Une présentation très intéressante et surtout pertinente de Michel Guillou. Plus même qu’un état des lieux de la question, cette présentation Michel nous permet de réfléchir très sérieusement à la question. Merci à Michel Guillou.
Une présentation très intéressante et surtout pertinente de Michel Guillou. Plus même qu’un état des lieux de la question, cette présentation Michel nous permet de réfléchir très sérieusement à la question. Merci à Michel Guillou.
Philosophe et écrivain, Tristan Garcia publie Ames , un ambitieux sixième roman et premier volet d’un projet en trois tomes qui entend retracer l’histoire de la souffrance à travers toute l’humanité. Son affirmation que les vaincus n’ont pas d’histoire et que seule la fiction peut se mettre au service des oubliés de l’histoire, fait écho aux travaux de Nathan Wachtel (1971) La Vision des Vaincus – Les Indiens du Pérou devant la Conquête Espagnole (1530-1570) (voir sa recension par la Revue L’Histoire). Réflexions.
« j’essaie d’être attentif, toujours, à re-raconter l’histoire du point de vue des vaincus, des dominés, des subalternes. Ce qui est très compliqué, car les vaincus n’ont pas d’histoire. Celle-ci est toujours racontée par les vainqueurs. Et le problème, c’est que l’épopée en littérature est toujours le signe d’une victoire militaire, d’un impérialisme. Etre attentif à la souffrance, c’est un moyen de garder la forme épique mais aussi de raconter l’histoire du point de vue de ceux qui n’en ont pas. Les oubliés de l’histoire. C’est pour ça que la fiction est nécessaire. »
Interrogé sur le travail de recherche nécessité par son ouvrage, il pose aussi la fiction comme moyen d’aller regarder dans les blancs de l’histoire, mais il met aussi en avant tout le travail de recherche plus particulièrement concernant les connaissances factuelles :
« Ma technique est de commencer par déterminer un lieu précis et une année. Ensuite, je vais lire tout ce que les archéologues et les historiens ont comme connaissances factuelles sur cet endroit, à cette date-là. J’essaie d’être vraiment systématique : je fais des fiches avec les habits, la nourriture, les odeurs, les expressions, les usages, l’architecture. Comme un chef déco de cinéma. Et à partir de là, quand j’ai ce décor, ce qui m’intéresse, c’est d’aller regarder dans les blancs de l’histoire. Ce qu’on ne connaît pas. Et c’est dans ces blancs que j’injecte la fiction. Evidemment, plus c’est lointain, plus tu as du blanc. Globalement, au début de la documentation, tu peux chercher sur internet, mais petit à petit, quand tu resserres, tu arrives à ce moment fascinant où tu réalises qu’il n’y a pas tout sur le net. Alors tu es obligé d’aller quelque part dans le monde, dans une bibliothèque, retrouver des références qui n’ont pas été numérisées. C’est la ligne de flottaison d’internet. Et tu découvres qu’il y a des choses en dessous. J’adore ça. »
Le livre : Ames – Histoire de la souffrance I (Gallimard), 720 p., 24 €
—A lire : LesInrocks – Tristan Garcia : “Les vaincus n’ont pas d’histoire”
Crédit photo en-tête : Edfou. Temple Égyptien. Bas relief. Pixabay License. Libre pour usage commercial. Pas d’attribution requise
Mikaël Chambru, Université Grenoble Alpes
Cet article a été co-écrit avec Julie Polge, chargée d’exposition scientifique à la Communauté Université Grenoble Alpes.
En France, les vidéastes sur YouTube – les youtubeurs – spécialisés dans la vulgarisation sont actifs depuis une dizaine d’années déjà. A mesure qu’il a pris de l’ampleur, ce phénomène n’est pas passé inaperçu auprès des acteurs de la Culture scientifique, technique et industrielle (CSTI). Les musées, les établissements d’enseignement supérieur et de recherche, les Centres de CSTI (CCSTI) et les associations ont peu à peu investi ce nouvel espace de médiation, en produisant eux-mêmes des contenus et/ou en collaborant avec des youtubeurs. L’analyse des jeux, enjeux et stratégies d’acteurs engendrés par ces relations nouvelles a donné lieu à un premier travail de recherche exploratoire réalisé au printemps dernier.
Preuve de cet engouement, le ministère de la Culture a publié il y a un mois un document recensant quelques 350 chaînes de vulgarisation scientifique adaptées à un usage éducatif. D’autres acteurs y voient une occasion de « reconquérir » une culture scientifique qu’ils jugent en perdition. Ceux-ci plaident notamment pour l’organisation d’une haute autorité reposant sur un Science Media Centre alimenté par les valeurs de l’éducation populaire.
C’est en 2016 que l’intérêt porté aux youtubeurs de vulgarisation scientifique augmente de façon significative. Le tournant est amorcé par le Musée du Louvre et trois collaborations avec NotaBene, Axolot et Le Fossoyeurs de Films. Par la suite, le Louvre invitera d’autres YouTubeurs, l’objectif de ces vidéos explicatives, ludiques et pédagogiques étant de populariser la chaîne YouTube du musée. Depuis cette date, le nombre d’abonnés de la chaîne ne cesse d’augmenter. Il culmine aujourd’hui à plus de 30 000 abonnés contre 5 580 abonnés début 2016. Le succès de cette relation a été relayé sur les réseaux sociaux et dans la presse.
Les youtubeurs, d’abord présentés comme des vidéastes profanes, sont rapidement devenus des pro-ams : des amateurs travaillant selon des standards professionnels pour produire du contenu audiovisuel sur la plate-forme numérique. Simultanément, on observe à plus petite échelle la naissance de relations diverses entre institutions de CSTI et youtubeurs. Souvent discrètes, ces relations se traduisent par la relecture d’un script par un scientifique, le prêt de matériel, de services, de locaux, ou encore le financement de tout ou partie du projet. Quelques exemples : l’hébergement de la chaîne Balade Mentale par le CCSTI La Rotonde, la vidéo du youtubeur Axolot au CCSTI La Casemate et au Muséum de Grenoble, la chaîne du Projet Lutétium notamment portée PSL Research University et le Conservatoire de Paris, ou encore les nombreuses invitations de youtubeurs dans des conférences et autres tables rondes. Des formats hybrides émergent, institutionnels mais « typés YouTubeur » comme les chaînes de vulgarisation « Zeste de Science » du CNRS, « Des Médias Presque Parfaits #DMPP » par la sémiologue Virginie Spies ou « Happy Hour » produite par le CCSTI Espace des Sciences.
Ces collaborations protéiformes sont devenues un thème de réflexion fréquent chez les acteurs de la médiation scientifique. Des moments d’échange, publics ou non, comme lors du congrès de l’Association des musées et centres pour le développement de la culture scientifique, technique et industrielle (AMCSTI) ou du festival Frames à Avignon, démultiplient les espaces et les formes de rencontre entre les youtubeurs et les institutions. La pertinence et l’avenir de ces pratiques nouvelles et des enjeux qu’elles soulèvent y sont abordés.
Pour être regardé sur YouTube, il faut être original, parler de sujets populaires et respecter certaines normes. La plate-forme a ses propres langages et codes utilisés par les youtubeurs dans leurs vidéos. Ces normes communicationnelles se retrouvent dans les formats utilisés, le montage, les nombreuses références à la « culture Internet » (memes, chansons, jeu vidéo…) et la capacité à raconter (storytelling). Elles se matérialisent également à travers une relation particulière entre les vidéastes et leur public. Le youtubeur doit se montrer sincère et authentique pour gagner la confiance des spectateurs, n’hésitant pas à transmettre sa « vision du monde » et ses propres discours. Ces caractéristiques éloignent les vidéos populaires sur la plate-forme numérique des formats télévisuels. Or, ces derniers tendent à rester la référence pour les institutions de CSTI.
Ce décalage entre le discours institutionnel et le ton des vidéos sur YouTube transparaît dans la façon dont les institutions utilisent le média. Le plus souvent, les chaînes institutionnelles servent de « lieu de stockage » où sont regroupées des vidéos diffusées sur d’autres réseaux sociaux. Ces usages donnent à voir une image de géants sans visage aux institutions de CSTI : pour la plupart, les vidéos institutionnelles manquent de personnalité, l’interlocuteur change à chaque vidéo, le débit de parole semble faible, il y a peu de dialogue avec le public, etc. Des similarités avec les formats télévisuels que l’on peut retrouver par exemple dans les reportages du CNRS, les interviews de l’INSERM ou encore le “journal télévisé” du CCSTI Espace des Sciences.
Si l’on en croit les chiffres d’audiences, ces usages apparaissent moins séduisants pour le public… alors même que YouTube est promulgué, par certains acteurs de la CSTI et non sans effets de croyance, comme nouvel espace d’expression d’une culture scientifique contemporaine et populaire. Or la raison d’être de la plate-forme, reposant sur le modèle publicitaire, est avant tout de maximiser les audiences. Cela produit un second décalage avec les logiques de publicisation instituées de la CSTI. Les algorithmes ne mettent en effet pas en avant les contenus visant à cultiver l’esprit critique et la démarche scientifique mais ceux qui apparaissent déjà comme les plus populaires et les plus pertinents par rapport à chaque historique de consultation. Autrement dit, la qualité de la démarche de vulgarisation entreprise et de sa validité scientifique n’est pas un critère déterminant de popularité sur la plate-forme.
YouTube confère toutefois une attractivité nouvelle à la vulgarisation scientifique. Les contenus intéressent, attirent et plaisent aux spectateurs, même les plus jeunes. En France, des youtubeurs vulgarisateurs parviennent ainsi à rassembler des centaines de milliers d’abonnés (Dirtybiology, C’est une autre histoire, etc) voire dépassent le million pour certains (E-penser, Dr Nozman, etc). Conscientes du potentiel de dialogue avec le public, les institutions de CSTI souhaitent de plus en plus travailler avec ces vidéastes pour renouveler les formes de publicisation de la culture scientifique.
Dans les années à venir, il fait peu de doute que ces collaborations vont se développer tant les discours professionnels montrent qu’institutions et youtubeurs y ont chacun leur intérêt. YouTube apparaît en effet comme un espace réciproque de légitimation et de reconnaissance. Pour les premières, il s’agit de s’appuyer sur la légitimité populaire des seconds pour diversifier leurs publics et renouveler les formes de communication scientifique dans l’espace public. Pour les seconds, il s’agit de s’appuyer sur la légitimité scientifique des premières pour engranger la reconnaissance dont ils estiment manquer pour disposer de plus de ressources. Ces « gains » réciproques s’amenuiseront-ils à mesure que les collaborations deviendront l’une des nouvelles normes de médiation culturelle et scientifique ? La figure désinstitutionnalisée des youtubeurs, appréciée par les institutions, risque de disparaître progressivement à mesure que les vidéastes seront associés à ces mêmes institutions.
Sans postuler que les formes de publicisation de la culture scientifique se réinventent sur YouTube, la médiation et la vulgarisation des sciences opérées sur cette plate-forme numérique révèlent tout de même l’émergence de nouveaux formats de mise en public des savoirs. Dans un contexte de complexification de la CSTI, ces formats interrogent les usages sociaux des sciences et leurs cultures. Ils participent également à la profusion d’actions, d’objectifs et d’acteurs en recherche d’une (re)définition contemporaine de la culture scientifique et de ses objectifs. En tant que dispositif techno-visuel, YouTube ne saurait être la réponse « magique » à ces questionnements.
Mikaël Chambru, Maître de conférences en Sciences de l’information et de la communication, Université Grenoble Alpes
This article is republished from The Conversation under a Creative Commons license. Read the original article.
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POLITICO Magazine a demandé à 16 historiens américains de replacer tout ce qui s’est passé au cours des 12 derniers mois dans son contexte historique en écrivant littéralement le paragraphe que les livres d’histoire de l’avenir comprendront concernant l’année 2018. Un exercice éminemment périlleux. Voici le travail traduit en français de cinq d’entre eux.
Joseph J. Ellis est l’auteur de « American Dialogue: The Founders and Us ».
C’est difficile à croire, mais il y a exactement un siècle, en 2018, les médias américains étaient obsédés par la présidence fracturée et frivole de Donald Trump.
Ce qu’ils auraient pu appeler des » nouvelles ininterrompues « , ce sont les mouvements suivants dans les modèles historiques destinés à façonner notre propre monde : l’ascension de l’empire asiatique, alors appelé Chine ; la crise de confiance dans les trois branches du gouvernement fédéral, qui a conduit à la convocation de la deuxième Convention constitutionnelle et de notre actuelle Confédération américaine ; l’érosion croissante du glacier du Groenland, qui a forcé l’évacuation des villes côtières de notre pays.
Pour toutes ces raisons, 2018 est devenue « l’année de la distraction ».
H. W. Brands enseigne à l’Université du Texas à Austin. Il est l’auteur de « Andrew Jackson and other works of American history ».
Scénario A (Donald Trump n’a pas été élu pour un second mandat) :
L’année 2018 a été pleine de son et de fureur, ce qui signifie, en fin de compte, très peu. Le modèle de leadership grossier de Trump a été rejeté par les électeurs à la première occasion, et ses politiques sur le commerce, la sécurité internationale, l’immigration et l’environnement ont été tôt ou tard annulées.
Scénario B (Trump a été réélu pour un second mandat) :
L’année 2018 a marqué le moment où l’abdication de l’Amérique de son rôle de leader dans le monde, commencée en 2017, est devenue plus prononcée et irréversible. Trump a remis en question ou rejeté catégoriquement les engagements de l’Amérique envers ses alliés, le libre-échange, l’État de droit, les normes démocratiques et un effort mondial pour éviter les conséquences les plus graves du changement climatique. Il a fait de l’Amérique, aux yeux d’une grande partie du reste du monde, un État voyou. Le président des États-Unis a longtemps été la personne la plus conséquente au monde ; cette distinction a été transférée au président de la Chine en 2018. Le monde n’a jamais été le même.
Lizabeth Cohen est professeure émérite à l’Université Harvard et Howard Mumford Jones, professeur d’études américaines au Département d’histoire.
L’année 2018 a été remarquable pour avoir donné à de nombreux Américains une leçon d’histoire vivante. Permettez-moi d’expliquer ce que je veux dire par deux exemples. Pour beaucoup d’entre nous, notre compréhension des profondes divisions qui ont conduit notre pays à la guerre civile dans les années 1860 est fondée sur des explications théoriques des différences irréconciliables du passé : les différends sur le sort de l’esclavage des Afro-Américains ou l’extension de l’esclavage dans les territoires ou le type de futur économique que les États-Unis auraient – un avenir fondé sur la fabrication dicté par le Nord ou une alternative agricole orientée vers le marché souhaitée par le Sud. Soudainement, l’élection de Trump en 2016 et les deux années de sa présidence qui ont suivi, particulièrement l’année dernière, ont poussé bon nombre d’entre nous dans la réalité de vivre dans un pays fortement divisé. Certes, nous savions déjà qu’il y avait des Amériques rouges et bleues et des expériences et des possibilités divergentes en milieu rural et urbain. Mais peu d’entre nous savions à quel point ces abîmes culturels étaient profonds, à quel point ces ressentiments économiques étaient intenses, à quel point ces désaccords politiques étaient graves. Et les nouveaux médias sociaux et traditionnels – de Fox à MSNBC – ont caricaturé puis amplifié ces visions du monde distinctes, créant des chambres d’écho dans lesquelles nos désaccords se font entendre et s’amplifient. Les États-Unis ne sont pas au bord d’une autre guerre civile – il y a encore des valeurs et des engagements qui continuent de nous unir en tant qu’Américains et des institutions comme les tribunaux qui mettent un frein aux matchs criards. Mais certains jours, on a l’impression d’être proches, surtout quand c’est un jour où Trump choisit d’alimenter les divisions entre sa « base » et ses ennemis, immigrants et « vrais » Américains, noirs et blancs.
L’autre exemple que j’aimerais citer est la façon dont les événements récents ont choqué bon nombre d’entre nous en nous rendant compte que nous ne pouvons plus présumer que » ça ne peut pas arriver ici « , que les États-Unis sont en quelque sorte à l’abri du genre de fascisme qui a surgi en Allemagne nazie et a traumatisé le monde au milieu du 20e siècle. Là aussi, il a été facile de se distancier du passé, de la ferveur xénophobe, nationaliste et antisémite qui avait envahi l’Europe, en particulier l’Allemagne. Mais alors que nous avons vécu des événements tels que la marche nationaliste effrayante des Blancs à Charlottesville, les cruelles séparations de familles à la frontière mexicaine, les brutales fusillades dans les synagogues, les meurtres à motivation raciale (y compris par les forces de l’ordre), la répression délibérée des électeurs, les attaques contre une presse libre, et plus encore, il semble soudainement possible que la démocratie américaine soit également sérieusement compromise. Et si cela devait arriver, nous, les Américains, n’aurions personne d’autre à blâmer que nous-mêmes. En 2019, espérons que nous pourrons apprendre, selon les mots d’Abraham Lincoln, à être touchés « par les meilleurs anges de notre nature » et à renouer avec les aspirations américaines de tolérance, de compassion, de moralité et d’égalité devant la loi. Il est courant de dire que connaître l’histoire nous aide à comprendre le présent. Aujourd’hui, le présent peut aussi nous aider à mieux comprendre le passé – et à tenir compte de ses mises en garde.
William P. Jones est professeur d’histoire à l’Université du Minnesota.
2018 a été une année charnière dans l’histoire des travailleurs américains, à la fois dans l’aggravation de l’érosion des revenus, des droits du travail et du pouvoir politique qui dure depuis un demi-siècle et dans la montée de nouvelles formes d’organisation et de mobilisation visant à répondre à ces mêmes tendances. L’année a commencé par des spéculations sur l’impact potentiel de l’affaire Janus c. AFSCME, une affaire de la Cour suprême qui, comme prévu, a porté un coup à la capacité des syndicats de représenter les employés du secteur public. Si l’on ajoute à cela les décisions administratives qui affaiblissent la protection des entrepreneurs indépendants, des travailleurs employés par des franchises et des employés fédéraux et les attaques ouvertes contre les travailleurs immigrants, on constate que les tendances qui remontent aux années 1970 se sont poursuivies au cours de l’année. Paradoxalement, l’année 2018 a aussi été marquée par une recrudescence de l’activisme de la classe ouvrière qui promettait de renverser ces tendances. Le plus dramatique a été la grève de milliers d’enseignants en Virginie occidentale, suivie de manifestations similaires en Oklahoma, Arizona, Kentucky, Caroline du Nord, Géorgie et Colorado. Apparues dans des États conservateurs connus pour leurs bas salaires et la faiblesse des lois du travail, ces actions ont démontré que les revers juridiques ne signifiaient pas nécessairement la fin du travail organisé. Les travailleurs ont également fait preuve d’un militantisme renouvelé dans les endroits où les syndicats étaient forts : grève contre les hôtels Marriott au Massachusetts, au Michigan, en Californie et à Hawaii ; reconnaissance des syndicats d’assistants d’enseignement et de professeurs auxiliaires à Harvard, Columbia et dans d’autres collèges ; et obligation pour Amazon de négocier avec les magasiniers immigrants somaliens au Minnesota. Enfin, les syndicats se sont mobilisés politiquement ; ils ont vaincu Scott Walker, le gouverneur antisyndical du Wisconsin, et aidé à élire un sénateur en faveur du syndicat, Jacky Rosen, au Nevada. Et le militantisme accru n’a pas semblé endommager l’image publique du travail organisé. Fin 2018, un sondage Gallup a révélé que 62 % des Américains approuvaient les syndicats, contre 56 % en 2016 et seulement 48 % en 2009. Après une baisse de 50 ans, le taux de représentation syndicale est demeuré stable et le nombre total de membres syndiqués a augmenté.
Richard Steigmann-Gall est professeur d’histoire à la Kent State University.
Beaucoup d’historiens du fascisme se sont demandés si 2018 verrait un moment d’incendie du Reichstag, quand Trump confondrait une urgence nationale ou profiterait d’une vraie, pour consolider le pouvoir dictatorial. Ce n’est pas ce qui s’est passé. En fait, l’État de droit libéral a continué à fonctionner, avec un résultat électoral remarquable à mi-parcours, ce qui peut être compris de manière fiable comme une réaffirmation du pouvoir parlementaire face à une présidence forte. Cependant, c’était une erreur d’interpréter les échecs de Trump à consolider le pouvoir fasciste pour un manque d’ambition d’être fasciste. Bien que l’Etat de droit libéral fonctionne encore bien, c’est en grande partie malgré Trump, et non grâce à lui. Ses plus proches conseillers de la Maison-Blanche – en particulier Stephen Miller – ainsi que ses compagnons de voyage dans les médias, ont poussé Trump à défier avec mépris l’État de droit chaque fois qu’il le pouvait. Trump n’a montré aucun intérêt pour le consensus qui est à la base d’une véritable démocratie parlementaire, choisissant plutôt à maintes reprises d’imposer sa volonté par fiat jusqu’à ce que les pouvoirs législatif ou judiciaire l’en empêchent. Nous ne pouvions pas décrire le gouvernement américain en 2018 comme « fasciste », mais ceux qui n’ont pas su reconnaître les aspirations fascistes de Trump, ont continué à sous-estimer le danger du trumpisme.
-À lire : What Will History Books Say About 2018? – POLITICO Magazine
Crédit photo : Photo de AbsolutVision sur Unsplash
Depuis quelques mois, le thème de l’assistanat occupe une place considérable dans le débat public. Les propos de plusieurs personnalités politiques tendent à opposer de manière de plus en plus marquée des personnes considérées comme méritantes et les « fainéants », les « assistés ». Ce discours rejoue en réalité un très ancien débat médiéval, celui du « bon pauvre » et du « mauvais pauvre ».
« Dieu aurait pu faire tous les hommes riches, mais il voulut qu’il y ait des pauvres en ce monde, afin que les riches aient une occasion de racheter leurs péchés » (Vie de saint Éloi)
Les années 1980 ont vu la multiplication d’associations visant à venir en aide à des personnes dans le besoin. Pour n’en citer que deux, Emmaüs et les Restos du Cœur ont connu un grand succès, lié à la personnalité de leurs fondateurs. Le pauvre est alors vu comme un malheureux qu’il est bon et nécessaire d’aider.
La tendance s’est aujourd’hui violemment inversée. Plus encore que les discours dénonçant les « assistés », on a pu voir se multiplier dans les villes du mobilier urbain anti-SDF, ces installations ayant pour vocation de rendre inconfortable l’occupation prolongée d’un espace public : boulons et pieux sur les marches et rebords de fenêtres ou remplacement des bancs par des sièges individuels. Et lorsque les pauvres sont des migrants d’origine étrangère, la répression peut prendre des formes plus violentes.
Pourquoi un tel changement ? Peut-être faut-il revenir au XIIIe siècle pour comprendre comment la figure du pauvre peut renvoyer à des imaginaires complètement différents.
-Lire la suite : Du « bon pauvre » au « mauvais pauvre » – Actuel Moyen Âge
Pierre Mounier propose une analyse stimulante des relations complexes entre ces deux disciplines, qui ont fait émerger ce nouveau champ que sont les humanités numériques.
Que sont les humanités numériques ?
D’abord une rencontre, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Celle d’un prêtre jésuite soucieux d’analyser la Somme théologique de Thomas d’Aquin avec les ordinateurs d’IBM. Cette collaboration donnera naissance à ce qu’on appellera plus tard les humanités numériques.
Porteuses de l’histoire des technologies, marquée par le développement des technosciences et du complexe militaro-industriel, les humanités numériques conduisent à s’interroger en retour sur ce qui fait la spécificité des humanités. L’union des technologies numériques et des humanités conduit-elle à remettre en cause ce qui les dinstingue traditionnellement ? Le numérique pousse-t-il, par les méthodes et modèles qu’il permet de développer dans ce champ de recherche, à placer les humanités sous la domination de modèles scientifiques qui leur sont étrangers ?
Quels dangers ces approches comportent-elles, en particulier lorsqu’une part croissante des productions culturelles et des interactions sociales est désormais placée sous l’emprise de sociétés commerciales globalisées qui font un usage massif du numérique ?
Dans cet ouvrage, Pierre Mounier nous livre une histoire critique des humanités numériques et propose de redéfinir à la lumière de ces analyses le contrat moral que les humanités peuvent établir avec la société.
Les Humanités numériques, de Pierre Mounier (Maison des sciences de l’homme, 175 pages, 13,50 euros). ISBN-102-7351-2255-7 ISBN-13 978-2-7351-2255-4 GTIN13 (EAN13) 9782735122554
Source : Les humanités numériques, Une histoire critique (description)
« La critique se fait plus profonde lorsque l’auteur aborde la nature de la science informatique qui cherche à se marier aux humanités. Selon lui, l’informatique n’est qu’un nouvel avatar des technosciences, comme le nucléaire ou les biotechnologies, critiquées depuis les années 1960 pour leur idéologie ou leur accointance avec les complexes militaro-industriels.
Le constat et la conclusion sont clairs : il y a antinomie entre l’informatique et les humanités. La première voulant imposer son modèle technocratique à la seconde. La seule planche de salut est de réveiller la critique contre « l’idéologie numérique » et de retrouver ainsi ce qui fait le sel des humanités, à savoir la promesse d’émancipation. »
Boria Sax, professeur au Mercy College et auteur notamment de Imaginary Animals, the Wondrous et The Human and Animals in the Third Reich : Pets, Scapegoats, and the Holocaust, propose, repris par Nautilus, une explication sur le succès jamais démenti depuis le 19e siècle des Dinosaures dans nos musées et nos imaginaires tant enfantin qu’adulte. On pourrait ajouter le succès rencontré par les dinosaures dans nos classes. Succès d’autant plus étrange qu’ils sont souvent, et à tort, étudié en primaire et intégré au cours d’histoire. Pour Boria Sax, le fait même que nous ne sommes pas des descendants des dinosaures et que nous ne les ayons pas côtoyé facilite que nous considérions leur monde comme un miroir de notre condition humaine. Voici en guise de conte de Noël de ma part, une traduction partielle de cet article.
Les enfants, qui ne font qu’apprendre les attentes fondamentales de leur société, sont à l’extérieur de la culture. Leur attirance pour les dinosaures suggère que les créatures géantes font appel à quelque chose d’inné, ou du moins de très élémentaire, dans la psyché humaine. Une explication hautement spéculative est qu’il s’agit d’un héritage génétique qui remonte à l’époque où les premiers humains faisaient face à des lézards préhistoriques gigantesques comme la mégalanie ou peut-être même à l’époque où nos lointains ancêtres mammifères devaient affronter eux-mêmes les dinosaures. Une explication plus simple est que les images de dinosaures transmettent l’excitation du danger tout en ne représentant aucune menace réelle. Il se peut aussi que les dinosaures, du point de vue de l’enfant, ressemblent à des adultes, puisqu’ils sont à la fois très vieux et très grands.
En inspirant la fantaisie, les dinosaures atténuent le sentiment d’impuissance d’un enfant. Gail Melson l’a décrit de façon frappante :
Un petit garçon timide de 8 ans que je connais se dépêche de rentrer chez lui après l’école chaque jour pour retourner à l’époque où les dinosaures parcouraient la Terre. Une encyclopédie ambulante de l’histoire des dinosaures, il ne se lasse jamais de livrer des batailles entre brontosaure et tyrannosaure, en utilisant ses répliques de 15 cm de haut. Contrairement au pouvoir des adultes ou de leurs pairs plus grands et plus assertifs, le pouvoir des dinosaures est, littéralement, sous son pouce.
Et pourquoi la plupart des enfants abandonnent-ils cette fascination bien avant d’atteindre l’âge adulte ?
Les adultes se sentent souvent presque aussi impuissants que les enfants. Ils trouvent un soulagement dans des activités telles que l’abattage d’extraterrestres dans les jeux vidéo, ainsi que d’autres passe-temps qui sont beaucoup moins inoffensifs, mais rarement dans le jeu avec les dinosaures. Mais peut-être que les adultes ne se remettent pas vraiment de la phase dinosaure ? Il se peut qu’ils le revivent simplement par procuration à travers les enfants. Nous avons toujours considéré les dinosaures comme tragiques, car (à l’exception, nous le savons maintenant, des oiseaux) ils ont disparu, alors qu’ils étaient autrefois extrêmement grands et puissants. Cela correspond à la combinaison de la capacité de domination et de l’extrême vulnérabilité, qui sont deux aspects essentiels de notre façon de penser l’humanité.
En tout cas, ce petit garçon est très loin d’être seul. Au Musée américain d’histoire naturelle de New York, que je visite régulièrement, il y a une boutique dont presque un étage entier, un tiers de l’espace, est consacré à l’attirail des dinosaures, et la plupart des objets qui s’y trouvent n’ont qu’un lien très oblique avec la science. Il ya des étagères sur des étagères de peluches jouets dinosaures, dont beaucoup sont énormes. Il y a beaucoup de livres d’images sur les dinosaures, pour les enfants qui apprennent à lire, les dinosaures mécaniques, et d’innombrables accessoires portant des images de dinosaures.
[…]
Nous ne sommes pas des descendants des dinosaures, et nos ancêtres n’ont pas eu d’interaction avec eux, en dehors des bandes dessinées et des films de série B. Mais, précisément pour ces raisons, il est plus facile de considérer leur monde comme un miroir de la condition humaine.
Le fait que les dinosaures aient disparu a fait résonner leur histoire avec les traditions apocalyptiques des religions zoroastrienne, judaïque, chrétienne et islamique. Leur taille et leur puissance suggèrent des empires et des batailles à une échelle épique, peut-être même une sorte d’Armageddon. Même la vue actuelle que certains dinosaures ont survécu pour devenir des oiseaux suggère une sorte d’élu angélique qui sera sauvé. Mais nos peurs apocalyptiques ont été sécularisées, et la signification des dinosaures a changé avec elles. À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, les dinosaures étaient souvent utilisés pour représenter les grandes entreprises, bien que leur disparition éventuelle puisse ressembler à une révolution prolétarienne. Plus tard, leurs associations apocalyptiques ont pu être utilisées pour exprimer la terreur d’un holocauste nucléaire ou d’un effondrement écologique. En plus de l’attrait élémentaire de la grande taille et de l’antiquité, la raison de la popularité des dinosaures est que leur symbolisme est assez flexible pour accommoder une vaste gamme de significations. Ils ont été utilisés pour commenter la violence humaine, l’innocence, la richesse, l’industrialisation, l’échec, la modernité, la tragédie, l’extinction et bien plus encore.
Mais rien de tout cela n’a vraiment à voir avec les dinosaures à la fin. Nous imposons simplement nos propres significations à leurs vies infiniment mystérieuses. Je ne prêcherai pas contre cela, car exploiter d’autres créatures comme symboles est simplement ce que font les êtres humains, et je ne suis pas plus exempté que quiconque. Mais, lorsque nous parlons de dinosaures essentiellement en tant qu’artefacts culturels, nous devrions nous rappeler, de temps à autre, qu’ils étaient autrefois, et qu’ils le sont toujours, beaucoup plus.
Source et article original : What We Read Into Dinosaurs
Crédit image : Pixabay. CC0 Creative Commons. Libre pour usage commercial. Pas d’attribution requise
Je vous laisse prendre connaissance de l’appel à communication pour le 6e numéro Didactica Historica, Revue suisse pour l’enseignement de l’histoire. N’hésitez pas à le diffuser dans vos réseaux, également auprès des enseignant.e.s d’histoire susceptibles de proposer un texte pour la rubrique « pratiques enseignantes » qui publie des récits d’expérience.
DIDACTICA HISTORICA est composée de cinq rubriques pour lesquelles il est possible de soumettre une proposition :
La rubrique « dossier » du numéro 6/2020 de DIDACTICA HISTORICA est consacrée au thème de l’Altérité et aux expériences et aux processus d’inclusion et d’exclusion.
Le terme « Altérité » définit la reconnaissance de l’Autre, et par là-même de Soi. Toutefois, cette reconnaissance peut déterminer la construction de stéréotypes positifs ou négatifs, ainsi que l’instauration de rapports de force, de pouvoir, de genre, de race, de classe… qui peuvent conduire à une banalisation, voire à une normalisation des discriminations.
Comment, au fil des différentes époques historiques, l’Autre a-t-il été perçu ? Comment les catégories « étranger » et « autre » ont-elles été construites dans diverses sociétés ? Quels sont les mécanismes d’inclusion et d’exclusion que l’on peut observer ? Que signifie pour une société de se définir en fonction d’appartenances et pour des individus d’être privés de droits politiques ou exclus de la participation à la vie en société en fonction de la couleur de la peau, de la religion, du sexe ou de l’orientation sexuelle, de la catégorie sociale, d’une appartenance ethnique ou d’une autre nationalité ? Par qui, par quels moyens et avec quels arguments, les droits des « autres » ont-ils été défendus à différentes périodes de l’histoire ?
Les processus et les expériences d’altérité, de stéréotypes et de discrimination, dans leur mise en récit et dans leur traitement par l’enseignement de l’histoire, constituent l’objet de ce dossier. Peuvent être soumises des propositions offrant des perspectives historiques, ainsi que des contributions didactiques qui réfléchissent aux enjeux de l’étude des mécanismes historiques d’inclusion et d’exclusion pour le présent des élèves.
Pour les articles qui s’inscrivent explicitement dans la recherche en didactique de l’histoire, il est possible de proposer, en plus de la version courte, une version longue (32’000 signes) expertisée en double aveugle par le Comité international de lecture de DIDACTICA HISTORICA – en fonction de la grille de critères annexée – et mise en ligne sur le site de l’éditeur. Une version courte « papier », expertisée par le comité de rédaction, est cependant obligatoire pour accéder à l’édition en ligne de la version longue expertisée en peer review. Les deux textes (article court et article long) doivent avoir un titre différent.
Nombre de signes pour les versions courtes (espaces compris) : maximum 16’000 signes + résumés, biographie et mots-clés + deux ressources iconographiques (image, tableau, schéma, graphique, …) libres de droits et de qualité suffisante (>300 dpi).
Nombre de signes pour les versions longues (espaces compris) : maximum 32’000 signes + résumés, biographie et mots-clés + deux ressources iconographiques (image, tableau, schéma, graphique, …) libres de droits et de qualité suffisante (>300 dpi).
La rubrique « didactique de l’histoire » publie des articles scientifiques issus de la recherche en didactique de l’histoire ou de disciplines associées.
Dans cette rubrique, il est possible de proposer, en plus de la version courte (16’000 signes), une version longue (32’000 signes) expertisée en double aveugle par le Comité international de lecture de DIDACTICA HISTORICA – en fonction de la grille de critères annexée – et mise en ligne sur le site de l’éditeur. Une version courte « papier », expertisée par le comité de rédaction, est cependant obligatoire pour accéder à l’édition en ligne de la version longue expertisée enpeer review. Les deux textes (article court et article long) doivent avoir un titre différent.
Nombre de signes pour les versions courtes (espaces compris) : maximum 16’000 signes + résumés, biographie et mots-clés + deux ressources iconographiques (image, tableau, schéma, graphique, …) libres de droits et de qualité suffisante (>300 dpi).
Nombre de signes pour les versions longues (espaces compris) : maximum 32’000 signes + résumés, biographie et mots-clés + deux ressources iconographiques (image, tableau, schéma, graphique, …) libres de droits et de qualité suffisante (>300 dpi).
La rubrique « pratiques enseignantes » publie des récits d’expériences, avec des séquences didactiques ou des projets pédagogiques réalisés par des enseignant.e.s. De tels récits d’expérience n’exigent pas une écriture scientifique. Ils sont un reflet de la pratique, de ses expériences quotidiennes ou annuelles, de ses enjeux, de ses réussites et de ses difficultés.
Nombre de signes (espaces compris) : maximum 16’000 signes + résumés, biographie et mots-clés + deux ressources iconographiques (image, tableau, schéma, graphique, …) libres de droits et de qualité suffisante (>300 dpi). Des documents en annexe peuvent être mis en ligne sur le site de l’éditeur.
La rubrique « ressources pour l’enseignement » présente des documents, des outils, des lieux, des ressources, etc. qui constituent autant de moyens intéressants et inspirants pour l’enseignement.
Nombre de signes (espaces compris) : maximum 16’000 signes + résumés, biographie et mots-clés + deux ressources iconographiques (image, tableau, schéma, graphique, …) libres de droits et de qualité suffisante (>300 dpi). Des documents en annexe peuvent être mis en ligne sur le site de l’éditeur.
La rubrique «comptes-rendus» présente quelques parutions récentes qui traitent de l’histoire et de son enseignement.
Nombre de signes (espaces compris) : 4’500 à 6’000 + image de couverture de l’ouvrage de qualité suffisante (>300 dpi).
Les propositions d’article doivent être envoyées au format suivant :
Date limite pour soumettre une proposition d’article : 1er mars 2019
Date limite de réponse du comité de rédaction : 15 mars 2019
Date limite de remise des articles : 15 juin 2019
Pour les demandes de renseignement, les propositions d’article et les articles définitifs, voir l’appel à contribution sur le site de la revue : https://www.alphil.com/pdf/appelpublicationn62020.pdf
Merci de nous retourner votre article dans les délais, en ayant soin de respecter les consignes rédactionnelles fournies en annexe par notre éditeur Alphil – Presses universitaires suisses, Neuchâtel.
Nadine Fink, HEP Vaud, directrice de rédaction ; Prisca Lehmann, Gymnase d’Yverdon-les-Bains, co-directrice de rédaction ; Pierre-Philippe Bugnard, émérite de l’Université de Fribourg ; Nicolas Guillaume-Gentil, HEP BEJUNE Neuchâtel ; Nathalie Masungi, HEP Vaud ; Michel Nicod, ES Marens Nyon ; Nadine Ritzer, PH Bern (co-responsable des articles germanophones) ; Béatrice Rogéré Pignolet, HEP Vaud ; Béatrice Ziegler, PH FHNW, Aarau (responsable des articles germanophones).
Le public ne dispose pas des outils nécessaires pour tenir les algorithmes responsables.
Les gouvernements et les entreprises privées déploient des systèmes d’IA à un rythme rapide, mais le public n’a pas les outils nécessaires pour tenir ces systèmes responsables lorsqu’ils échouent. C’est l’une des principales conclusions d’un nouveau rapport publié par AI Now, un groupe de recherche regroupant des employés d’entreprises technologiques comme Microsoft et Google et affilié à l’Université de New York.
Le rapport examine les défis sociaux de l’intelligence artificielle et des systèmes algorithmiques, en se concentrant sur ce que les chercheurs appellent » l’écart de responsabilité « , car cette technologie est intégrée » à travers les principaux domaines sociaux « . Ils ont formulé dix recommandations, dont une demande de réglementation gouvernementale de la reconnaissance faciale (ce que le président de Microsoft, Brad Smith, a également préconisé cette semaine) et des lois sur la » vérité dans la publicité » pour les produits d’IA, afin que les entreprises ne puissent pas simplement faire du commerce sur la réputation de la technologie pour vendre leurs services.
Le rapport est clair : le danger pour la justice civique est particulièrement évident lorsqu’il s’agit de l’adoption de systèmes de décision automatisés (SDA) par le gouvernement. Il s’agit notamment des algorithmes utilisés pour le calcul des peines d’emprisonnement et l’attribution de l’aide médicale. Selon les auteurs du rapport, les logiciels sont généralement introduits dans ces domaines dans le but de réduire les coûts et d’accroître l’efficacité. Mais il s’ensuit souvent que les systèmes prennent des décisions qui ne peuvent être expliquées ou faire l’objet d’un appel.
Whittaker, du Google’s Open Research Group, et Kate Crawford, co-fondatrice d’AI Now et chercheuse chez Microsoft, affirment que l’intégration de l’ADS dans les services gouvernementaux a dépassé notre capacité à vérifier ces systèmes. Mais, disent-ils, des mesures concrètes peuvent être prises pour y remédier. Il s’agit notamment d’exiger que les fournisseurs de technologie qui vendent des services au gouvernement renoncent à la protection du secret commercial, ce qui permet aux chercheurs de mieux examiner leurs algorithmes.
« Il faut être capable de dire : » Vous avez été coupé de Medicaid, voilà pourquoi « , et vous ne pouvez pas le faire avec des systèmes de boîte noire « , dit M. Crawford. « Si nous voulons rendre des comptes au public, nous devons pouvoir vérifier cette technologie. »
Un autre domaine où une action immédiate est nécessaire, disent les deux chercheurs, est l’utilisation de la reconnaissance faciale et la reconnaissance des affects. Le premier est de plus en plus utilisé par les forces de police, en Chine, aux États-Unis et en Europe. Le logiciel Rekognition d’Amazon, par exemple, a été déployé par la police à Orlando et dans le comté de Washington, même si des tests ont montré que le logiciel peut fonctionner différemment selon les races. Dans un test où Rekognition a été utilisé pour identifier les membres du Congrès, le taux d’erreur était de 39 % pour les membres non blancs, contre seulement 5 % pour les membres blancs. Et pour ce qui est de la reconnaissance des affects, où les entreprises prétendent que la technologie peut balayer le visage de quelqu’un et lire son caractère et même son intention, les auteurs d’AI Now disent que les entreprises vendent souvent de la pseudoscience.
Traduit de :When algorithms go wrong we need more power to fight back, say AI researchers | The Verge
Thierry Karsenti vient de publier un document proposant 20 pistes pédagogiques pour un usage réfléchi du numérique. J’ai déjà eu l’occasion d’explorer plusieurs de ces pistes dans le cadre de la formation de mes étudiants du secondaire 1. D’autres l’ont également été dans le cadre de ce semestre et l’approche didactique de la démarche d’enquête en histoire. Néanmoins, ce document servira de document d’orientation pour le semestre de printemps 2019. Il correspond largement à ma conception de l’ensegnement de la discipline.
Par Thierry KARSENTI, M.A., M.Ed., Ph.D. Titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les technologies en éducation, Université de Montréal.
« Dans un monde où la place du numérique s’affirme chaque jour davantage, et où les jeunes sont captivés par les technologies, les enseignants d’histoire ne semblent avoir d’autre option que de donner une place de choix au numérique dans le cadre de leur enseignement. Nous proposons ici 20 pistes pédagogiques pour l’enseignement de l’histoire avec le numérique. Il ne s’agit pas de faire usage du numérique à tout prix. Il s’agit plutôt de trouver un juste équilibre entre le maintien de certains aspects traditionnels qui ont fait la richesse de l’enseignement depuis des siècles et la mise à profit des nouvelles possibilités qu’offre le numérique pour l’enseignement de l’histoire. Pour ce faire, il ne faut pas se limiter à la seule vision utilitaire du numérique, mais bien cerner les transformations éducatives qu’il pourrait alimenter. En fait, le numérique, s’il est bien utilisé, peut aussi œuvrer pour mieux tous nous comprendre et nous respecter, entre humains. »
Les 20 propositions :
Le document au format .pdf : http://www.karsenti.ca/20numeriquehistoire.pdf
Source : 20 Pistes pédagogiques pour un usage réfléchi du numérique dans les cours d’histoire