Dans la continuité des travaux antérieurs sur l’écriture de l’histoire, Aude Déruelle et Alain Tassel publient les actes du colloque intitulé « Pour une approche narratologique du roman historique », qui a eu lieu à Nice du 19 au 21 mai 2005. Étudiant les rapports problématiques entre l’histoire et la fiction romanesque, l’ouvrage pose un certain nombre de questions, soulevées en partie par Claudie Bernard dans l’introduction.
La première question est celle de la poétique du roman historique. Comment concilier en effet un vrai historique et le genre romanesque qui, cherchant à plaire à ses lecteurs, s’appuie sur le vraisemblable et met en jeu des procédés fictionnels en contradiction avec la vérité de l’écriture du factuel.
La seconde question que pose le roman historique est celle de l’historiographie. Quelle lecture et quelle conception de l’histoire nous livre la fiction romanesque ? Le roman révèle bien souvent la conception que le romancier se fait de l’histoire, comme si la fiction se servait de l’histoire pour en dénoncer les insuffisances et les limites.
Enfin, le roman historique se sert de l’histoire dans une perspective idéologique, dans la mesure où le roman se sert du passé pour dénoncer le présent et l’histoire lointaine sert ainsi à crypter une histoire contemporaine.
La conclusion du compte-rendu indique que
Il faut aussi remarquer que le roman se sert de l’histoire plus qu’il ne la sert. D’un point de vue moral, il en montre les faiblesses en se montrant plus moral qu’elle. D’un point de vue philosophique, il en démonte les rouages en donnant du sens au chaos des événements, en niant la notion de progrès ou sa capacité à donner des leçons. Enfin, d’un point de vue poétique, cette remise en cause de l’histoire oblige le roman à innover, à se transformer tantôt pour échapper à l’invraisemblance, tantôt pour dire la faiblesse du narratif, tantôt pour mettre en valeur le personnage. C’est par son incapacité ou son absence de volonté à suivre l’histoire que le roman historique s’est paradoxalement enrichi.
Enfin, la dernière question qui se pose est celle de l’existence même de l’histoire dans ces œuvres. Roman historique ne signifie pas reproduction du réel, parce que l’histoire mise en scène est une histoire culturelle (histoire privée, fondée sur des sources secondaires), une histoire déjà passée par le prisme du rêve où domine l’émotion. Le roman historique est peut-être paradoxalement le véritable « art de l’éloignement ».
Le compte-rendu complet de l’ouvrage : Le roman historique : un « art de l’éloignement » ?.