Sur History News Network, Norman J.W. Goda, directeur du Centre d’études juives de l’Université de Floride et l’auteur de The Holocaust: Europe, the World, and the Jews (2013), s’interroge sur ce qui se passe actuellement avec le passage subit à un enseignement universitaire entièrement à distance. Il s’y intéresse plus particulièrement au travers de l’utilisation de Zoom, plateforme de réunion vidéo, chouchou actuel du monde universitaire et tertiaire. Extraits traduits.
« Zoom » – ce mot enfantin ludique, qui faisait autrefois référence aux voitures rapides, signale aujourd’hui un changement radical dans l’enseignement supérieur, qui se déroule sous nos yeux grâce à COVID-19 et à la nécessité de faire passer les cours universitaires en direct en ligne. Zoom, pour ceux qui ne le savent pas, est la plateforme de réunion vidéo par laquelle les professeurs font tous migrer nos classes vers le format en ligne.
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Pour l’instant au moins, en tant qu’universitaire qui enseigne dans les universités d’État depuis près de trente ans, je suis déchiré par la question qui se pose. D’une part, les étudiants qui se sont inscrits à mon cours d’histoire de l’Holocauste ce semestre à l’université de Floride l’ont fait parce qu’ils étaient intéressés par le sujet, parfois intensément. Alors que j’essaie de faire passer mes cours et mes séances de discussion d’une salle de classe à un format Zoom, je veux offrir quelque chose qui se rapproche le plus possible de l’expérience en classe. D’autre part, je pense, comme beaucoup de mes collègues, que les administrateurs d’université et les législateurs des États américains étudieront un jour de très près cette expérience accélérée d’éducation en ligne. Sommes-nous des universitaires leur montrant comment ils pourraient nous remplacer au nom d’une efficacité accrue ?
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Enfin, il y a la qualité de notre propre travail, de notre préparation pédagogique. […] Quel matériel allons-nous présenter pour faire un point particulier sur, par exemple, la résistance juive dans le ghetto de Varsovie, ou sur la reconstruction après la guerre civile, ou sur la dictature de Robespierre ? Comment allons-nous le présenter ? Quel verbiage utiliserons-nous ? Quels visuels utiliserons-nous ? Quand quitterons-nous le pupitre pour une promenade dans l’allée ? Quand ferons-nous une pause et inciterons-nous les élèves à réfléchir plutôt qu’à prendre des notes ? Quelles questions leur poserons-nous lorsqu’ils discuteront ? Comment pouvons-nous les encourager à interagir et même à débattre entre eux en face à face, avec des expressions et des gestes ? Comment leur faire comprendre qu’il n’y a pas de réponses en noir et blanc mais seulement des arguments, certains réfléchis, d’autres nécessitant un développement intensif ?
Ces questions, et bien d’autres encore, constituent ce qui fait de l’enseignement supérieur en direct sur un campus universitaire une expérience pour le corps enseignant et les étudiants qui ne peut être reproduite en ligne, du moins grâce à la technologie Zoom avec laquelle je suis devenu familier. Même si toute la technologie « fonctionne », comment nos efforts plus larges, ayant été coincés par le portail entre l’ordinateur d’une faculté et celui des étudiants, peuvent-ils sortir sans distorsion de part et d’autre, d’une manière que nous ne pouvons pas encore pleinement reconnaître ? […]
Mais la véritable interaction qui résulte d’un véritable apprentissage ? Je n’en suis pas du tout sûr. […] Nous pouvons écouter, mais notre ouïe est étouffée. Nous pouvons nous connecter, mais notre interaction est entravée.
Pour cela, nous devons tous être, une fois de plus, dans la même pièce.
Espérons que ce sera bientôt le cas.
A lire la version complète en anglais : As We Zoom into Online Learning…. | History News Network
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