Comment le cinéma a-t-il ou traite-t-il des différentes périodes historiques ?
Petit tour d’horizon et renvoi vers des ouvrages ou des sites spécifiques.
Périodes abordées :
- Films & Antiquité
- Films & Moyen Âge
- Films & Ancien Régime
- Films & Révolutions
- Films & Première guerre mondiale
- Film & Shoah
Films & Antiquité
Les films sur l’Antiquité appartiennent à plusieurs familles.
La principale est celle dont la source est la Bible et qui est le fait, le plus souvent, de cinéastes américains.
La deuxième famille porte sur les grandes heures de l’Empire romain et elle présente volontiers les mêmes traits que la précédente; ainsi abondent les César et Cléopâtre. Mais, l’évocation de l’Empire romain est également une glorification de l’Occident face aux Barbares. Principalement au travers des péplums.
Sans doute est-ce contre ces clichés que réagissent Stanley Kubrick et Dalton Trumbo dans Spartacus (1960)
Mais, sur l’histoire de l’Antiquité au cinéma, la vraie rupture est celle qu’opère Frederico Fellini dans Satyricon (1969). Se libérant de la mémoire historique transmise par la tradition classique, il imagine la vie de ses personnages comme le ferait un reporter aujourd’hui. Le tout étant imaginé pour nous dépayser et nous transporter dans un monde qui nous est alors étranger.
Tiré et adapté de Ferro M. (2003). Cinéma, une vision de l’histoire. Paris: éd. du Chêne, pp. 18-20
Films et Moyen Âge
Comme l’a montré Michel Zink, dans Les Cahiers de la cinémathèque (1985), la plupart des films d’histoire sur le Moyen Âge constituent « une projection dans l’enfance, une projection de l’enfance. »
Tiré et adapté de Ferro M. (2003). Cinéma, une vision de l’histoire. Paris: éd. du Chêne, pp. 18-20
Dans le prolongement de l’ouvrage de Ferro, le ciné-club de Caen vous propose un dossier reprenant les propos et la démarche de Ferro, ainsi que des fiches de présentation de divers films sur le moyen-âge.
Pour une filmographie thématique très complète, la consultation de Medieval History in the Movies s’avère indispensable.
Par ailleurs —basé sur «Le Moyen-Age vu par le cinéma européen» des Cahiers de Conques, n°3, avril 2001— l’article Cinéma et Moyen Âge du site les Sentiers de l’imaginaire, vous offrira une entrée en matière très utile au travers du Moyen Âge vu par Hollywood ou le cinéma européen.
Il faut noter aussi la publication majeure de François Amy De La Bretèque (2004), L’Imaginaire médiéval dans le cinéma occidental. Paris: Champion, 1276 p. (Nouvelle Bibliothèque du Moyen Age, 70). ISBN : 2-7453-1064-X. Un compte-rendu de cet ouvrage a été publié par la Revue Le Moyen Age no1 2005 [ISBN : 2-8041-4728-2] par Jean Dufournet «Le Moyen Âge au cinéma» p. 115 à 120.
Films & Ancien Régime
La représentation de l’Ancien Régime au cinéma a bien changé, des « films en dentelles » réalisés dans l’entre deux-guerres aux visions plus « noires » du cinéma-histoire des années 1970. Longtemps, le cinéma de fiction présente une version « rose » de l’Ancien Régime, qui convient parfaitement aux impératifs des producteurs. Mais cette vision réductrice et pour tout dire réactionnaire ne résiste pas au temps, surtout en France où elle contredit de manière flagrante l’enseignement républicain. Dès la fin des années 1950, l’Ancien Régime est brocardé par quelques jeunes insolents comme Fanfan la Tulipe ou Cartouche… Dans les années 1970, le cinéma se réconcilie avec l’Histoire pour donner enfin une vision crédible de l’époque, au prix d’un certain didactisme.
Pascal Bauchard dans Educiné
a) Films de cape et d’épée
Leur rôle est essentiellement conservateur, dans le sens où leur mission est de « remettre de l’ordre »: la Monarchie n’y est jamais critiquée et les « Bons rois » de Lavisse sont valorisés. (Bauchard)
Le Bossu (1959) de André Hunebelle avec Jean Marais et Bourvil
b) Le cinéma-histoire
La Nouvelle histoire, alors en pleine ascension, inspirera beaucour de réalisateurs à partir des années 1970.
L’exemple type réside dans le film de René Allio sur les Camisards. Elle n’est pas sans poser certains problèmes que René Allio résume clairement :
« Si vous décider de ne pas passer par un héros central, il ne peut y avoir de vedette donc il faut un autre financement. On peut facilement présenter les classes domnantes : il est beaucoup plus difficile de représenter les classes populaire. » (cité par Bauchard)
Ce cinéma érudit a pu paraître austère à certains. D’ailleurs, certains de ces films n’ont eu qu’une audience réduite et les réalisateurs n’ont trouvé leur salut qu’en travaillant pour la télévision. Il est clair que ces cinéastes insistent sur les ombres de cette période : l’oppression féodale dans 1788, l’absolutisme religieux dans Les Camisards… Même quand ils évoquent la Cour, c’est pour démonter les stratégies de représentation du pouvoir monarchique ou souligner l’ambiance corrompue et cynique qui y règne (Que la fête commence de Tavernier).
Cette nouvelle vision de la période s’est maintenant suffisamment imposée pour être intégrée dans tous les films qui se déroulent sous l’Ancien Régime.
Les Camisards (1972) de René Allio
Que la fête commence (1974) de Bertrand Tavernier
Films & Révolutions
Révoltes, révolutions, cinéma
de Christian Delage, Béatrice Fleury-Vilatte, Marc Ferro, Centre national d’art et de culture Georges-PompidouFrance
Langue : Français Éditeur : Editions du Centre Pompidou (15 juillet 1993)
Collection : Cinéma pluriel
Format : Broché – 311 pages
ASIN : 2858505357
Dimensions (en cm) : 2 x 20 x 24
Présentation de l’éditeur
Textes de Christian Delage et Béatrice Fleury-Vilatte. Une réflexion sur les rapports entre le cinéma historique et l’histoire des révoltes et révolutions dans le monde entier, selon qu’il les reconstitue ou qu’il les reconstruit. L’ouvrage contient quatre-vingts synopsis de films. Cet ouvrage s’intéresse aux films historiques, toute origine confondue, qui témoignent des plus grandes révoltes ou révolutions (de la Révolution française à la Révolution islamique de Téhéran en passant par la Révolution russe et la guerre d’Espagne). Il offre une analyse précise de l’évolution de ce genre suivant les pays et les époques. Il interroge par ailleurs le sens même de la notion d' »action révolutionnaire » menée par les cinéastes. Autrement dit, il interroge la manière dont ces derniers ont su se détacher du récit de reconstitution pour découvrir, par l’imaginaire, un système de reconstruction qui permet de dépasser le degré zéro de l’analyse historique et de donner à penser le rapport entre passé et présent.
Le dossier La Révolution française à l’écran : intérêts et problèmes pour l’historien et l’enseignant du site cinehig.
Après un article replaçant dans le contexte historiographique et cinématographique différentes oeuvres de fiction, l’article se conclut sur une série de thème/sujets/événements pouvant être travaillés en classe. Chaque thème est accompagné d’un dossier pédagogique.
Voir aussi le billet: “Révolution française” de Robert Enrico sur DailyMotion
Films & Première Guerre Mondiale
Les trois configurations historiographiques de 14-18
Le traitement de 14-18 par les historiens a connu «trois configurations historiographiques» majeures.
– La première, née au coeur même de la guerre, est surtout d’ordre militaire et diplomatique (politique). Une histoire “vue d’en haut”. Il s’agit surtout alors d’établir l’histoire du conflit, d’en recenser les sources, d’en arrêter le sens. D’où le poids écrasant de la question des «responsabilités», celles du déclenchement de la guerre, de sa conduite ou de son issue.
– Une deuxième étape est perceptible à la fin des années 1950. Après la guerre “vue d’en haut” vient le temps de la guerre “vue d’en bas. C’est le grand moment de l’histoire économique et sociale, influencée par le marxisme et attentive aux conditions de vie et aux rapports de classes, aux contraintes économiques et aux effets politiques, notamment révolutionnaires. La guerre devient mobilisation économique, “guerre totale”. La question de la “révolution” est au coeur des problématiques.
–La dernière séquence, qui émerge dans la décennie 1980, cherche à constituer la «culture de guerre» —sur les contraintes et l’encadrement qui pèsent sur les individus ou leur adhésion volontaire— et étudie la “brutalisation” qui résulte de l’expérience de guerre.
Référence : Prost, A. & Winter, J. (2003). Penser la Grande Guerre. Un essai d’historiographie. Paris: Seuil.
14-18 au cinéma
Pour une recension des films sur 14-18 de 1916 à 2005, vous pouvez télécharger le fichier .doc “Cinéma et première guerre mondiale” de l’Académie de Besançon :
artic.ac-besancon.fr/histoire_geographie/HGFTP/autres/Cinema/cine1418.doc
Le dossier relatif à la guerre 14-18 du ciné-club de Caen. Il comprend également des fiches de films.
Par ailleurs, le site écran noir consacre un Dossier à la guerre 14-18 au cinéma : http://www.ecrannoir.fr/dossiers/14-18/index.html
Dans les classiques ou récents, on peut signaler :
– Jean Renoir (1937) La Grande Illusion
– Stanley Kubrick (1958) Les sentiers de la gloire [lire article Les sentiers de la gloire, de l’histoire à l’historicité de Cinehig et celui de Télédoc Les Sentiers de la Gloire]
– Bertrand Tavernier (1989) La Vie et rien d’autre et (1996) Capitaine Conan.
– François Dupeyron (2001) La Chambre des Officiers
– Jean-Pierre Jeunet (2004) Un long dimanche de fiançailles [voir l’article de l’aphg de Caen Un long dimanche de fiançailles]
– Christian Carion (2005) Joyeux Noël
Films & Shoah
Le dossier et les fiches relatives au Cinéma et Histoire du Ciné-Club de Caen.
Mon billet « Nuit et brouillard, un lieu de mémoire ».
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