La série vidéoludique des «Assassin’s Creed» d’Ubisoft comprend désormais un nouvel opus, situé dans le Japon de la fin du XVIe siècle. Les enjeux financiers de cette sortie sont importants pour la société Ubisoft en grande difficulté actuellement. Elle y jouerait son avenir.
«Assassin’s Creed Shadows» est d’autant plus attendu que sa sortie a été repoussée à plusieurs reprises. Il est doublement condamné au succès. En premier lieu en raison de son coût estimé entre 259 et 300 millions de dollars. Plusieurs dizaine de millions d’exemplaires devront ainsi être vendus pour le rentabiliser. En second lieu, Ubisoft est dans la tempête, car les résultats des dernières sorties de jeu vidéo ont déçu provoquant la chute du cours de la société en bourse. Par ailleurs, Ubisoft est toujours confrontée à des scandales de harcèlement au travail de 2020.
Depuis le succès surprise de son premier épisode en 2007, qui a grandement participé à façonner le géant français Ubisoft en major mondiale, Assassin’s Creed s’est transformé en hyperfranchise, comptant plus d’une douzaine d’épisodes majeurs et autant de déclinaisons plus modestes, avant d’être transposé en film hollywoodien, en anime et en manga.
Par ailleurs, comme pour son volet situé durant la Révolution française, il suscite déjà des réactions et critiques au Japon, reprises par… Elon Musk dans sa croisade contre la diversité, l’équité et l’inclusion.
L’intrigue et le gameplay
Japon, 1581 : La province d’Iga brûle autour de vous. Vous assistez, blessé et impuissant, au sourire narquois d’Oda Nobunaga, le seigneur de guerre responsable de nombreuses guerres civiles et de l’unification du pays, du haut d’une colline voisine. Vous dégainez votre katana, dont la lame brille dans la lumière vacillante des flammes. Voici « Assassin’s Creed : Shadows » – à la fois jeu de ninja passionnant et leçon d’histoire. C’est une combinaison étrange, mais elle s’intègre dans une aventure de fiction historique tentaculaire, pleine de découvertes et de tromperies.
Le jeu convoque un archipel déchiré entre de vieux réflexes claniques et le désir d’unification à marche forcée porté par Oda Nobunaga.
Le jeu répond aux attentes des fans de la série qui attendent depuis toujours d’accéder aux figures mythifiées (par le cinéma, la bande dessinée et le jeu vidéo) du samouraï et du ninja.
Ces fans trouveront d’un côté, Naoe, une shinobi —visage des campagnes et du monde d’avant— motivée par le désir de venger le massacre de son village écrasé par le shogunat (un gouvernement militaire). De l’autre, Yasuke, colosse noir adopté par l’oppresseur Nobunaga qui en fait un loyal samouraï.
Le gameplay lui-même intègre cette dualité entre traditionnalisme et modernité. Ainsi, héritière du gameplay traditionnel de la série, Naoe déploie un jeu tout en verticalité caractéristique du jeu alors que Yasuke, lui, n’est que pure horizontalité, capable de venir à bout d’une garnison, mais qui se hisse avec le plus grand mal sur la moindre corniche.
Globalement, le gameplay est considéré comme renouvelé jouant même avec les habitudes précédemment acquises par les joueurs. Il surprend même les joueurs et ainsi les séduit (Silence on joue ! Spécial «Assassin’s Creed Shadows» | Libération).
La réception du jeu
Dans The Guardian, Keza MacDonald souligne la singularité et l’intérêt de deux personnages au profil différent :
« Deux protagonistes, deux styles de jeu : Naoe est rapide et silencieuse, et fait de la furtivité un moyen viable et agréable de découvrir le jeu pour la première fois depuis longtemps. Yasuke est fort et habile, et peut trancher les ennemis lorsqu’une situation explose soudainement en conflit. Cela ajoute de la variété et du choix au gameplay. Les deux personnages sont vraiment intéressants et leurs histoires m’intéressent.»
Comme pour les précédents opus, l’univers historique reconstitué sert surtout décor à un jeu d’action où l’on décapite des ennemis :
Like all the previous Assassin’s Creed titles before it, Shadows uses authentic locations and historical figures to seat the game’s time-hopping narrative. Takeda, Fukuchiyama and Himeji castles are all replicated along with the villages, ports and rural landscapes of Central Japan. But as ever, this is first and foremost a game about sneaking over rooftops and skilfully taking down enemies. […] While Ubisoft has put immense effort into capturing the Azuchi-Momoyama period and the nature of the Iga peasant class (the possible origin of the modern ninja archetype), what matters equally is how good it feels to leap off a rooftop and decapitate a passing enemy.
‘It’s been a challenge’: Assassin’s Creed Shadows and the quest to bring feudal Japan to life | The Guardian
Cet univers historique reflète autant nos représentations culturelles modernes de l’époque et de ses guerriers que de l’histoire. Son producteur Jonathan Dumont ne s’en cache d’ailleurs nullement
«Japanese storytelling has been very influential to the development of the game and to all occidental arts in general,” says Dumont. “Kagemusha from Kurosawa, 13 Assassins, Zatoichi, Sekigahara, The Tale of Genji or Musashi from Eiji Yoshikawa, to name the more obvious, have [all] helped shape our vision for the game.»
‘It’s been a challenge’: Assassin’s Creed Shadows and the quest to bring feudal Japan to life | The Guardian
Le décor est loué par la presse anglo-saxone telle Daniella Lucas, dans le Guardian. Elle insiste sur les soins déployés par les développeurs “pour donner une impression d’authenticité au décor, tant dans les paysages que chez les personnes qui les peuplent”.
Début d’une polémique au Japon… reprise par Elon Musk
Le nouvel opus de la saga ultrapopulaire du développeur français Ubisoft crée cependant la controverse, au point d’être discuté jusque dans l’enceinte du Parlement japonais. Outre les scènes violentes se déroulant dans un sanctuaire shintoïste, Courrier international nous apprend que la présence d’un samouraï noir, pourtant historiquement reconnue, est jugée irrespectueuse pour la culture.
Principal mobile de la polémique, une scène où le joueur, incarnant Yasuke, peut détruire des objets spirituels dans un sanctuaire shintoïste, et s’attaquer au prêtre avec un sabre et des flèches. Fait aggravant, le temple en question existe réellement : il s’agit du sanctuaire Itate Hyozu Jinja, dans la préfecture de Hyogo, dans le centre du Japon, dont le nom n’a pas été modifié, et qui forge la légende de l’unique “samouraï noir”.
L’homme d’affaires Elon Musk s’est lui-même engouffré dans la brèche : réagissant à une publication à propos du jeu sur le réseau social X, le milliardaire a déploré le fait qu’Ubisoft ait “injecté de la DEI” (pour “diversité, équité et inclusion”) dans son dernier opus.
Revue de presse
- Avec «Assassin’s Creed Shadows», Ubisoft espère se remettre sur de bons samouraïs | Libération
- “Assassin’s Creed Shadows” réussit son immersion dans le Japon féodal | Courrier international
- Assassin’s Creed: Shadows – a historic frolic through feudal Japan | The Guardian
- ‘It’s been a challenge’: Assassin’s Creed Shadows and the quest to bring feudal Japan to life | The Guardian
- Back to the feudal: Assassin’s Creed Shadows is the most beautiful game I’ve ever seen | The Guardian
- Avec son samouraï noir, “Assassin’s Creed Shadows” fait polémique au Japon | Courrier international
- Silence on joue ! Spécial «Assassin’s Creed Shadows» | Libération