-s. Dans une semaine, ils débuteront leur formation et pour certains autres la poursuivront. Ils y entrent avec dans leur esprit tout un ensemble de représentations, d’attente, voire de certitude sur le métier qui les attend. Peut-être serait-il bon qu’ils perçoivent quelques incontournables de l’évolution en cours ou prochaine de leur métier? Peut-être également que pour les enseignant-e-s déjà en place est-ce également utile, voire encore plus nécessaire, d’appréhender ces nouvelles réalités?
Toujours est-il que les deux articles suivants méritent d’être lus. Ils illustrent bien, à mon avis, deux incontournables qui attendent nos institutions scolaires. De gré ou de force aurais-je envie d’ajouter.
Petite histoire d’une future agonie… « Veille et Analyse TICE
Malheureusement, l’agonie de l’Ecole telle que nous la connaissons risque d’être longue. A moins que le virus de la grippe ne vienne révéler que l’on peut faire autrement. A lire les récits d’établissements prêts à assurer la « continuité de service » même à distance, on peut faire l’hypothèse que cela va révolutionner la compréhension de l’ordre scolaire actuel, à défaut de sa forme (les choses rentreront vite dans l’ordre antérieur). Et pourtant ce qui risque d’être démontré, si cela se produit, c’est que la forme scolaire n’est pas aussi immuable que d’aucuns le pensaient. En instituant le CNED en chef de file, le ministère rassure, tout le monde sait ce que cela va produire sur le système. Par contre en voyant émerger les initiatives locales basées sur l’usage des TIC (mails, plateformes collaboratives etc…) il n’est pas impossible qu’une analyse fine de ces pratiques ne permette de faire émerger un modèle à partir duquel on pourrait tenter de reconstruire un système scolaire enfin «numérisé».
Bruno Devauchelle nous gâte en général et particulièrement ces deux derniers jours avec ces réflexions subtiles et stimulante. Hier, il nous entretenait de manuels numérisés (Faut-il numériser les manuels?). Aujourd’hui, il s’interroge sur le système éducatif dans son ensemble, ses rapports au numérique et à son basculement inéluctable (?) vers le numérique. Je me retrouve pleinement dans ces propos. Comme pour Bruno, le matériel mis en place par l’éducation nationale française pour la grippe A et son éventuelle utilisation à une échelle jusqu’alors jamais connue modifieraient, selon moi, instantanément les notions d’espace, de lieu, d’établissement et de classe. Plus particulièrement encore relativement à l’enseignement magistro-centré. Rarement, une instance a été aussi loin dans le replacement des enseignants en présentiel par des moyens et outils technologiques. Même si le cas de figure ne se réalise pas, l’ouverture est faite et les parents, les élèves comme leurs enseignant-e-s peuvent déjà s’y engouffrer…
L’accéléromètre du changement éducatif pourrait aussi venir par impact générationnel et les enseignant-e-s futurs, en formation ou actuels auront tout intérêt à lire l’article de ReadWriteWeb France consacré à la fameuse Génération Y.
La génération Y va tout changer « ReadWriteWeb
Une génération cauchemardesque probablement pour ceux qui ne manquent pas de cracher leur haine de Mai 68. Une génération comme Mai 68 la rêvait probablement si le portrait fait par ReadWriteWeb n’en est pas trop caricatural. Ainsi en reprenant les sous-titre de l’article, les caractéristiques de cette génération sont les suivantes:
- Ils sont branchés
- La télévision n’est plus le média roi
- Ils se foutent de la publicité et s’intéressent à ce que pensent leurs amis
- Le travail n’est pas leur vie
- Leur sens de la hiérarchie est différent
- Ils ont une conscience sociale
- L’actualité et la politique n’est plus la même
De ces caractéristiques et en se basant sur la deuxième partie de l’article dans le rapport de cette génération avec la technologie, le système éducatif devrait prendre les formes suivantes s’il ne veut pas disparaître à terme:
- ayant grandi avec internet, ils apprendront avec…
- ils n’apprendront pas de manière linéaire:
Leur façon de contrôler le déroulement du temps sur des programmes audiovisuels est aussi très particulière : ils ne cessent de naviguer – en avant ou en arrière – au sein d’un programme audiovisuel, la même chose est d’ailleurs valable pour la musique.
- La socialisation avec leur pair sera au dessus de tout, mais sous leur contrôle
Le partage est synonyme de pouvoir au sein de cette génération, quel que soit ce que l’on partage : connaissance, liens, compétences ou musique, au sein d’un cadre privé ou professionnel, le pouvoir s’acquière par le partage là où le fait de posséder sans partager était lié au pouvoir des anciennes générations, qui ont vécu dans une économie de la rareté et ne comprennent rien à l’économie de l’abondance propre au numérique.
- Les outils éducatifs devront s’inspirer des outils web
Pour ceux qui voudraient comprendre comment la génération Y voudrait voir son environnement d’apprentissage évoluer, le guide de Sacha Chaun sera une excellente introduction même si celle si est axée sur le monde professionnel:
The Gen Y Guide to Web 2.0 at Work
- Les scénarios pédagogiques devront faire avec une attention plus réduite
Ils passent d’un sujet à l’autre avec une facilité déconcertante, et non, ce n’est pas un drame ou la fin de l’intelligence, c’est juste différent.
- le mobile sera roi
En conclusion, comme le dit ReadWriteWeb:
Tenter de les forcer à adopter la culture de leurs ancêtres n’a pas plus de chances de réussir que de forcer les enfants des années 70 a adopter l’uniforme à l’école, ceux qui s’y sont essayé se sont cassé les dents. Il est encore temps de les accueillir plutôt que de les affronter […].
Reste la question suivante: êtes-vous entré-e dans la profession d’enseignant-e pour être confronté à cela? Si oui, je vous invite à lire les articles consacrés ici aux Elèves 2.0 et plus particulièrement cet article: Elèves 2.0 recherchent de toute urgence Professeurs 2.0.
Les adolescents de 1968 comme moi s’en sont presque tous bien sorti, nous avions bénéficié d’un enseignement même ci celui-ci nous ennuyant quelquefois. Les adolescents Y 2.0 ont eu droit à une éducation inutile et pas beaucoup d’enseignement. Beaucoup rêvent d’être des stars, des as du mobile, ils ne savent pas parler, écrire, lire, compter. Ce n’est pas bien grave, le marché est impitoyable, le marché a besoin de personnes soient très peu qualifiées soient des bac+6.