«Destruction de l’idée républicaine», «éradication de la culture», «paroxysme d’un processus de déculturation»… L’enseignement de l’histoire fait régulièrement l’objet de débats houleux. L’édition 2015, autour de la réforme des programmes du collège, aura été particulièrement virulente. Les historiens Pierre Nora et Jean-Pierre Le Goff, les essayistes Pascal Bruckner et Alain Finkielkraut, l’ancien ministre de l’Education Luc Ferry ont attaqué frontalement le projet élaboré par le Conseil supérieur des programmes : pas assez chronologique, trop repentant. Libération a demandé à une historienne américaine, Carla Hesse, spécialiste de la Révolution française et professeure à Berkeley (Californie) de commenter la tempête historiographique de l’année. Sa position relative à la nécessité de construire un roman national pluriel ne manquera pas, à son tour, de faire polémique…
La première critique faite aux nouveaux programmes, c’est qu’ils signeraient la fin du «roman national». Un pays a-t-il besoin d’un tel récit ?
«Pour exister, une collectivité a besoin d’un roman national, qui réunit une idée de la temporalité mais aussi de l’espace. La conscience de la temporalité – le sentiment d’exister dans un trajet temporel – est, au niveau cognitif, essentielle à l’individu comme à toute collectivité. Pour agir, dans n’importe quel domaine, mais surtout pour agir en tant que collectivité politique, pour essayer de construire une société plus juste et plus prospère, il nous faut partager une narration collective avec un passé, un présent et un avenir. Il n’y a aucune raison de ne pas pouvoir écrire ce roman au pluriel, en incorporant des voix et des perspectives multiples».
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