1. Les différentes découvertes de 1856 à 2001

Découverte de l’homme de Néandertal (1856) (Source : Encyclopedia Universalis)
Découvert en 1856 dans une grotte de la vallée (tal) de Neander près de Düsseldorf (Rhénanie-du Nord-Westphalie), l’homme de Néandertal fut le premier homme fossile à être reconnu. Ses restes – une calotte crânienne et quelques os des membres – recueillis par un instituteur, Johann Carl Fuhlrott, et examinés par Hermann Schaaffhausen de l’université de Bonn, furent considérés par eux comme les témoins d’une race humaine disparue. Dès l’annonce de sa découverte (1857), l’homme de Néandertal (alors orthographié Néanderthal, le nom de Homo neanderthalensis étant proposé pour la première fois en 1863 par William King) fut aussitôt l’objet d’âpres discussions. Mais avec la découverte de nouveaux restes de Néandertaliens, en particulier de deux squelettes presque complets en 1886, dans la grotte de Spy en Belgique, l’interprétation pathologique fut peu à peu abandonnée et l’existence d’une forme humaine primitive ancienne, bien différente de l’homme actuel, définitivement admise. On sait aujourd’hui que celle-ci a vécu entre 100 000 et 35 000 ans.

Découverte de l’homme de Cro-Magnon (1868) (Source : Encyclopedia Universalis)
C’est en 1868, lors de la construction de la voie ferrée de Périgueux à Agen, que furent découverts fortuitement, par Louis Lartet, au fond de l’abri-sous-roche de Cro-Magnon, près du village des Eyzies-de-Tayac (Dordogne), les restes de cinq squelettes humains dont la disposition évoquait l’idée de sépulture. Ces restes étaient accompagnés d’ossements d’animaux et d’une multitude de coquilles marines perforées qui avaient servi de parures. De nombreux silex taillés étaient répandus sur plusieurs niveaux archéologiques attribués à l’Aurignacien, daté de nos jours entre 33 000 et 26 000 ans avant notre ère. Les hommes de Cro-Magnon (Homo sapiens sapiens) se distinguaient de leurs prédécesseurs, la « race de Cannstadt » – nom sous lequel on désignait alors les Néandertaliens –, par leur stature élevée, d’environ 1,80 mètre, leur crâne volumineux doté d’une capacité cérébrale de l’ordre de 1 600 cm3, leur face large au front redressé ainsi que par la présence d’un menton.

Découverte du premier Australopithèque (1924) (Source : Encyclopedia Universalis)
Alors qu’au début du XXe siècle, l’Europe avait déjà livré de nombreux restes d’hommes fossiles, ce n’est qu’en 1924 que l’on découvrit en Afrique du Sud, dans la grotte de Taung, le crâne d’un très jeune sujet, le tout premier représentant d’un groupe d’hominidés très anciens, exclusivement fossiles et africains : les Australopithèques. Désignée par son inventeur, Raymond Dart, sous le nom d’Australopithecus africanus en 1925, cette créature fut considérée par lui comme un être intermédiaire entre les grands singes et l’Homme. Pour la communauté scientifique, c’était un singe – le volume de son cerveau était estimé à 520 cm3 – et il fallut attendre la découverte, par Robert Broom, d’un crâne d’Australopithèque adulte en Afrique du Sud en 1936, pour en comprendre l’entière signification et y reconnaître un véritable hominidé. Les Australopithèques, qui ont vécu entre 6 et 2,5 millions d’années environ, comprennent, de nos jours, plusieurs formes distinctes dont l’une est peut-être à l’origine de la lignée humaine .

Découverte de Lucy : Australopithecus afarensis (1974) (Source : Encyclopedia Universalis)
La découverte en 1974, par Yves Coppens, Donald Johanson et Maurice Taïeb, d’un nouvel Australopithèque, Australopithecus afarensis, dans la dépression de l’Afar dans le nord-est de l’Éthiopie (site de Hadar), connu surtout sous le nom de Lucy, était exceptionnelle, avant tout par la conservation d’une grande partie de son squelette. Avec cinquante-deux os, soit 40 p. 100 de son squelette, Lucy est à ce titre, avec certains Australopithecus africanus de la grotte de Sterkfontein en Afrique du Sud, l’un des hominidés de plus de trois millions d’années, le plus complet connu. L’étude anatomique détaillée de Lucy a montré d’autre part qu’elle vivait encore dans les arbres une grande partie de son temps, bien qu’au sol, dans la savane arborée, elle fût bipède. Son squelette postcrânien présente en effet une combinaison de caractères qui trahissent à la fois un mode de locomotion bipède – comme l’indiquent son bassin court et large, son fémur incliné et le col de celui-ci allongé – et une aptitude à la vie arboricole – ce dont témoignent en revanche ses articulations des épaules et du coude ainsi que ses longs bras et ses jambes courtes.

Découverte d’Homo antecessor (1994) (Source : Encyclopedia Universalis)
C’est dans le massif montagneux d’Atapuerca, près de la ville de Burgos en Espagne, qu’ont été découverts les plus anciens hommes fossiles d’Europe. Alors que ce massif était connu de longue date des paléontologues et préhistoriens amateurs, ce n’est qu’en 1994, lors des fouilles entreprises par Juan Luis Arsuaga de l’université Complutense à Madrid, Jose Maria Bermudez de Castro du Musée d’histoire naturelle de Madrid et Eudald Carbonell de l’université de Barcelone, que l’on découvrit, dans l’une des cavités karstiques du site de Gran Dolina, de très nombreux restes humains (près d’une centaine) vieux d’au moins 780 000 ans. Tous ces vestiges, pour la plupart très fragmentaires et qui représentent plusieurs individus (enfants, adolescents et adultes), étaient mêlés à de nombreux ossements d’animaux qui n’étaient visiblement que des reliefs de cuisine. Plusieurs des os humains eux-mêmes portaient des traces de décarnisation qui ne laissent que peu de doute quant au cannibalisme pratiqué par les hommes de Gran Dolina. Ces derniers, les plus anciens connus de toute l’Europe, auxquels on a donné, en 1997, le nom d’Homo antecessor, ne possèdent pas encore les traits physiques qui vont caractériser les populations ultérieures, celles des pré-Néandertaliens, qui apparaîtront vers 500 000 ans.

Découverte d’Orrorin tugenensis (2000) (Source : Encyclopedia Universalis)
C’est dans les Tugen Hills, au cœur du rift Gregory au Kenya, que Martin Pickford et Brigitte Senut ont découvert, en 2000, les restes d’un nouvel hominidé vieux de quelque 6 millions d’années dans le gisement de Lukeino. Treize pièces osseuses et dentaires – dont deux mandibules et deux fémurs très fragmentaires –, représentant au moins cinq individus, semblent confirmer la présence en Afrique de l’Est d’un ancêtre de l’homme déjà bipède dès 6 millions d’années. L’existence de ce nouvel hominidé très ancien, baptisé Orrorin tugenensis mais plus connu sous le nom de Millenium ancestor (l’ancêtre du millénaire), avait en fait été pressentie dans ce même gisement lorsque Martin Pickford y découvrit vingt-six ans auparavant, une unique molaire qu’il était alors impossible d’attribuer. Si l’humérus et la phalange de la main, longue et incurvée, indiquent qu’Orrorin était encore agile dans les arbres, les fémurs en revanche témoignent chez cette créature d’un mode de locomotion fréquemment bipède au sol.

Toumaï Sahelanthropus tchadensis (2001) (Source : http://www.hominides.com/html/ancetres/ancetres-tumai-sahelanthropus-tchadensis.html)

Age : 7 millions d'années. Découvert le 19 juillet 2001 par Ahounta Djimdoumalbaye, Toumaï ne fait parler de lui que depuis juin 2002. Il faut dire qu'il a été retrouvé à 2500 kilométres à l'ouest du Grand Rift, ce qui vient en contradiction avec la théorie d'Yves Coppens.
Hormis un morceau de mandibule et des dents, aucune autre partie du squelette de Toumaï n'a été retrouvée. On ne peut donc pas encore se prononcer sur son mode de locomotion (bipéde ou pas ?). Sa capacité cranienne, de l'ordre de 350 cm2, est équivalente à celle nos chimpanzés actuels. En résumé, beaucoup de caractères sont proches des hominidés (trou occipital, usure des canines...) mais toutefois insuffisants pour une classification sure.

Le passage d’Homo erectus à Homo sapiens
Que ce soit sur le continent africain, ou sur le continent asiatique, il semble aujourd’hui qu’une transition locale entre Homo erectus et Homo sapiens ait eu lieu. L’Homme moderne serait-il donc né en plusieurs endroits du globe ? Certains scientifiques pensent plutôt qu’il serait né en un endroit unique (plutôt l’Afrique), d’où il se serait répandu à travers le monde, en remplaçant au passage les populations anciennes. Alors, origine multirégionale ou origine unique ? Ces deux concepts s’affrontent depuis des dizaines d’années et, dans plusieurs cas, la datation incertaine des fossiles ne permet pas de trancher entre les deux hypothèses. Certains chercheurs s’orientent aujourd’hui vers un compromis, lié à la possibilité d’un métissage entre populations anciennes et populations plus récentes. En fait, il y aurait migration et croisement. Ce qui reste certain c’est que les plus anciens Homo sapiens sapiens, c’est-à-dire les Hommes modernes ont été découverts au Proche-Orient, sur le site de Qafzeh (Israël) et qu’ils sont vieux de près de 100 000 ans. Si leurs ancêtres sont africains, il faut intensifier les fouilles dans les régions intermédiaires, qui seraient témoins de ces migrations anciennes.