Description: Le XVe siècle est le temps de l’invention du monde. De Tamerlan à Magellan, depuis l’Asie centrale jusqu’à la capture de l’Amérique en 1492, s’accomplit une première mondialisation. Mais la geste de Christophe Colomb est tout sauf un événement fortuit : elle est précédée, et surtout rendue possible et pensable, par une dynamique globale et séculaire d’interconnexion des espaces, des temps et des savoirs du monde. Elle ne se laisse en rien circonscrire par ce que l’on appellera plus tard l’occidentalisation du monde : les marchands de l’océan Indien, les marins chinois de l’amiral Zheng He, mais aussi les conquérants turcs ont toute leur part dans cette histoire des devenirs possibles du monde, où rien n’est encore écrit. Ni dictionnaire critique ni somme érudite, Histoire du monde au XV siècle se veut un essai collectif davantage qu’une encyclopédie. Faisant alterner les chapitres de synthèse et les textes au ton plus libre éclairant un événement, un personnage ou une oeuvre, le livre se prête à la lecture au long cours comme au hasard du cabotage. Mais dans tous les cas, il s’agit bien de susciter des étonnements par rapprochement et d’éveiller des curiosités par le déplacement du regard. Si l’accent est naturellement mis sur ce qui circule plutôt que sur ce qui cloisonne, s’inscrivant en cela dans les perspectives nouvelles d’une histoire globale attentive aux connexions des lieux et des temps, cette histoire du monde ne se réduit pas à une chronique de la mondialisation : il s’agit aussi de rendre compte des spécificités et des originalités des territoires du monde, des temps du monde, des écritures du monde, des devenirs du monde – ces quatre dimensions inspirant l’architecture d’ensemble du livre. — 4ème de couverture.
Comptes-rendus :
Le Monde :
Ce livre d’histoire est énorme (près de 900 pages in-quarto), mais il faut dire que l’objet qu’il envisage ne l’est pas moins : c’est l’« histoire du monde au xve siècle » qu’une nombreuse équipe d’auteurs emmenée par Patrick Boucheron retrace dans cette « aventure collective », qui peut être décrite comme un essai de Global History (ou World History). Pour un historien français, ce genre évoque immanquablement le souvenir de « l’ambition braudélienne d’une histoire totale » (p. 20). Mais cette référence éminente est aujourd’hui éloignée, depuis que « nouvelle histoire », micro-analyse ou encore retour du récit sont passés par là. En fait, cet essai de Global History intègre tous ces legs : si l’on est parfois tout près de l’histoire globale « à l’ancienne », retraçant les grands phénomènes, le trend et les flux – des marchandises, des hommes, des idées –, on note aussi la réelle diversité des approches et des méthodes et l’acceptation des incertitudes et des manques du savoir, loin des ambitions de cette époque des Annales et de son désir de procéder à la « pesée du monde », selon les mots fameux de Pierre Chaunu (cités p. 16).
« Histoire du monde au XVe siècle », sous la direction de Patrick Boucheron : et le monde se globalisa…
https://www.lemonde.fr/livres/article/2009/11/19/histoire-du-monde-au-xve-siecle-sous-la-direction-de-patrick-boucheron_1269182_3260.html
Écrire l’histoire :
Depuis une trentaine d’années, ce qu’on appelle la « World History » a fait d’un monde décloisonné son objet d’étude privilégié, jouant des rapprochements et des comparaisons pour dépasser des récits nationaux au cadre souvent étriqué et surtout artificiel. Ainsi, en France, l' »histoire connectée » a été encouragée par les travaux de Serge Gruzinski et de Sanjay Subrahmanyam.L’ambitieuse Histoire du monde au XVe siècle que présentent Patrick Boucheron, Julien Loiseau, Pierre Monnet et Yann Potin, coordinateurs de cette oeuvre de grande ampleur, propose une application convaincante de cette nouvelle méthode. Conçu comme un « essai collectif » plutôt que comme une encyclopédie, le livre rassemble les articles d’une soixantaine d’historiens, médiévistes pour la plupart. Ils y explorent les prémices de la mondialisation avant l’âge des empires coloniaux, considérant que le XVe siècle, « ample et large, complexe et divers », en constitue une étape décisive. Les auteurs parcourent donc les « territoires du monde », depuis la prise du pouvoir par le conquérant turco-mongol Tamerlan, dans les années 1370, jusqu’au passage du fameux détroit par Magellan en 1520.Refusant de se limiter à une histoire globale conçue comme une accumulation d’études nationales, ils ont à coeur de privilégier une approche en termes de comparaisons et d’échanges. Trente ans après Civilisation matérielle, économie et capitalisme de Fernand Braudel, il s’agit ici de dépasser une « histoire totale » fondée sur une « grammaire des civilisations » aujourd’hui remise en question. Voici donc une somme importante et originale, qui n’offre pas seulement une synthèse inédite des recherches les plus récentes. Elle invite également à s’interroger sur la pertinence et la possibilité de penser un « monde » connecté avant le XVIe siècle. S’il semble aujourd’hui impensable d’échapper à la mondialisation, c’est en interrogeant sa genèse, ses formes et sa signification que nous parviendrons à mieux la comprendre.
https://journals.openedition.org/elh/408
Disponibilité et emplacement:
Bibliothèque cantonale et universitaire – Lausanne, site Unithèque histoire UPB 8188 94.1