
Dans son livre « Now you see it », présenté par le New York Times, Cathy Davidson — qui veut remettre au goût du jour certaines inventions pédagogiques plus anciennes — flingue l’exercice de la dissertation au profit des blogs pédagogiques. Je plussoie.
Au contraire de la dissertation, les blogs offrent, par exemple, une solution adéquate à la question du plagiat:
«Les blogs destinés aux pairs présentent moins d’erreurs typographiques et factuelles, moins de plagiat, et sont généralement mieux écrits, en prose élégante et plus persuasive, que ne le seront jamais toutes ces dissertations rédigées en classe par les mêmes auteurs »
Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer dans l’affaire détestable de l’enseignant piégeur (Piéger les élèves ou les former avec les médias sociaux? | Chronique no 132):
de tout temps, ces exercices [comme la dissertation] ont plus favorisé la recopie et le couper/coller que le développement de la réflexion autonome des élèves…
Cathy Davidson abonde dans le même sens lorsqu’elle prend le contre-pied de ses collègues, qui se désolent souvent de ce que les étudiants sont globalement «mauvais en dissertation» et qu’elle suppose que c’est la forme de la dissertation, qui est n’est pas adaptée aux étudiants d’aujourd’hui.
De plus elle constate que même ses étudiants les plus réfractaires à l’exercice sont devenus prolixes lorsqu’elle leur a proposé de publier leur écrit sur Internet, de le soumettre à la critique et de le modifier en ligne. Et
«cela vaut pour tout, des commentaires politiques à la photographie en passant par la réalisation de vidéos satiriques.».
Plus largement, Cathy Davidson indique que
« Nous ne pouvons pas continuer à préparer les étudiants à un monde qui n’existe pas. Nous ne pouvons pas ignorer les compétences cognitives redoutables qu’ils développent en apprenant par eux-mêmes.
Et par-dessus tout, nous devons cesser de dénigrer les prouesses numériques, simplement parce que certains d’entre nous, quadragénaires et au-delà, ne parviennent pas à les égaler. Un bras de fer basé sur des rancunes institutionnelles entre les générations peut saboter toute une culture ».
Sur ce je vous souhaite une bonne rentrée des classes.
Source : REGARDS SUR LE NUMERIQUE | L’école de demain pourrait ressembler à celle… d’avant-hier.
Mise à jour (18:13) :
Pour prolonger sur l’utilité des blogs en éducation, je vous propose l’intéressante lecture de cet article récent : What are you writing for? et qui rejoint les observations de Cathy Davidson et mon avis sur l’utilité des blogs en éducation.
Mise à jour (31.08.2012): Le blog, la star du web 2.0 ?
L’avis de Caroline Chanlon en ce vendredi 31 août journée du blog :
«Au départ et je n’apprends rien à personne, le blog était très personnel. De mon point de vue, il avait un côté assez péjoratif, c’était le mauvais côté du web 2.0 qui ressortait : on laissait la parole à des personnes qui n’avaient pas grand chose à dire et qui n’intéressaient pas grand monde. […] Et FB est arrivé ! La finalité du blog est envisageable via un autre support plus simple, plus ergonomique, gratuit.
Je pense que l’explosion des réseaux sociaux a un peu détourné l’utilisation du blog, on a mieux apprécié ses vraies valeurs : produire du contenu (du vrai contenu), le commenter, le partager.
Car aujourd’hui et avec l’utilisation professionnelle que j’en ai, le blog représente pour moi un outil de haute qualité.»
Source : http://blog.educpros.fr/blog/2012/08/31/le-blog-la-star-du-web-20/
Amusant de proposer de faire des blogs quand cette forme d’expression est tombée en désuétude chez les moins de trente ans depuis trois-quatre ans. Et quelle noblesse de vouloir préparer les étudiants à la coquetterie de vieux beau de l’époque. Je crois qu’il existe encore des jeunes gens qui n’acceptent pas de devenir une simple Cathy Davidson
Amusant de voir que ce commentaire ne répond pas sur le fond…
Par ailleurs, il ne s’agit pas d’utiliser le dernier truc à la mode chez les élèves ou chez les étudiants, mais de les former. Dans ce cadre-là, les blogs ne sont pas tombés tombés en désuétude… Bien au contraire.
Mais j’observe que Cathy Davidson ne s’embarrasse pas de démonstration, et sue elle vise sûrement ici plutôt l’Essay anglophone-saxon que la dissertation francophone.
Sans doute, le billet de blog étant composé sur un ordinateur, il contient moins d’erreurs typographiques grâce à la correction automatique, mais qu’y gagne-t-on ?
Quant à la prétendue plus grande originalité, tout cela me semble tout bonnement incroyable, quand on lit les blogues.
Le fond est que la dissertation forme au raisonnement, à la réfutation des idées toutes faites, par la problematisation et l’argumentation, quand le billet de blogue s’occupe en général d’un seul fait vrai. Le blog participe de cette illusion que la connaissance, c’est la première réponse à une question sur le moteur de recherche Google.
Bien sûr, l’exercice peut finir en une forme stérile, une occasion un peu facile de faire scintiller un brillant rhétorique, mais n’empêche que les meilleurs billets que j’ai lus avaient exactement la forme d’une dissertation.
Tout d’abord, je vous remercie pour le développement de votre pensée au propos de ce billet et vos réflexions qui permettent de développer la discussion.
Préalablement, je pense que les propos de Mme Davidson peuvent s’appliquer tout autant à la dissertation francophone qu’à l’essay anglo-saxon.
Ensuite je remarque que vous remettez tous les blogues dans le même panier et ne développez pas votre propos uniquement en fonction des blogs utilisés en formation (collège, gymnase, lycée ou université) et dans la perspective proposée par Mme Davidson ou dans un cadre comme celui proposé par http://culturevisuelle.org qui regroupe des textes de professeurs, de chercheurs ou d’étudiants.
Surtout, la différence fondamentale entre la dissertation écrite uniquement pour le prof ou le billet de blog (qui peut tendre à la dissertation là n’est pas directement l’objet) ne tient pas tant dans le fait que le blog dispose d’un correcteur orthographique (ce qui est une bonne chose en soi, mais qui pourrait être compensé par la remise de la dissertation écrite avec Word) que dans la situation de communication. En effet, vous n’écrivez plus uniquement pour votre prof, mais pour des lecteurs potentiellement infinis. C’est bien la situation de communication qui opère un changement significatif dans l’écriture.
Par ailleurs, Mme Davidson ne parle pas d’originalité, mais donne les éléments suivants d’amélioration via les blogs : «moins d’erreurs typographiques et factuelles, moins de plagiat, généralement mieux écrits, en prose élégante et plus persuasive.»
À ce compte là, on pourrait faire observer à Cathy Davidson qu’une recette de cuisine, le mode d’emploi de mon réfrigérateur et un carton d’invitation sont encore meilleurs que les blogs, puisqu’on y trouve moins d’erreurs factuelles ou typographiques, et qu’en général ils sont plus convaincants pour leur lecteur qu’une dissertation sur le même sujet.
Visiblement vous tenez à rester hors sujet et à ne pas discuter véritablement. Donc acte.
L’avis de Caroline Chanlon en ce vendredi 31 août journée du blog :
Source : http://blog.educpros.fr/blog/2012/08/31/le-blog-la-star-du-web-20/