L’historien, spécialiste de la Révolution française, a beaucoup travaillé sur la violence politique et à remettre en cause quelques idées reçues. Comme dans « Les Echos de la Terreur », son nouveau livre.
Jean-Clément Martin, à 70 ans, est un homme à la page. Ce spécialiste de la Révolution française, qui signe Les Echos de la Terreur, dans lequel il étudie le rôle de 1794 dans notre histoire, est sur WhatsApp et Skype – où son avatar n’est autre que Méduse, de Caravage (1597-1598), qu’il voit comme une incarnation de la Terreur –, il a un blog – PasséPrésent, hébergé par Le Monde. fr –, et il s’intéresse aux jeux vidéos – il a conseillé Ubisoft, en 2014, pour la conception d’Assassin’s Creed Unity, situé pendant la Révolution. « Une chance inouïe, commente l’historien. Je ne suis pas devenu un gamer, mais j’en ai tiré la conclusion que si l’on veut comprendre la violence des lycéens aujourd’hui, il faut la rapporter aux jeux vidéo avec lesquels ils fonctionnent. »
L’ouvrage :
Les Echos de la Terreur. Vérités d’un mensonge d’Etat, 1794-2001, de Jean-Clément Martin, Belin, « Contemporaines », 324 p., 24 €.
Pendant deux siècles, la Terreur a permis de penser l’originalité de la période révolutionnaire. La prise en compte de sa radicalité dans une perspective d’histoire philosophique a assuré le succès de ceux qui l’ont vue, par la suite, comme matrice de tous les totalitarismes.
L’historien souligne que, en dépit de ces échos, la terreur a perdu sa majuscule sous l’effet des guerres qui ont bouleversé le XXe siècle et ébranlé l’héritage de la Révolution en diversifiant les sources et les acteurs de violences. Des échos qui, selon lui, sont devenus quasiment inaudibles depuis le 11 septembre 2001, date qu’il choisit pour clore l’étude de ce renversement de perspectives. Désormais, la terreur ne renvoie plus à la Révolution française : elle est devenue un nom générique désignant toutes les terreurs potentielles, dont le nombre risque toujours de s’accroître.
EXTRAIT (p. 16)
« A Maurice Blanchot qui assure : “la Terreur, on le sait bien, ne fut pas seulement terrible à cause des exécutions, elle le fut parce qu’elle se revendiqua elle-même sous cette forme majuscule, en faisant de la terreur la mesure de l’homme et le logos des temps modernes”, il faut répondre, non, nous ne savons rien de cela, non la Terreur ne fut pas revendiquée, et si ce qu’on appela “la Terreur” vint couvrir des événements c’est parce que cette appellation régula utilement des rapports de force inédits dans la France à la fin du XVIIIe siècle. C’est parce que la réalité indéniable des violences liées à la Révolution ne gagne rien à être désignée par un terme aussi vague que “la Terreur” qu’il convient ici d’en comprendre l’invention et l’usage. »
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Crédit image : L’historien Jean-Clément Martin, en 2016. HANNAH ASSOULINE / OPALE
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