Décès du documentariste Marcel Ophüls à 97 ans. Le maître français du documentaire historique est mort samedi dans sa maison du sud-ouest de la France, a-t-on appris lundi auprès de sa famille. Fils du grand cinéaste allemand Max Ophüls (“ La Ronde”, “Lola Montès”…), Marcel Ophüls avait fui l’Allemagne nazie enfant pour s’installer en France, avant de devoir fuir à nouveau vers les États-Unis en 1941. En 1969, son documentaire “Le Chagrin et la pitié” qui explore les réalités de la Collaboration et de la Résistance, bouleverse la représentation que les Français se faisaient de leur propre histoire, en rompant avec le mythe d’une France unanimement résistante face aux Allemands. Il remporte un succès international et sera nommé pour l’Oscar du meilleur documentaire. Ophüls “n’a cessé de revenir sur les conflits” dans son travail, remarque le Guardian qui cite notamment A Sense of Loss, sur les Troubles en Irlande du Nord ou The Troubles We’ve Seen, sur le journalisme de guerre, tourné à Sarajevo pendant le siège. Selon le quotidien britannique, le documentariste travaillait depuis plusieurs années sur un documentaire consacré à l’occupation des territoires palestiniens par Israël, intitulé provisoirement Unpleasant Truths (Des vérités qui dérangent).
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Passion Médiévistes : Hors-série 34 – Le Moyen Âge au cinéma
À l’occasion de l’édition 2025 du Festival international du film court d’Angoulême, deux invités sont venus croiser, dans cet épisode hors-série de Passion Médiévistes, leurs expériences sur les représentation du Moyen Âge au cinéma.

Affiche du film Les chevaliers teutoniques (1960), film qui se distingue pour Yohan Chanoir, par la richesse de ses détails
Les invités :
- François Prodromidrès, réalisateur de Dernières nouvelles du monde (2017), fiction projetée avant l’enregistrement en public du podcast
- Yohann Chanoir, historien, chargé de cours à Sciences Po et chercheur associé au CRH (EHESS), auteur d’une thèse soutenue en 2020 sur Les châteaux médiévaux au cinéma entre imaginaire et historicité, des lendemains de Hastings à la Diète de Worms.
Cet épisode vient proposer les regards complémentaires d’un réalisateur et d’un historien pour interroger la manière dont le cinéma façonne notre perception du Moyen Âge, entre fidélité historique, choix esthétiques et imaginaires collectifs.
Tous les enseignant·e·s d’histoire recourant à des films lorsqu’iels abordent le moyen-âge en classe devraient écouter ce podcats sur l’imaginaire du moyen-âge que nous projettons de diverses manières dont le cinéma ou les séries tv.
Deux exemples pour illustrer cet imaginaire :
Le château :
«Dans tous les films sur le moyen-âge sauf un, celui de François [Prodromidrès], on voit le château de loin. […] Dans mon livre, il y a 450 [films]. On voit le chevalier qui arrive, le château est de loin.» Yohan Chanoir
Les armures :
«Les équipes de cinéma vont dans le musées où il y a plein de choses du XIV-XVe. comme par exemple des armures, de très belles armures. La plupart des armures conservées sont des armures d’apparat. Ca veut dire que d’emblée vous avez une image fausse du moyen-âge. C’est un effet de sources en quelque sorte.» Yohan Chanoir
Au final, pour Yohan Chanoir, chaque tentative cinématographique qui tente d’offrir une représentation plus nuancée et historiquement fondée du Moyen Âge se heurte à un écueil : l’échec commercial. Le public est formaté à une certaine imagerie médiévale et s’éloigner de ces codes visuels traditionnels revient presque à aller à contre-courant des attentes.
▪ Informations sur le podcast. Créé et produit par Fanny Cohen Moreau depuis 2017. Préparation, enregistrement, montage et mixage : Fanny Cohen Moreau. Générique : Clément Nouguier
Plus d’infos sur cet épisode > passionmedievistes.fr/hs-34-cinema-moyen-age
Notice relativement à la thèse de Yohann Chanoir : Châteaux médiévaux au cinéma : entre imaginaire et historicité. Des lendemains d’Hastings à la Diète de Worm. Thèse soutenue le 11 décembre 2020
Trous de mémoires de Nicolas Juncker
Comment raconter la guerre d’Algérie et ses mémoires sans tomber dans le pathos ou la leçon d’histoire trop académique ? Trous de mémoires relève ce défi avec audace, mêlant comédie burlesque et réflexion historique. Nicolas Juncker y explore, avec un humour grinçant, les tensions et contradictions qui entourent la mémoire de ce conflit, en s’inspirant du projet avorté du Musée de la France et de l’Algérie initié par Georges Frêche à Montpellier. À travers une galerie de personnages hauts en couleur, il interroge notre rapport à l’histoire et à sa transmission ainsi qu’à son appropriation par certains.
Pour une présentation de l’album : Trous de mémoire | La Cliothèque
Pour sa part, Yannick Mével dans les Cahiers pédagogiques (Trous de mémoires et histoire trouée), se propose de répondre à la question suivante relativement à son utilisation en classe d’histoire :
L’occasion, peut-être, d’en faire un objet d’étude pour les élèves et les étudiants en histoire ?
Dans un premier temps, il propose d’y recourir à partir d’une approche déductive où préalablement à l’analyse de la bande dessiné consistant «à retrouver dans l’album des éléments qui correspondent aux définitions de l’histoire et des mémoires dans leur pluralité».
Cependant, il y voit un risque que l’opposition histoire-mémoire ne rende pas totalement compte de la complexité des relations entre les deux.
Il propose alors la démarche inverse :
Faire des définitions l’aboutissement d’une analyse des situations dans l’album serait sans doute préférable. Il faudrait alors concevoir toute la séquence comme une enquête autour des « trous de mémoires » que l’on pourrait concevoir comme une recherche des « bonnes raisons d’agir » des différents personnages (individus et collectifs) et dans laquelle la recherche de définition des concepts serait un fil directeur.
Relativement à la notion d’enquête, il s’appuie sur le travail réalisé par Sylvain Doussot (Sylvain Doussot, Didactique de l’histoire. Outils et pratiques de l’enquête historienne en classe, Presses universitaires de Rennes, 2011).
Référence de la bande dessinée : Trous de mémoires. Nicolas Juncker (scénario et dessin). Juliette Laude (couleurs). Tramor Quemeneur (Dossier historique). Le Lombard. 156 pages.
Ces familles néerlandaises qui découvrent un passé de collaboration – rts.ch
C’est avec stupeur que de nombreux Néerlandais et Néerlandaises ont récemment découvert sur internet qu’un membre de leur famille avait collaboré avec les nazis durant la Seconde Guerre mondiale. En cause: la mise en ligne d’une liste de 425’000 noms par les archives nationales des Pays-Bas. Depuis janvier, les descendants affluent à La Haye, souvent bouleversés, pour consulter les dossiers d’enquête ouverts après la Libération en mai 1945.

« C’est une très bonne chose que tout cela soit rendu public », affirme Stephanie Biesheuvel, 43 ans, qui a écrit un livre sur le passé collaborationniste de sa famille. Elle déplore une mémoire souvent réduite aux seuls récits de la résistance. Avec l’expiration fin 2024 d’une loi restreignant l’accès aux 30 millions de pages d’archives, les autorités ont décidé de rendre progressivement ces documents disponibles en ligne d’ici 2027. Un moteur de recherche permet déjà d’identifier les personnes, désormais décédées, qui ont notamment été soupçonnées de trahison. Mais les dossiers restent consultables uniquement sur place, leur publication intégrale ayant été suspendue par l’Autorité néerlandaise de protection des données.
Lire la suite : Ces familles néerlandaises qui découvrent un passé de collaboration – rts.ch – Monde
Spreitenbach: Un paradis du shopping ou la porte des enfers? – Blog du Musée national suisse
En 1975, l’Association suisse des instituteurs publia le panneau scolaire n°167. Celui-ci montre une vue aérienne de la commune de Spreitenbach, dans la vallée de la Limmat. Ou plus précisément de la ville nouvelle de Spreitenbach, «Neu-Spreitenbach», avec son centre commercial entouré d’un immense parking rempli de voitures aux couleurs vives et son imposant quartier de tours d’habitation à l’arrière-plan. Tout ce qui figure sur ce panneau scolaire était l’aboutissement de 20 années d’un développement tumultueux. Ce centre commercial, ces tours d’habitation et ces larges routes incarnaient le progrès. À nul autre endroit en Suisse alémanique ce progrès ne s’était implanté dans le paysage aussi rapidement et méthodiquement qu’à Spreitenbach. Cet ancien village agricole constitue le modèle urbain du boom des décennies d’après-guerre. Cette période s’était brusquement terminée en 1975 sous l’effet de la crise pétrolière et du marasme économique qui s’en était suivi. Au même moment, l’Année européenne du patrimoine architectural proclamée par le Conseil de l’Europe était célébrée en grande pompe. L’occasion de prendre du recul par rapport à la vision euphorique de l’avenir qui était jusque-là de mise et qui ne laissait aucune place à la critique. Neu-Spreitenbach avait donc été retenu pour illustrer le «faux progrès» dans ce panneau scolaire. Comment se fait-il que la commune de Spreitenbach, aux portes de Zurich, avait été choisie pour accueillir le premier grand centre commercial de Suisse, et quel est le rapport entre celui-ci et le développement urbain?

Lire l’article : Spreitenbach: Un paradis du shopping ou la porte des enfers? – Musée national – Blog sur l’histoire suisse
Il est possible de prolonger la réflexion autour de ces questions jusqu’au 21 avril 2025 en visitant l’exposition temporaire « Les univers de consommation. Le quotidien sous la loupe » du Musée national suisse à Zürich. Le texte de présentation de l’exposition :
Au marché, dans un grand magasin ou en ligne : nos lieux et habitudes d’achat ont fortement changé au cours des 170 dernières années. Qui plus est, la consommation est elle aussi en constante évolution. Le fait de disposer de plus d’argent et de loisirs influence nos possibilités, nos besoins et nos souhaits, tant au niveau individuel que collectif. Des photographies et des œuvres graphiques en tous genres, allant de l’affiche au cabas de courses, témoignent de ces changements. Puisant dans les fonds de la collection du Musée national suisse, l’exposition révèle un univers visuel riche et varié au cœur de notre quotidien. Elle nous emmène du kiosque bariolé au centre commercial à même de satisfaire tous les besoins, et d’une joyeuse bande d’habitués au bistrot à une projection de diapositives à la maison qui nous invite à nous replonger dans nos souvenirs de vacances d’été.
Dans le Japon de la fin du XVIe siècle : «Assassin’s Creed Shadows» sort enfin.
La série vidéoludique des «Assassin’s Creed» d’Ubisoft comprend désormais un nouvel opus, situé dans le Japon de la fin du XVIe siècle. Les enjeux financiers de cette sortie sont importants pour la société Ubisoft en grande difficulté actuellement. Elle y jouerait son avenir.
«Assassin’s Creed Shadows» est d’autant plus attendu que sa sortie a été repoussée à plusieurs reprises. Il est doublement condamné au succès. En premier lieu en raison de son coût estimé entre 259 et 300 millions de dollars. Plusieurs dizaine de millions d’exemplaires devront ainsi être vendus pour le rentabiliser. En second lieu, Ubisoft est dans la tempête, car les résultats des dernières sorties de jeu vidéo ont déçu provoquant la chute du cours de la société en bourse. Par ailleurs, Ubisoft est toujours confrontée à des scandales de harcèlement au travail de 2020.
Depuis le succès surprise de son premier épisode en 2007, qui a grandement participé à façonner le géant français Ubisoft en major mondiale, Assassin’s Creed s’est transformé en hyperfranchise, comptant plus d’une douzaine d’épisodes majeurs et autant de déclinaisons plus modestes, avant d’être transposé en film hollywoodien, en anime et en manga.
Par ailleurs, comme pour son volet situé durant la Révolution française, il suscite déjà des réactions et critiques au Japon, reprises par… Elon Musk dans sa croisade contre la diversité, l’équité et l’inclusion.
L’intrigue et le gameplay
Japon, 1581 : La province d’Iga brûle autour de vous. Vous assistez, blessé et impuissant, au sourire narquois d’Oda Nobunaga, le seigneur de guerre responsable de nombreuses guerres civiles et de l’unification du pays, du haut d’une colline voisine. Vous dégainez votre katana, dont la lame brille dans la lumière vacillante des flammes. Voici « Assassin’s Creed : Shadows » – à la fois jeu de ninja passionnant et leçon d’histoire. C’est une combinaison étrange, mais elle s’intègre dans une aventure de fiction historique tentaculaire, pleine de découvertes et de tromperies.
Le jeu convoque un archipel déchiré entre de vieux réflexes claniques et le désir d’unification à marche forcée porté par Oda Nobunaga.
Le jeu répond aux attentes des fans de la série qui attendent depuis toujours d’accéder aux figures mythifiées (par le cinéma, la bande dessinée et le jeu vidéo) du samouraï et du ninja.
Ces fans trouveront d’un côté, Naoe, une shinobi —visage des campagnes et du monde d’avant— motivée par le désir de venger le massacre de son village écrasé par le shogunat (un gouvernement militaire). De l’autre, Yasuke, colosse noir adopté par l’oppresseur Nobunaga qui en fait un loyal samouraï.
Le gameplay lui-même intègre cette dualité entre traditionnalisme et modernité. Ainsi, héritière du gameplay traditionnel de la série, Naoe déploie un jeu tout en verticalité caractéristique du jeu alors que Yasuke, lui, n’est que pure horizontalité, capable de venir à bout d’une garnison, mais qui se hisse avec le plus grand mal sur la moindre corniche.
Globalement, le gameplay est considéré comme renouvelé jouant même avec les habitudes précédemment acquises par les joueurs. Il surprend même les joueurs et ainsi les séduit (Silence on joue ! Spécial «Assassin’s Creed Shadows» | Libération).
La réception du jeu
Dans The Guardian, Keza MacDonald souligne la singularité et l’intérêt de deux personnages au profil différent :
« Deux protagonistes, deux styles de jeu : Naoe est rapide et silencieuse, et fait de la furtivité un moyen viable et agréable de découvrir le jeu pour la première fois depuis longtemps. Yasuke est fort et habile, et peut trancher les ennemis lorsqu’une situation explose soudainement en conflit. Cela ajoute de la variété et du choix au gameplay. Les deux personnages sont vraiment intéressants et leurs histoires m’intéressent.»
Comme pour les précédents opus, l’univers historique reconstitué sert surtout décor à un jeu d’action où l’on décapite des ennemis :
Like all the previous Assassin’s Creed titles before it, Shadows uses authentic locations and historical figures to seat the game’s time-hopping narrative. Takeda, Fukuchiyama and Himeji castles are all replicated along with the villages, ports and rural landscapes of Central Japan. But as ever, this is first and foremost a game about sneaking over rooftops and skilfully taking down enemies. […] While Ubisoft has put immense effort into capturing the Azuchi-Momoyama period and the nature of the Iga peasant class (the possible origin of the modern ninja archetype), what matters equally is how good it feels to leap off a rooftop and decapitate a passing enemy.
‘It’s been a challenge’: Assassin’s Creed Shadows and the quest to bring feudal Japan to life | The Guardian
Cet univers historique reflète autant nos représentations culturelles modernes de l’époque et de ses guerriers que de l’histoire. Son producteur Jonathan Dumont ne s’en cache d’ailleurs nullement
«Japanese storytelling has been very influential to the development of the game and to all occidental arts in general,” says Dumont. “Kagemusha from Kurosawa, 13 Assassins, Zatoichi, Sekigahara, The Tale of Genji or Musashi from Eiji Yoshikawa, to name the more obvious, have [all] helped shape our vision for the game.»
‘It’s been a challenge’: Assassin’s Creed Shadows and the quest to bring feudal Japan to life | The Guardian
Le décor est loué par la presse anglo-saxone telle Daniella Lucas, dans le Guardian. Elle insiste sur les soins déployés par les développeurs “pour donner une impression d’authenticité au décor, tant dans les paysages que chez les personnes qui les peuplent”.
Début d’une polémique au Japon… reprise par Elon Musk
Le nouvel opus de la saga ultrapopulaire du développeur français Ubisoft crée cependant la controverse, au point d’être discuté jusque dans l’enceinte du Parlement japonais. Outre les scènes violentes se déroulant dans un sanctuaire shintoïste, Courrier international nous apprend que la présence d’un samouraï noir, pourtant historiquement reconnue, est jugée irrespectueuse pour la culture.
Principal mobile de la polémique, une scène où le joueur, incarnant Yasuke, peut détruire des objets spirituels dans un sanctuaire shintoïste, et s’attaquer au prêtre avec un sabre et des flèches. Fait aggravant, le temple en question existe réellement : il s’agit du sanctuaire Itate Hyozu Jinja, dans la préfecture de Hyogo, dans le centre du Japon, dont le nom n’a pas été modifié, et qui forge la légende de l’unique “samouraï noir”.
L’homme d’affaires Elon Musk s’est lui-même engouffré dans la brèche : réagissant à une publication à propos du jeu sur le réseau social X, le milliardaire a déploré le fait qu’Ubisoft ait “injecté de la DEI” (pour “diversité, équité et inclusion”) dans son dernier opus.
Revue de presse
- Avec «Assassin’s Creed Shadows», Ubisoft espère se remettre sur de bons samouraïs | Libération
- “Assassin’s Creed Shadows” réussit son immersion dans le Japon féodal | Courrier international
- Assassin’s Creed: Shadows – a historic frolic through feudal Japan | The Guardian
- ‘It’s been a challenge’: Assassin’s Creed Shadows and the quest to bring feudal Japan to life | The Guardian
- Back to the feudal: Assassin’s Creed Shadows is the most beautiful game I’ve ever seen | The Guardian
- Avec son samouraï noir, “Assassin’s Creed Shadows” fait polémique au Japon | Courrier international
- Silence on joue ! Spécial «Assassin’s Creed Shadows» | Libération
Max Weber. Une vie mouvementée dans une époque agitée – Blog Musée national suisse
Cet article du Blog du Musée national suisse nous offre un portrait de Max Weber, socialiste suisse, pacifiste puis défenseur de la défense nationale devant la montée des fascismes, brillant économiste qui fut également Conseiller fédéral. Un destin intéressant et singulier que je vous invite à lire.
« J’ai été et je reste aujourd’hui encore un adepte convaincu du pacifisme mais ce serait un aveuglement de nier que les conditions sont aujourd’hui radicalement différentes.» Max Weber, procès-verbal du congrès syndical de 1936
Plus on s’intéresse à Max Weber et à son époque, plus la question de savoir si ce sont les temps qui nous changent ou nous qui les changeons perd de sa netteté. Si Weber est façonné par les circonstances, il contribue aussi à les façonner. L’évolution la plus significative pour laquelle il se soit engagé est sans conteste l’évolution du socialisme de l’entre-deux-guerres marqué par le dogme de la lutte des classes vers le pragmatisme du partenariat social coopératif de l’après-guerre. Indépendamment de sa démission prématurée du Conseil fédéral, Max Weber a contribué de façon significative à l’intégration de la social-démocratie dans le partage proportionnel du pouvoir au sein du gouvernement suisse. Le modèle encore actuel de concordance basée sur une proportionnalité tacite fut en effet élaboré en 1959.
Autant le libéralisme économique à l’état pur n’a jamais existé, autant l’économie planifiée (le marxisme) comme principe absolu n’a aucun avenir. Max Weber, Gewerkschaftliche Rundschau, 1934
Justice sociale, formation et culture, non-violence et pacifisme. Max Weber est prêt à payer cher pour ses convictions. Il est emprisonné. Il démissionne de son poste de chef syndicaliste du pays. Il en fait de même au Conseil fédéral. Lorsqu’il voit sa liberté d’action menacée par un régime injuste, il est prêt à renier son pacifisme acharné et prend les armes pour se défendre, défendre ses concitoyens et rétablir son idéal – mais seulement jusqu’au retour des conditions permettant de donner à cet idéal la place qu’il mérite.
La biographie de Max Weber nous confronte à des questions existentielles fondamentales. Les événements historiques ayant marqué sa vie de 1897 à 1974 éclairent les origines de notre société.
Lire ce singulier parcours : Max Weber. Une vie mouvementée dans une époque agitée – Musée national – Blog sur l’histoire suisse
La conjuration de l’hôtel d’Erlach – Blog Musée national suisse
Après avoir débuté en France, la révolution de juillet 1830 s’étendit très vite à une grande partie de l’Europe. Les peuples se révoltèrent contre le retour au pouvoir de la noblesse et insufflèrent un nouvel élan aux libéraux dans leur lutte pour la liberté, l’égalité et la souveraineté du peuple. Soufflant également dans la Confédération suisse, ce vent du changement amorça une phase de renouveau. Des milliers de personnes se rassemblèrent dans de nombreuses villes sujettes pour exiger de nouvelles constitutions.

Le canton de Berne connut lui aussi une telle assemblée populaire. Le 10 janvier 1831, un millier d’hommes réunis dans l’église de Münsingen réclament la création d’une assemblée constituante. L’initiative porte rapidement ses fruits: trois jours plus tard, le gouvernement patricien annonce sa démission et accède à la demande de la population. Une assemblée constituante s’attèle alors à l’élaboration d’une nouvelle constitution cantonale démocratique, qui est acceptée par le peuple à une large majorité en juillet de la même année. Des élections peuvent alors être organisées. Sans surprise, celles-ci sont largement remportées par les libéraux emmenés par les frères Schnell de Berthoud. Les patriciens de la ville de Berne, jusqu’alors tout puissants, essuient une sévère défaite. Certains parmi eux ne parviennent pas à s’imaginer dans le rôle de l’opposition sous la nouvelle constitution. Dix-huit patriciens élus renoncent ainsi à leur siège au Grand Conseil, tandis qu’une centaine d’officiers et de soldats de la ville de Berne refusent de prêter serment en vertu de la nouvelle constitution et quittent le service militaire.

Mais les élites patriciennes notamment de la ville de Berne ne l’entendent pas ainsi, entreprennent la mise sur pied de nouvelles milices bourgeoises et s’arment en secret. Le canton de Berne semble se diriger tout droit vers une guerre civile. L’hôtel d’Erlach, sur la Junkerngasse, est au coeur du projet.
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Intelligence artificielle : trois défis pour l’école – Les Cahiers pédagogiques
Quelles perspectives pour l’école tirer des résultats de l’enquête du CRAP-Cahiers pédagogiques « Les collégiens et lycéens et l’intelligence artificielle », réalisée entre décembre 2024 et mars 2025 ? Pour les Cahiers pédagogiques, face à la diversité des usages qu’en font les élèves, les enseignants n’ont pas d’autre choix que de s’emparer de l’IA, afin de mieux former les élèves à utiliser ces outils. Trois défis ont été identifiés pour les élèves du secondaire. Les voici en résumé.
1. S’approprier l’IA pour pouvoir l’enseigner
Quoi qu’on en pense, l’IA fait désormais partie de la vie des élèves. L’école doit en tenir compte. Il ne s’agit pas de chercher à empêcher ni même à contrôler, ce qui serait illusoire, mais bien de se l’approprier pour pouvoir en enseigner les usages pertinents.
2. Aller plus loin dans l’utilisation de l’outil
Il est essentiel d’aborder « l’art de prompter », c’est-à-dire la capacité à formuler des requêtes précises et pertinentes pour obtenir des résultats optimaux en utilisant divers outils et en diversifiant les usages de l’IA.
3. Encore et toujours former à l’esprit critique
Comme pour toute production, les résultats générés par l’IA doivent être critiqués, comparés et vérifiés. De plus, il est essentiel de les aider à discerner les moments où l’utilisation de l’IA est pertinente ou non. Enfin, les élèves doivent être sensibilisés aux biais potentiels des algorithmes.
L’article : Intelligence artificielle : trois défis pour l’école – Les Cahiers pédagogiques
La synthèse des résultats de l’enquête : Les élèves face à l’IA : entre séduction et inquiétudes
Une histoire globale du climat – La Vie des idées
Écrire une « nouvelle histoire du monde » depuis les origines de la planète Terre jusqu’à nos jours, en articulant l’histoire des sociétés humaines et celle de la « nature », tel est le pari audacieux de Peter Frankopan.
Historien médiéviste et professeur à l’université d’Oxford, Peter Frankopan est un auteur célèbre depuis la parution des Routes de la soie en 2017, ouvrage dans lequel l’auteur relit l’histoire des siècles passés dans une perspective globale, hors de la seule orbite occidentale. C’est un livre d’une ambition plus grande encore que le même auteur publie en 2023, The Earth Transformed. Un titre assez mystérieux que le sous-titre de l’ouvrage, paru en 2024 dans une belle traduction chez Tallandier, explicite, puisque l’historien prétend offrir avec ce nouvel opus une « nouvelle histoire du monde ». Trois objectifs sont définis en introduction : confronter l’histoire du climat à celle de l’espèce humaine pour mieux en appréhender les interrelations ; « retracer l’histoire de l’interaction de l’homme avec le monde naturel au cours des millénaires » ; et inscrire cette histoire dans une perspective globale (p. 33-34).
Lire la suite du compte rendu : Une histoire globale du climat – La Vie des idées