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Histoire Lyonel Kaufmann

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Enseignement à distance

Cinq pièges qui tueront l’apprentissage en ligne (et les stratégies pour les éviter)

2 mai 2020 by Lyonel Kaufmann Laisser un commentaire

Pour la première fois peut-être de mémoire récente, les parents et les enseignants encouragent activement leurs enfants à passer plus de temps sur leurs appareils électroniques. L’apprentissage en ligne est passé au premier plan, car 90 % des pays à revenu élevé l’utilisent comme principal moyen de continuité de l’éducation dans le contexte de la pandémie COVID-19.

Les spéculations optimistes ne manquent pas de la part des experts et des innovateurs du secteur de l’éducation qui pensent que cette expérience aura un effet transformateur sur l’éducation une fois la pandémie terminée. On espère que les enseignants seront mieux informés de l’éventail et de l’utilisation de ressources d’apprentissage en ligne de qualité, que les écoles accueilleront favorablement les innovations qui entraînent des expériences d’apprentissage meilleures et plus enrichies, et que les élèves exigeront des expériences d’apprentissage multimédia et multimodales plus intéressantes.

Mais que se passera-t-il si ce n’est pas le cas ?

Il est évident que cet espoir ne se matérialisera pas, du moins si nous continuons à faire ce que nous faisons maintenant. Christopher Pommering, fondateur de Learnlife, un réseau mondial qui se consacre à la promotion des pratiques d’apprentissage tout au long de la vie, affirme que bon nombre des 1 000 directeurs d’école des 60 pays membres de son réseau signalent que les enseignants et les élèves sont épuisés par les efforts qu’ils déploient pour mener à bien la journée scolaire traditionnelle dans un environnement en ligne.

Richard Culatta, PDG de la Société internationale pour la technologie dans l’éducation (ISTE) a identifié 5 pièges (à éviter):

  1. Le piège du contenu : les gens oublient souvent que le contenu de l’apprentissage n’est qu’une petite fraction d’une expérience d’apprentissage efficace. Pour éviter le piège du contenu, il est important de prendre en compte tous les éléments essentiels de l’apprentissage et de réfléchir à la manière de les concevoir pour un espace virtuel. Par exemple, à quoi ressemblent les conversations virtuelles ou les projets artistiques virtuels ?
  2. Le piège de la taille unique : lorsque nous passons à un environnement en ligne, nous ne devons pas supposer qu’une approche ou un type d’activité fonctionnera pour tous les élèves (et franchement, nous ne devons pas non plus le supposer en classe). Il est facile de créer des devoirs en ligne sans se rappeler que chaque élève a des besoins, des intérêts et des défis uniques. Heureusement, il s’avère que l’offre d’expériences d’apprentissage personnalisées est l’un des domaines où l’apprentissage en ligne peut améliorer l’expérience en classe.
  3. Le piège de l’isolement : L’école offre des interactions humaines cruciales, elle offre également la possibilité de bénéficier du mentorat d’un adulte. Il existe de nombreuses façons de le faire en ligne. C’est aussi une excellente façon de penser à l’intégration d’experts qui, franchement, ne viendraient jamais en personne à l’école. Cet accès à l’expertise et aux pairs du monde entier peut faire de l’apprentissage en ligne un environnement beaucoup plus connecté que la salle de classe traditionnelle.
  4. Le piège du transfert de son enseignement en ligne : Un autre grand écueil est de penser que si vous savez comment enseigner dans le monde physique, il vous suffit de vous connecter à un outil en ligne, et vous serez efficace pour enseigner dans le monde virtuel. Bien sûr, les bases de l’apprentissage sont les mêmes. Mais la façon dont vous les manifestez dans un espace virtuel est très différente. Ainsi, si les principes de base de l’évaluation de l’apprentissage restent les mêmes, les enseignants doivent apprendre de nouvelles approches pour une évaluation authentique dans un espace virtuel. Par exemple, vous pouvez leur demander de réaliser leurs propres vidéos de type « Khan Academy » expliquant comment résoudre un problème. Vous pourriez même demander à d’autres membres de la classe de revoir le scénario pour en vérifier l’exactitude, afin de tester leurs connaissances.
  5. Le piège de l’apprentissage sérieux en ligne : Pour une raison quelconque, lorsque l’apprentissage se déplace vers un espace virtuel, il devient généralement beaucoup plus sérieux. Un enseignant qui est drôle et engagé dans une classe physique ne sait souvent pas comment transmettre ce « plaisir » à travers des outils virtuels. Lorsque cela se produit, l’apprentissage devient très sérieux et, honnêtement, ennuyeux. Dans les classes virtuelles, quelque chose d’aussi simple que de faire jouer de la musique lorsque les gens s’inscrivent à la session peut complètement changer le ton, et signaler « c’est un endroit amusant, nous allons apprendre et ce sera amusant ». Si vous avez un cours de mathématiques, posez une question stupide comme « qu’est-ce qu’un numéro de vampire ? (oui, c’est vrai) et voir quelle réponse les élèves choisissent peut aider à alléger l’expérience d’être en ligne.

Source : 5 Traps That Will Kill Online Learning (and Strategies to Avoid Them)

Classé sous :Enseignement à distance, Opinions&Réflexions

LUDOVIALES 2020 : « Relever les défis de l’enseignement en période de confinement »

23 avril 2020 by Lyonel Kaufmann Laisser un commentaire

C’est un pari un peu fou que les différentes communautés francophones de LUDOVIA (Belgique, Canada, France et Suisse) ont relevé en un temps record : organiser entièrement en ligne une semaine d’atelier-défis, de pitch et de tables rondes consacrées aux défis que la communauté scolaire a dû relever en un temps record pour assurer l’enseignement en période de confinement. Ce pari, un peu fou, ce sont les LUDOVIALES qui auront lieu du 27 au 30 avril 2020 (l’après-midi en Europe et le matin au Canada).

Pour la Suisse, la HEP Vaud et la HEIG VD sont les co-organisateurs de cet événement et plus d’une dizaine d’ateliers ont été proposés concernant la Suisse.

A noter qu’à cette heure, le pari a été relevé avec un certains succès puisque plus de 400 participant.e.s sont déjà inscrit.e.s !

Le texte de cadrage de cette édition :

Depuis un mois maintenant, la notion d’enseigner, de faire cours ou école a basculé dans une toute nouvelle dimension que ce soit en France, en Belgique, au Canada ou en Suisse et même ailleurs.

En l’espace d’un week-end, l’enseignement en présentiel est passé entièrement à distance de la maternelle à l’enseignement universitaire.

Tout le monde a dû se réinventer (autorités scolaires, direction, enseignant.e.s, élèves/étudiant.es et parents) de manière soudaine et souvent brutale. Chacun et chacune a été précipité.e dans l’ère bricolage au sens entendu par Lévi-Strauss :

« Le bricoleur est apte à exécuter un grand nombre de tâche diversifiées ; […] son univers instrumental est clos, et la règle de son enjeu est de toujours s’arranger avec les « moyens du bord », c’est-à-dire un ensemble à chaque instant fini d’outils et de matériaux, hétéroclites au surplus […]. L’ensemble des moyens du bricoleur n’est donc pas définissable par un projet (ce qui supposerait d’ailleurs, comme chez l’ingénieur, l’existence d’autant d’ensembles instrumentaux que de genres de projets, au moins en théorie); il se définit seulement par son instrumentalité, autrement dit et pour employer le langage même du bricoleur, parce que les éléments sont recueillis ou conservés en vertu du principe que « ça peut toujours servir ». »

Claude Lévi-Strauss, La Pensée sauvage, Paris, Ed. Plon, 1960, p 27

En d’autres termes et dans l’immédiateté, la science empirique (le bricoleur) a pris le dessus sur la science expérimentale, largement spéculative et théorique de l’ingénierie didactique et pédagogique.

Dans ce premier temps de la survie, l’univers de l’enseignement et de la formation a été plongé en apnée dans la recherche (frénétique) de l’outil (magique parfois) et de tutoriels pour se réorganiser dans de nouveaux territoires et espaces-temps. Le résultat en a été souvent douloureux pour tous les acteurs.

Passé ce premier moment d’effroi, augmenté par tout le versant anxiogène généré par la pandémie, et progressivement, les équipes pédagogiques et les communautés professionnelles se sont organisées pour relever les défis posés par cette situation nouvelle dans sa nature et son intensité. Elles tentent maintenant d’ajouter de la compréhension, de la régulation et du sens aux démarches entreprises en bricolant.

A ce titre, les communautés en ligne tels Twitter ou Linkedin jouent un rôle important, voire même inédit dans son intensité, en développant des échanges transversaux entre les différentes filières de formation (élémentaire, secondaire, formation professionnelle, formation tertiaire et universitaire, formation continue).

Pour les différentes communautés francophones de LUDOVIA (France, Belgique, Canada et Suisse, Qatar, Polynésie Française, etc.), un premier temps est venu de témoigner des différentes expériences vécues au travers d’atelier-défis.

Il s’agit aussi d’offrir un premier moment réflexif relativement à la situation hors de l’ordinaire que nous vivons en prolongeant ces retours d’expériences par leur contextualisation et leur mise à distance (table rondes et conférences). En effet, la situation actuelle nous en dit beaucoup sur l’ordre ordinaire des choses en matière d’enseignement et d’apprentissage, du projet pédagogique, économique et social porté par nos systèmes scolaires, de la question vive des inégalités scolaires ou de la place du numérique dans nos sociétés et nos écoles.

Cette période est propice également au questionnement sur les outils et technologies proposées par les éditeurs et industriels du secteur ; certains ont surfé sur la vague du confinement en proposant de nouvelles ressources, plateformes ou outils « miracles », d’autres déjà installés ont tenté d’accompagner du mieux qu’ils le pouvaient des enseignants et chefs d’établissements afin d’assurer une montée en charge des utilisations et ce, en peu de temps. Quid de la validation de ces outils, du respect de la règlementation en matière de gestion des données personnelles et respect de la vie privée.

Pour cette première édition des LUDOVIALES, d’un LUDOVIA entièrement en ligne, nous vous proposons du lundi 27 au jeudi 30 avril 2020, quatre demi-journées organisées de 9h00 à 19h30 (selon les fuseaux horaires) autour d’atelier-défis et de « Pitches », prolongés par un moment réflexif (table ronde ou conférence).

Les intervenant.e.s des différents ateliers présenteront leurs approches et moyens déployés pour répondre aux défis suivants :

  • Transposer son dispositif d’enseignement pour enseigner à distance
  • Développer l’autonomie des élèves et étudiant.es
  • Éviter la démotivation des élèves et étudiant.es
  • Maintenir le lien social et réduire les inégalités scolaires
  • Éviter l’épuisement personnel et professionnel
  • Se former en temps de confinement : comment, quoi, etc.
  • Gestion et leadership des directions en temps de crise COVID-19
  • Des parents sous pression et la pression des parents
  • Travailler en équipe
  • Évaluer à distance
  • …

Les organisateurs :
Eric Fourcaud (FR) , Nathalie Couzon (CA), Ariane Dumont (CH), Caroline Duret (CH), Lyonel Kaufmann (CH), Sébastien Reinders (BE), Franck Tiennebrunne (BE)

Pour le programme et les inscriptions (gratuites) en ligne : http://ludoviales.com/

Classé sous :Enseignement à distance, Humanités Digitales, Ludovia, Médias et technologies, Nouvelles de l'histoire

Mener l’enquête historique sans sortir de chez soi | Adoucir le confinement

23 avril 2020 by Lyonel Kaufmann Laisser un commentaire

Kevin Péloquin et ses élèves des quatrième et cinquième secondaire du Collège Saint-Hilaire devaient s’envoler le 8 avril pour la Grèce. Pandémie oblige, le voyage scolaire de 12 jours a été annulé. La nouvelle a évidemment eu l’effet d’un coup de massue pour le groupe.

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L’Héphaïstéion d’Athènes, temple d’Héphaïstos et d’Athéna Ergané, l’un des temples grecs doriques les mieux conservés. Wikipedia

Il faut dire que ce voyage était particulièrement important. Il gardait motivée la vingtaine d’élèves, mais comptait aussi dans les travaux d’étude de M. Péloquin. Car celui-ci est avant tout un étudiant : il fait présentement son doctorat en didactique de l’histoire à l’Université de Montréal. Et sa thèse explore l’utilisation d’artefacts et de sites historiques dans un contexte — vous l’aurez compris — d’enseignement au secondaire.

Depuis septembre, ses 23 élèves « enquêtent » sur le lieu historique grec de leur choix, un peu à la manière d’un historien. Le but était qu’ils en fassent la visite guidée à leurs camarades de classe, une fois sur place. Le voyage étant à l’eau, M. Péloquin a aussitôt réfléchi à des solutions de rechange. « J’ai pensé à un tour virtuel », résume-t-il en entretien.

Coup de chance : Ubisoft a lancé sur le marché à l’automne le mode « Discovery Tour » pour son dernier Assassin’s Creed : Odyssey, qui se déroule en Grèce antique. Le jeu vidéo, développé notamment à Montréal, permet une immersion historiquement fidèle au temps de Socrate.

Après avoir contacté l’historien en résidence du bureau montréalais de l’entreprise, Maxime Durand, M. Péloquin s’est vu offrir le jeu, pour lui et ses élèves. Ubisoft lui a aussi obtenu un abonnement de trois mois à la plateforme de jeu en ligne Stadia de Google, pour garantir l’accès à tout le monde.

Les élèves ont jusqu’à la fin avril pour remettre à l’enseignant le fruit de leur enquête historique. Kevin Péloquin leur remettra ensuite les codes pour entrer dans le jeu. Après un peu de pratique, ils devront enregistrer — image et son à l’appui — la visite guidée du lieu qu’ils ont étudié. Et le professeur croit-il que ça va fonctionner ? « J’ai fait le test avec mon garçon de 8 ans. Ça fonctionne très bien », répond, enthousiaste, M. Péloquin.

Guillaume Lepage

Source : www.ledevoir.com

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Une pédagogie de la transformation pour les temps de crise

21 avril 2020 by Lyonel Kaufmann Laisser un commentaire

Cet article de Sean Michael Morris (www.seanmichaelmorris.com) a été publié pour la première fois sur le portail d’information Online Educa Berlin insights en anglais sous le titre A Pedagogy of Transformation for Times of Crisis. OEB est la conférence et l’exposition mondiales et intersectorielles sur l’apprentissage et la formation assistés par la technologie. Sa 26e édition aura lieu du 2 au 4 décembre 2020. https://oeb.global. Merci à Sean Michael Morris et OEB d’avoir accepté sa traduction et sa publication sur ce blog.

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« Alors que des millions d’étudiants et d’enseignants ont commencé à apprendre en ligne au cours des dernières semaines en réponse à la pandémie de Covid-19, une reconnaissance claire ne cesse de se faire jour : après tout ce qui a été recherché, pratiqué, innové en matière d’enseignement en ligne, les expériences éducatives significatives sont encore peu nombreuses et lointaines. Un article récent du Chronicle of Higher Education affirme que « de nombreux [étudiants] choisiront de ne pas participer au trimestre d’automne plutôt que de dépenser des milliers de dollars pour une expérience universitaire d’automne centrée sur le visionnage de vidéos sur un ordinateur portable ». John Villasenor, l’auteur de l’article, poursuit en prédisant que beaucoup plus d’étudiants entrants que d’habitude choisiront de prendre une année sabbatique, pour attendre la fin de la pandémie et de ses effets sur l’enseignement et l’apprentissage.

Mais le problème va plus loin que la surutilisation des vidéoconférences et des réunions Zoom synchrones, plus loin qu’une pédagogie non préparée pour aller en ligne en cas d’urgence. Derrière ces comportements se cache une pédagogie numérique sous-développée et sous-théorisée, qui pourrait renforcer l’expérience d’apprentissage tant pour les enseignants que pour les apprenants. Mais plutôt que de s’inquiéter de cet aspect humain de l’éducation, alors que la plupart d’entre nous sont allés en ligne ces dernières semaines, notre première préoccupation s’est plutôt tournée vers la tricherie sur l’intégrité académique, le plagiat et autres, et vers les craintes concernant les résultats, les notes, l’achèvement et la continuité. Notre objectif a été de maintenir le milieu universitaire sur la bonne voie plutôt que de soutenir les étudiants et les enseignants dans cette crise.

À l’aube de cette pandémie aux États-Unis, un groupe de concepteurs pédagogiques et de technologues de l’éducation s’est mis en ligne pour aider, développer et promouvoir un tsunami de politiques et de meilleures pratiques destinées à calmer les tremblements de terre parmi tant de professeurs. Nombre de ces concepteurs se sont également connectés pour se vanter. Pour dire « c’est notre moment » et « enfin, ils vont nous écouter ». Bien que j’aie la plus grande attention et la plus grande sympathie pour les concepteurs de l’enseignement et de l’apprentissage à tous les niveaux de l’éducation – ils constituent un groupe d’éducateurs qualifiés incompris, souvent sous-financés, le plus souvent sous-estimés, dont le travail n’a jamais reçu toute l’attention qu’ils méritent – la pandémie n’a pas été l’heure de gloire de leur conception de l’apprentissage.

Dans les meilleures circonstances, les concepteurs pédagogiques travaillent en partenariat avec des enseignants ouverts d’esprit, qui parlent couramment le numérique et qui ont un investissement ou du moins une curiosité à l’égard de l’apprentissage dans un espace numérique. Dans le pire des cas, les concepteurs pédagogiques conçoivent des cours avec des « experts en la matière » qui ne sont peut-être pas des enseignants eux-mêmes, mais qui connaissent les détails de ce qui doit être appris et peuvent fournir un contenu qui alimentera des évaluations qui s’aligneront sur les résultats de l’apprentissage.

Mais la situation dans laquelle nous nous trouvons est bien pire que cela. Un mouvement de masse vers les espaces d’enseignement et d’apprentissage en ligne, principalement de la part des professeurs, des enseignants de la maternelle à la 12e année et des instructeurs adjoints qui non seulement sont inexpérimentés en matière d’apprentissage numérique mais qui peuvent y avoir résisté pendant des années, ne peut que prouver que la conception traditionnelle de l’enseignement ou de l’apprentissage est un système profondément imparfait et problématique pour l’enseignement et l’apprentissage en ligne. À une époque qui exige une certaine adaptabilité, ce système n’est pas aussi réactif que normatif, ni aussi souple que rigide.

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C’est parce que la conception traditionnelle de l’apprentissage n’a pas prouvé – et ne prouvera pas – qu’elle est à la hauteur de la tâche d’un pivot en ligne soudain, nécessaire et tout à fait inopportun. La conception de l’apprentissage dépend du temps ; la conception pédagogique se fonde sur des pratiques qui ne sont pas brèves. L’ADDIE (Analyse, Design, Développement, Implémentation et Evaluation), par exemple, ou la conception à rebours (backwards design), ou encore la réflexion sur la conception cérative (design thinking) exigent toutes des procédures et des approches, des étapes, de la considération et de la réflexion, de la discussion, de la créativité, de l’investigation, de la résolution de problèmes. Toutes ces approches de l’apprentissage numérique sont incroyablement utiles, mais elles ne peuvent pas être réalisées immédiatement. C’est pourquoi, lorsque cette pléiade de concepteurs bien intentionnés et au grand cœur ont émis des recommandations telles que : aligner les évaluations sur les résultats, légender les vidéos, pratiquer la « conception par la compréhension » (design by understanding), déterminer les preuves acceptables de l’apprentissage, utiliser la conception à rebours (même à une époque où les éducateurs devaient sauter avant de regarder), les conseils n’ont fait que brouiller les pistes en insistant sur le fait que le contrôle et l’ordre pouvaient, voire devaient être maintenus.

Au lieu de cela, il fallait, et il a toujours fallu, une pédagogie numérique qui permette aux enseignants comme aux apprenants d’aller au cœur de l’éducation et de préserver ce cœur, que l’apprentissage ait lieu sur le terrain ou en ligne, ou encore un hybride des deux. Ce qu’il faut, c’est transformer notre compréhension de la pédagogie numérique, l’étudier et reconnaître que la pédagogie numérique est un domaine de recherche.

La plupart des méthodes traditionnelles d’apprentissage en ligne sont fondées sur des méthodes d’enseignement comportementales, basées sur des recherches, qui : 1. sont elles-mêmes très contestables et pas du tout universelles, et qui ont reproduit des préjugés systémiques dans les salles de classe en ligne ; 2. ont été développées avant l’apparition d’Internet. Les méthodes qui influencent tant l’apprentissage et la conception pédagogique ne tiennent aucunement compte de la diversité des expériences disponibles dans les espaces en ligne, de la manière douteuse et persistante dont la technologie numérique, les plateformes et les littératies sont en constante évolution, des inégalités qui se reproduisent en ligne de manière encore plus invisible que dans les classes en face à face, des communautés multiculturelles et mondiales qui existent en ligne, de la manière dont les médias sociaux ont eu un impact sur tout, de la langue à la formation de l’identité, etc.

Mais une pédagogie numérique transformatrice est une pédagogie qui s’intéresse d’abord à la relation entre l’enseignant et l’élève, et aux multiples façons dont l’apprentissage circule entre eux. Paulo Freire a nommé les parties d’une classe « enseignant-étudiant » et « étudiant-enseignant » pour mieux incarner la nature d’une expérience d’apprentissage coopératif ; et c’est cette expérience d’apprentissage, qui centre la collaboration, la communication et la compréhension entre les enseignants et les étudiants, qui peut nous ouvrir les yeux sur une pédagogie numérique unique. Cette pédagogie est une pédagogie qui favorise la personne et non la technologie, l’humanisation au lieu de la numérisation. Cette pédagogie, fondée sur des idéaux d’équité, d’agence et de conscience critique, est une pédagogie numérique critique.

Henry Giroux écrit, dans « On Critical Pedagogy », que : « La pédagogie critique affirme que les étudiants peuvent engager leur propre apprentissage à partir d’une position d’agence et, ce faisant, peuvent participer activement à la narration de leurs identités à travers une culture du questionnement … tout en changeant les formes de reconnaissance de soi et de la société ». La pédagogie critique ne s’intéresse pas à l’apprentissage mécanique, ou à l’apprentissage reproductible, ou à l’apprentissage qui se plie à l’autorité de l’enseignant (ou de l’algorithme ou de l’interface), mais plutôt à une éducation qui est « une pratique de la liberté ». Et une pédagogie numérique critique s’intéresse autant aux outils que nous utilisons, aux outils qu’on nous demande d’utiliser, aux outils qu’on nous vend, qu’à la relation entre l’humain et le numérique, aux barrières entre les deux, aux moyens de cette relation, et à la question de l’agence (ou de notre capacité à intervenir) en matière d’éducation et de ses technologies.

À travers la lentille de la pédagogie numérique critique, l’apprentissage tourne autour de l’idée de libération. La libération de l’oppression, mais plus précisément la libération des schémas de pensée (et des pratiques éducatives) qui limitent la créativité et le génie humains – une créativité et un génie qui, seuls, peuvent nous conduire à une pratique transformatrice en temps de crise.

La journaliste Krista Tippet propose une invitation qui a une certaine pertinence ici : « Nous avons le langage, les outils, les vertus et la vocation, en tant qu’êtres humains, de créer des espaces accueillants pour aborder les questions difficiles de notre temps… C’est une rupture avec des façons d’être et d’interagir qui ne sont pas adaptées à notre époque de changement. En d’autres termes, l’approche déshumanisante et techniciste de la conception traditionnelle de l’apprentissage en ligne ne nous sert plus à notre époque où l’imagination, le soin et la conscience sont nécessaires pour résoudre les très grands problèmes de notre monde. Il n’y a pas de meilleur moyen de le prouver que la réponse encore émergente à la pandémie actuelle.

La tyrannie est facile dans l’éducation. Pour une raison quelconque, c’est même le défaut. La politique de la classe, du testeur et du distributeur de notes est intégrée dans chaque environnement éducatif, tant sur le terrain qu’en ligne. Nous surveillons nos étudiants, nous les soumettons à une reconnaissance faciale algorithmique pour nous assurer qu’ils ne trichent pas aux examens, nous leur demandons de céder leur propriété intellectuelle à des entreprises pour que nous sachions s’ils plagient.

Mais, le tout premier écran était un espace d’imagination, un espace sur lequel on pouvait projeter des images qui n’étaient pas vraiment là, qui se déroulaient à un autre moment mais qui pouvaient être vues, pouvaient susciter des émotions, dans le présent même. L’écran qui nous sépare tous – lorsque nous travaillons à distance, que nous scolarisons nos enfants dans nos salons, que nous enseignons à des élèves que nous avions l’habitude de voir en personne – n’a pas besoin d’être une barrière qui alimente la méfiance, qui nous invite à surveiller ; l’écran qui nous sépare peut être une fenêtre ou une porte, par laquelle nous pouvons nous rapprocher les uns des autres pour rester en contact, pour préserver notre humanité tant malgré le numérique qu’à travers lui. »

This article by Sean Michael Morris (www.seanmichaelmorris.com) was first published on the Online Educa Berlin insights news portal in English as A Pedagogy of Transformation for Times of Crisis. OEB is the global, cross-sector conference and exhibition on technology supported learning and training. Its 26th edition will take place from Dec 2 – 4, 2020. https://oeb.global.

Crédit photo en-tête : Photo de Lou Levit sur Unsplash

Classé sous :Enseignement à distance, Opinions&Réflexions

HistoireCafé : Réseauter en période de confinement

8 avril 2020 by Lyonel Kaufmann Laisser un commentaire

HistoireCafé est un podcast destiné à l’enseignement de l’histoire à l’ère numérique. Pourquoi café ? Parce que j’aime le café. Ce deuxième épisode est consacré à quatre défis que j’ai relevés pour passer à un enseignement entièrement à distance. En préambule à ce troisième épisode d’HistoireCafé, je tiens à remercier toutes les personnes pour leurs différents retours, partages faits et reçus après le deuxième épisode d’HistoireCafé.

Pour ce troisième épisode d’HistoireCafé, je me propose de vous entretenir de la question du réseautage professionnel en cette période de confinement et plus particulièrement des modification que celui-ci a connu depuis ces dernières semaines.

En effet, en cette période de confinement, mon réseautage et ma veille informationnelle ont connu quelques modifications. Si Twitter est un vieux compagnon de réseautage, le plus surprenant pour moi réside dans mon utilisation actuelle de Linkedin dans un cadre professionnel. Et c’est sur ce dernier que je m’attarde plus particulièrement dans ce troisième épisode d’HistoireCafé.

Je vous souhaite encore de bonnes Fêtes de Pâques. N’oubliez pas de débrancher !

Matériel utilisé :

  • Enregistreur numérique : Zoom H5
  • Micro : Røde Procaster
  • Logiciel : GarageBand (Mac)
  • Habillage musical : The Rendez-vous de Harrison Amer

Classé sous :Enseignement à distance, Médias et technologies, Opinions&Réflexions

HistoireCafé : Mes quatre défis d’un enseignement à distance

30 mars 2020 by Lyonel Kaufmann Laisser un commentaire

HistoireCafé est un podcast destiné à l’enseignement de l’histoire à l’ère numérique.  Pourquoi café ? Parce que j’aime le café. Ce deuxième épisode est consacré à quatre défis que j’ai relevés pour passer à un enseignement entièrement à distance. 

Après deux semaines du basculement de nos enseignements entièrement à distance, un premier temps est venu pour faire le point sur les défis que j’ai dû, comme tous les enseignant.es, relever dans un temps aussi court.

Me concernant, j’en ai identifié quatre qui font l’objet de ce deuxième podcast d’HistoireCafé :

  • Défi 1 : Concevoir un espace-classe « low cost » (à partir de 1:34)
  • Défi 2 : Adapter/réorganiser ses contenus (à partir de 3:07)
  • Défi 3 : Maintenir et developper les liens avec/entre les étudiant.es (à partir de 4:53)
  • Défi 4 : Savoir raison garder (à partir de 6:35)

Mes sept principes retenus pour mon enseignement à distance

A partir des quatre défis que j’ai identifiés pour ma pratique de l’enseignement à distance sur la base de mon expérience en formation et des différentes recherches relatives à l’enseignement à distance ainsi que de ma maxime « Pédagogie/didactique, technologie et simplicité », je retiens sept principes pour mon enseignement à distance :

    1. Privilégier le mode asynchrone pour les activités de tout un groupe de séminaire.
    1. Recourir de manière ponctuelle au mode synchrone (zoom ou skype de manière préférentielle) avec des sous-groupes d’étudiant.es (de 2 à 4 étudiant.es) pour assurer le lien, la régulation et le coaching. Durée : 20 à 30 minutes maximum.
    1. A la fois mieux scénariser mes contenus présents sur Moodle (étape par étape) et les simplifier au niveau des tâches à réaliser par les étudiant.es. Il s’agit d’éviter leur épuisement du fait du contexte actuel et celui d’un enseignement à distance. Et je me ménage également moi-même dans leur suivi.
    1. Indiquer un temps estimé pour chaque tâche/activité.
    1. Aménager des moments d’interactions entre étudiant.es et les groupes à la suite d’une activité réalisée seul.e ou en groupe (co-évaluation par les pairs).
    1. Maintenir les liens sociaux et communiquer principalement à l’aide d’un Forum et/ou d’une Chatroom (technologies moins gourmandes en terme de débit, réseau).
    1. Permettre aux étudiant.es de me contacter par mail pour les questions plus personnelles qui ne peuvent être déposées sur un Forum ou un Chat.

Matériel utilisé :

  • Enregistreur numérique : Zoom H5
  • Micro : Røde Procaster
  • Logiciel : GarageBand (Mac)
  • Habillage musical : The Rendez-vous de Harrison Amer

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Les enseignants peuvent-ils faire cours sur Discord pendant le confinement ? – Libération

27 mars 2020 by Lyonel Kaufmann Laisser un commentaire

Ce logiciel américain apprécié des joueurs de jeux vidéo a été utilisé par de nombreux professeurs après la fermeture des établissements. Sa conformité au RGPD fait débat. Les CheckNews de Libération font le point de la situation.

«  Qu’en est-il ? Tout d’abord, Discord explique recueillir automatiquement un certain nombre de données comme «l’adresse IP, l’identifiant de l’appareil et vos activités au sein des Services». Cela vaut pour le contenu des conversations, les fichiers envoyés, et les données renseignées par l’utilisateur comme son adresse e-mail. Concernant les cookies, ces petits fichiers qui sont installés sur les ordinateurs et les téléphones portables lors de la visite d’un site et qui permettent de recueillir des informations sur l’utilisateur, Discord avertit sans détour y avoir recours.

Or légalement, le RGPD protège les utilisateurs européens en renforçant notamment le recueil préalable de leur consentement pour la collecte de certaines données. Mais le logiciel américain a décidé de s’affranchir de ces règles. «En visitant ou en utilisant le service, vous acceptez que les lois des Etats-Unis et de l’Etat de Californie régissent ces conditions et tout conflit de toute sorte pouvant se produire entre vous et la compagnie, sans égard aux principes de conflit de lois et à votre emplacement», peut-on lire dans les conditions générales d’utilisation. » 

Dans la mesure où il est obligatoire pour les élèves et les étudiant.es fournissent notamment leurs adresse e-main et que Discord ne dispose d’aucun garde-fou, il est préférable de s’en détourner pour ceux qui y songent encore et à s’en écarter rapidement pour les autres.

Source : Les enseignants peuvent-ils faire cours sur Discord pendant le confinement ? – Libération

Crédit photo : Photo de Allie Smith sur Unsplash

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Continuité : La revanche du smartphone | Café pédagogique

26 mars 2020 by Lyonel Kaufmann Laisser un commentaire

Alors que les enseignants cherchent à assurer, avec des outils souvent improvisés, la « continuité pédagogique », leur préoccupation première devient le décrochage. Isolés de leurs camarades, face à des modes d’enseignement distanciés, sans le soutien direct de l’enseignant, de nombreux jeunes ont déjà disparu du radar de leur établissement. Et plus la crise durera, plus leur nombre augmentera. Dans l’urgence, on se rend compte que le seul outil  efficace pour joindre et faire travailler tous les élèves confinés chez eux c’est le smartphone. Avec retard, la France redécouvre avec une catégorie d’élèves la nécessité de réfléchir à l’éducation d’urgence.

Comme le note François Jarraud, pour le Café pédagogique,

C’est de pays beaucoup plus pauvres que viennent des expériences d’enseignement qui s’appuient sur le seul outil pédagogique accessible à tous : le smartphone. Beaucoup ont été présentées lors des Semaines de l’apprentissage mobile, organisées chaque année à Paris par l’Unesco. L’édition 2020 aurait du se tenir ce mois ci…

Concernant la France, souligne-t-il encore

des pionniers se sont intéressés à cet outil qui permet d’apprendre à son rythme et partout. Frédéric Fesquet , en 2014, porte dans une application portable le programme d’histoire-géographie de STMG. En 2017, Emmanuelle Vezia et Ketty Flandrina utilisent le portable pour enseigner les maths en lycée professionnel. Les élèves n’ont pas de calculatrice mais ils ont leur portable. Le portable sert aussi à voir les capsules vidéos réalisées par les enseignantes. Il est utilisé comme instrument de mesure pour des expériences. Il enregistre les traces écrites des cours. Des professeurs de langues, JP Kirrage ou V Castillo Munoz ont développé des applications pour l’entrainement et le suivi des élèves bien avant que la crise sanitaire arrive. Des professeurs de lettres ont introduit le téléphone portable dans des activités de lecture et d’écriture en classe.

Après avoir signifié l’interdiction des smartphones à l’école, les autorités scolaires n’ont, dans les circonstances actuelles, que le choix de prêter du matériel informatique à ces élèves perdus de vue. Et après ?

Source : Continuité : La revanche du smartphone

Crédit photo : Photo by Markus Spiske on Unsplash

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Alors que nous nous Zoomons sur l’apprentissage en ligne…. | History News Network

24 mars 2020 by Lyonel Kaufmann Laisser un commentaire

Sur History News Network, Norman J.W. Goda, directeur du Centre d’études juives de l’Université de Floride et l’auteur de The Holocaust: Europe, the World, and the Jews (2013), s’interroge sur ce qui se passe actuellement avec le passage subit à un enseignement universitaire entièrement à distance. Il s’y intéresse plus particulièrement au travers de l’utilisation de Zoom, plateforme de réunion vidéo, chouchou actuel du monde universitaire et tertiaire. Extraits traduits.

« Zoom » – ce mot enfantin ludique, qui faisait autrefois référence aux voitures rapides, signale aujourd’hui un changement radical dans l’enseignement supérieur, qui se déroule sous nos yeux grâce à COVID-19 et à la nécessité de faire passer les cours universitaires en direct en ligne. Zoom, pour ceux qui ne le savent pas, est la plateforme de réunion vidéo par laquelle les professeurs font tous migrer nos classes vers le format en ligne.

[…].

Pour l’instant au moins, en tant qu’universitaire qui enseigne dans les universités d’État depuis près de trente ans, je suis déchiré par la question qui se pose. D’une part, les étudiants qui se sont inscrits à mon cours d’histoire de l’Holocauste ce semestre à l’université de Floride l’ont fait parce qu’ils étaient intéressés par le sujet, parfois intensément. Alors que j’essaie de faire passer mes cours et mes séances de discussion d’une salle de classe à un format Zoom, je veux offrir quelque chose qui se rapproche le plus possible de l’expérience en classe. D’autre part, je pense, comme beaucoup de mes collègues, que les administrateurs d’université et les législateurs des États américains étudieront un jour de très près cette expérience accélérée d’éducation en ligne. Sommes-nous des universitaires leur montrant comment ils pourraient nous remplacer au nom d’une efficacité accrue ?

[…]

Enfin, il y a la qualité de notre propre travail, de notre préparation pédagogique. […] Quel matériel allons-nous présenter pour faire un point particulier sur, par exemple, la résistance juive dans le ghetto de Varsovie, ou sur la reconstruction après la guerre civile, ou sur la dictature de Robespierre ? Comment allons-nous le présenter ? Quel verbiage utiliserons-nous ? Quels visuels utiliserons-nous ? Quand quitterons-nous le pupitre pour une promenade dans l’allée ? Quand ferons-nous une pause et inciterons-nous les élèves à réfléchir plutôt qu’à prendre des notes ? Quelles questions leur poserons-nous lorsqu’ils discuteront ? Comment pouvons-nous les encourager à interagir et même à débattre entre eux en face à face, avec des expressions et des gestes ? Comment leur faire comprendre qu’il n’y a pas de réponses en noir et blanc mais seulement des arguments, certains réfléchis, d’autres nécessitant un développement intensif ?

Ces questions, et bien d’autres encore, constituent ce qui fait de l’enseignement supérieur en direct sur un campus universitaire une expérience pour le corps enseignant et les étudiants qui ne peut être reproduite en ligne, du moins grâce à la technologie Zoom avec laquelle je suis devenu familier. Même si toute la technologie « fonctionne », comment nos efforts plus larges, ayant été coincés par le portail entre l’ordinateur d’une faculté et celui des étudiants, peuvent-ils sortir sans distorsion de part et d’autre, d’une manière que nous ne pouvons pas encore pleinement reconnaître ? […]

Mais la véritable interaction qui résulte d’un véritable apprentissage ? Je n’en suis pas du tout sûr. […] Nous pouvons écouter, mais notre ouïe est étouffée. Nous pouvons nous connecter, mais notre interaction est entravée.

Pour cela, nous devons tous être, une fois de plus, dans la même pièce.

Espérons que ce sera bientôt le cas.

A lire la version complète en anglais : As We Zoom into Online Learning…. | History News Network

Crédit photo : Pixabay License. Free for commercial use. No attribution required

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Covid-19 : heurs et malheurs de la continuité pédagogique (à la française)

19 mars 2020 by Lyonel Kaufmann Laisser un commentaire

Introduction à l’article de Jean-François Cerisier : la situation que connaît la France est largement transposable à l’échelle de la Suisse, voire même de la plupart des pays. A lire donc sans modération.

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Le numérique ne suffit pas à motiver les élèves, la nature des activités et la qualité de l’accompagnement sont déterminants.
Shutterstock

Jean-François Cerisier, Université de Poitiers

Il n’aura fallu que quelques jours pour que la « continuité pédagogique » devienne un sujet de préoccupation nationale. Il y a peu de temps encore, c’est un principe que l’on invoquait en parlant du passage des élèves d’une classe ou d’un cycle à l’autre – et aux dispositions requises pour assurer la réussite des élèves lors de ces transitions.

Avec la pandémie de Covid-19, la continuité pédagogique renvoie à la nécessité d’offrir un enseignement aux 12 millions d’élèves dont les écoles, collèges et lycées sont fermés. Elle s’inscrit dans le discours public comme une toute nouvelle dimension des Plans de Continuité des Activités (PCA) qui anticipent les conséquences de crises majeures sur les services vitaux, par des stratégies visant à préserver leur activité autant que possible.

Formellement présente dans les plans des académies, la continuité pédagogique consiste pour l’essentiel dans l’inventaire des moyens numériques susceptibles d’être mobilisés et très peu – voire rien – n’est dit sur la façon de les mettre en œuvre en fonction des crises, et d’y préparer les enseignants.

Ainsi, interroger la continuité pédagogique dans le cas de la pandémie actuelle pose à la fois la question de ses objectifs en termes de politiques éducatives, celle de la nature et de l’efficacité du dispositif annoncé par l’État mais aussi de l’ensemble des autres initiatives de terrain.

Articuler local et national

Le dispositif mis en place par l’État, expérimenté dès les premières fermetures d’établissements aux élèves dans l’Oise et le Haut-Rhin, repose sur l’articulation entre une offre nationale – celle du Centre National d’Enseignement à Distance (CNED)- et une mobilisation des enseignants dans les établissements scolaires avec leurs moyens propres.

Mise en place du dispositif de classe virtuelle dans l’Oise, début mars 2020 (AFP).

La contribution du CNED réside dans son programme « Ma classe à la maison » qui se compose de ressources en ligne permettant aux élèves d’écoles primaires, de collèges et de lycées de réviser leurs cours de début d’année dans la plupart des disciplines.

Cet ensemble de ressources est complété par la mise à disposition de plates-formes permettant aux enseignants d’organiser des classes virtuelles, en associant web-conférence et partages de documents. À l’échelle locale, les enseignants peuvent s’appuyer sur les environnements numériques de travail déployés dans leurs établissements (ENT) et l’ensemble des ressources acquises à leur attention par l’État, par leur collectivité territoriale de référence et par l’établissement.

Logique de substitution

Il y a plusieurs façons de penser l’éducation hors de l’école et voilà des années que le numérique bouscule tous les formats pédagogiques. L’école ne s’est pas pleinement saisie des nouveaux modes d’accès à l’information et des nouvelles façons d’apprendre qu’il instaure. Pourtant, le plan de continuité pédagogique annoncé par le ministre répond à une logique de substitution du numérique aux cours classiques, à travers des outils visant à reproduire au mieux à la maison les conditions de l’apprentissage au sein des établissements scolaires.




Lire plus sur Conversation:
L’école face au « crash test » du coronavirus


Pas beaucoup d’innovation donc dans la manière de penser l’école, alors que les conditions auraient pu inviter à l’imagination et à la créativité institutionnelle. D’autre part, plusieurs arguments font douter du bien-fondé de cette démarche et, malheureusement de son efficacité, même s’il n’est pas permis le moindre doute sur l’engagement des services de l’État ni de celui des enseignants qui font et feront « au mieux » pour la mise en œuvre de ce plan de continuité pédagogique.

Le premier est celui de l’impréparation. Il n’est pas contestable que l’ampleur et la dynamique de crise sanitaire n’était guère prévisible et n’était de fait pas prévue. Il est donc tout à fait normal que les ressources pédagogiques acquises par l’État ou développées par ses opérateurs comme le CNED ou Réseau Canopé ne suffisent pas à satisfaire les besoins des élèves et de leurs enseignants dans la perspective de semaines ou de mois de fermeture des établissements.

Première journée d’école à la maison (France 3 Pays de la Loire).

Il est à noter que les éditeurs scolaires et producteurs de ressources numériques éducatives sont nombreux à proposer un accès temporairement gratuit à leurs produits dont on ne doute pas qu’il répond à un réel élan de solidarité tout en leur assurant une solide promotion. En revanche, il est plus inquiétant d’observer que la formation initiale et continue des enseignants ne leur permet pas de disposer de solides compétences en ingénierie techno-pédagogique.

C’est vrai dans le contexte ordinaire de la classe et encore davantage dans le contexte de la distance. Il existe bien sûr de nombreux enseignants très expérimentés et compétents dans ce domaine mais ils constituent une minorité des 870 000 enseignants français.

Solutions de terrain

Le deuxième argument est celui de la verticalité du processus qui ignore notamment la réalité et les nécessités de l’inventivité pédagogique de terrain. Si le ministre de l’Éducation nationale tient un discours ferme et pertinent sur la nécessité d’adosser les pratiques pédagogiques à la recherche, il est impossible d’ignorer que les pratiques pédagogiques, quand bien même bénéficient-elles de cet indispensable accompagnement scientifique, s’inventent sur le terrain.

Dans ce contexte radicalement nouveau où l’intégralité d’un système éducatif national s’apprête à basculer d’un enseignement conventionnel présentiel à un dispositif de formation à distance pour une durée indéterminée, il semblerait raisonnable de miser sur la capacité des établissements scolaires et de leurs enseignants à inventer des solutions dans la diversité des situations, des élèves et des enseignants.

On s’étonne ainsi du discours centré sur la mise en œuvre de dispositifs et ressources pédagogiques institutionnels somme toute limités quand rien n’est dit qui pourrait valoriser le rôle des associations et collectifs d’enseignants pourtant susceptibles de jouer un rôle majeur.

La twictée, exemple d’innovation pédagogique porté par des collectifs enseignants.

Le troisième argument concerne les élèves dont il est difficile d’imaginer qu’ils trouveront tous à la maison les conditions favorables que leur offre l’École. Apprendre suppose une ambiance propice et une organisation qui limite la distraction et apporte une aide et un accompagnement personnalisé.

En l’absence du cadre scolaire qui a justement été pensé à cet effet, il y a fort à parier que seule une fraction des élèves saura maintenir l’attention nécessaire à des activités d’apprentissage qui en réclame beaucoup et saura déjouer toutes les difficultés des apprentissages. C’est d’ailleurs pourquoi il semble indispensable de repenser les activités pour augmenter l’engagement des élèves.

L’expérience montre que le recours au numérique n’est pas un facteur de motivation en soi – sauf de façon éphémère – et que c’est la nature des activités proposées et la qualité de l’accompagnement humain qui sont déterminantes. De plus se pose la question des conditions requises pour être un « bon élève » à distance, un élève qui réussit.

Nouvelles compétences

Outre la disponibilité des équipements techniques qui soulève la question d’équité sociale se pose celle des compétences. Compétences techniques bien sûr, avec un trompe l’œil qui laisse penser aux adultes que les plus jeunes sont plus compétents dans l’utilisation des techniques numériques qu’ils ne le sont en réalité et que la distribution de ces compétences est fortement corrélée à des variables sociales.

Compétences non numériques également comme celles de gestion du temps, de planification des tâches ou d’organisation des documents qui sont déterminantes et dont l’absence est souvent compensée à l’école par l’accompagnement des enseignants. Finalement, c’est l’autonomie des élèves qui est questionnée, bien plus critique à distance qu’à l’école.

Terminons sur la question récurrente mais qui prend un relief nouveau de l’équipement et de la situation des enseignants à la maison. Alors que l’État compte sur eux pour organiser les activités d’apprentissage des élèves et les accompagner à distance en s’appuyant sur les techniques numériques, très rares sont ceux qui disposent d’un équipement mis à leur disposition et lorsque c’est le cas, cela relève de politiques d’équipement des collectivités territoriales.

Dans ces conditions, compter sur l’engagement des enseignants revient à faire le pari qu’ils se sont formés eux-mêmes, qu’ils ont autofinancé leur équipement et leur connectivité, qu’ils sauront mobiliser les ressources mises à disposition par l’État mais aussi identifier et utiliser celles des éditeurs privés qui auront bien voulu les rendre disponibles et celles, qu’ils s’engageront enfin dans une large démarche collaborative avec leurs collègues.

Finalement, plutôt que d’essayer de reproduire à la maison l’école avec sa forme scolaire héritée de Condorcet, la pandémie de Covid-19 pourrait être et sera peut-être un magnifique laboratoire pour repenser l’école à l’ère du numérique.

Jean-François Cerisier, Professeur de sciences de l’information et de la communication, Université de Poitiers

This article is republished from The Conversation under a Creative Commons license. Read the original article.

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