La liberté est un bien trop précieux pour la remettre entre les mains de quiconque, fut-il même un maître bienveillant et attentionné.

Dans un dernier billet de Framablog (Google Chrome m’a tuer ou le probable déclin de Firefox si nous n’y faisons rien – Framablog), l’auteur s’inquiète par anticipation
si le navigateur Google Chrome n’est pas en route pour doucement mais sûrement tout écraser sur son passage et si la communauté du Libre peut ou doit y faire quelque chose, sachant que l’une des principales victimes collatérales pourrait bien être Firefox.
Deux constats l’invite à s’inquiéter pour l’avenir de Firefox:
- si Internet Explorer voit ses parts de marchés diminués, c’est Google Chrome qui en bénéficie alors que Firefox stagne et que certains utilisateurs de Firefox migrent même vers Google Chrome depuis que ce dernier accepte les extensions;
- y a-t-il de la place pour plusieurs navigateurs dans un secteur où a régné longtemps l’absence de concurrence.
Ce dernier point interpelle dans la mesure où le monde du web se concentre généralement sur un nombre limité de services-phares comme le prouve la mainmise de Facebook sur les réseaux communautaires d’échange ou twitter relativement au micro-blogging.
Dans cette optique, la fondation Mozilla et l’ensemble de la communauté du logiciel libre se retrouvent régulièrement en situation précaire face aux quatre grands: Microsoft, Google, Apple et Facebook. La tendance libertaire du net a certes toujours été forte et inventive, mais bien évidemment rien n’est jamais coulé dans le bronze en la matière.
D’autant plus que la maîtrise de sa vie numérique ne préoccupe finalement que peu la grande partie des internautes, y compris, si j’interprète bien la migration de certains de Firefox vers Google Chrome, du côté de certains adeptes du logiciel libre. En la matière, Google bénéficie encore d’une certaine aura malgré d’évidentes volontés hégémoniques en la matière.
L’ambiguïté est même nichée au coeur du projet puisque Google Chrome —comme Chrome OS— repose sur une couche de logiciel libre (Chromium) sans que le navigateur de Google soit lui-même un logiciel libre et que Google finance à 90% la fondation Mozilla. Sur ce dernier point, Google maîtrise parfaitement les règles de concurrence monopolistique, mais en est-il de même de la part des partisans du logiciel libre et de l’open source? Comme l’indique lucidement l’article de Framablog:
Quand vous dépendez financièrement d’un partenaire qui se transforme jour après jour en votre principal concurrent, vous vous sentez légèrement coincé aux entournures !
On peut aussi entrevoir la situation à la lumière d’une nouvelle version de la fable du loup et de l’agneau.
La situation paraît d’autant plus préoccupante que Google Chrome— si l’on fait abstraction des données transmises par les internautes en l’utilisant— est, contrairement à Internet Explorer, un produit de qualité damant le pion à la version actuelle de Firefox:
Là aussi il ne faut pas se le cacher, Google a réussi à innover en débarquant avec Chrome, directement sur les trois plateformes Windows, Mac et GNU/Linux. Sécurité, interface épurée (fidèle à la tradition Google), affichage fluide et agréable, onglets indépendants, une très pratique recherche à même la barre d’adresses, la présence d’extensions dans la dernière version… et puis cet argument massue : la rapidité.
Dans le fond, la question est de savoir si les internautes se soucient uniquement de choisir leur maître et de passer ou non de Microsoft à Google (ou Facebook… ou éventuellement Apple avec son iPad) ou s’ils sont prêts à faire les efforts nécessaires pour être leur propre maître.
Personnellement, j’ai fait le choix de Firefox (3.6) malgré le fait que j’étais extrêmement satisfait de Safari (Apple) et que la migration vers Firefox m’a coûté dans un premier temps. (1) J’ai également fait le choix de mon propre hébergement et d’y confectionner mon serveur mail malgré la qualité des produits tels que Google Sites ou Google Mail. Enfin, je privilégie aussi identi.ca (ou status.net) à twitter par mesure de précaution et j’ai généré mon propre outil de gestion des flux de ma vie numérique (La vague et le roseau).
Je suis convaincu que nous ne devons pas badiner avec ces choses-là en cette matière comme dans les autres de l’existence. La liberté est un bien trop précieux pour la remettre entre les mains de quiconque, fut-il même un maître bienveillant et attentionné.
(1) Depuis je me régale avec l’adoption de l’extension Mozilla Weave qui me permet de synchroniser mes signets en toute sécurité entre mes différents ordinateurs que ce soit sur Windows, Mac ou Linux (Ubuntu). Pour le reste, je sélectionne avec attention mes extensions Firefox pour en limiter l’embonpoint.
Source: Google Chrome m’a tuer ou le probable déclin de Firefox si nous n’y faisons rien – Framablog.