Grands écrivains, grands entretiens (5/5). L’auteure de « La Pianiste », Prix Nobel de littérature 2004, enfant terrible de l’Autriche, tient le monde à distance depuis quinze ans. Présence purement numérique, elle publie ses textes tranchants et ironiques sur Internet, et n’accorde plus que de rares interviews – telle celle-ci au journal « Le Monde ».
« Les séries ne remplaceront jamais la lecture. C’est un processus complètement différent. Mais j’adore en regarder, parce que ça me détend de passer du royaume des signes à celui des images. Cela me rappelle peut-être les vieux romans-feuilletons de mon enfance. Ce suspense du cliffhanger qui vous oblige à regarder l’épisode suivant. C’est drôle, j’ai regardé une série française, Les Revenants [de Fabrice Gobert, 2012-2015], qui a beaucoup de choses en commun avec mon roman Enfants des morts. Elle commence exactement de la même façon, par un accident de bus. Je serais curieuse de savoir s’il y aura une troisième saison. Avant, on emportait toujours de la lecture dans le métro. Il me semble que c’est de plus en plus rare aujourd’hui. Les jeunes ont les yeux rivés sur l’écran de leur smartphone. D’un autre côté, avec toutes ces applis, on peut aussi dire qu’il y a un retour à l’écrit, mais sous une forme extrêmement dégradée. C’est une culture écrite très simplifiée, très appauvrie. Pour en revenir aux séries, je tiens à dire que je considère Les Soprano [de David Chase, 1999-2007] comme un chef-d’œuvre absolu, comparable en tout point à la littérature. »
Source : Elfriede Jelinek : « La rage me submerge toujours autant, sans quoi je n’écrirais pas »
Laisser un commentaire