Tout le Japon est dans l’attente de la déclaration que l’Empereur doit faire le 15 août. Un poste radio est finalement trouvé à l’hopital. L’attente est pesante. L’onde de choc saisira le Dr Hachiya.
Avant la retransmission, l’état d’esprit du docteur :
« C’était le jour de la retransmission.
Malgré ma détermination à éviter les spéculations et les conjectures, j’avais fini par me livrer à un débat intérieur, d’où j’avais tiré la conclusion que l’émission allait annoncer une invasion ennemie sur nos côtes. Certainement le quartier général allait-il nous ordonner de combattre jusqu’au dernier sang. Quelle situation désespérée !
[…]
Tout avait mal tourné, et maintenant l’ennemi allait débarquer au Japon. Rien que d’y penser, j’en étais malade. »
Les conditions de réception de l’émission sont plus que précaires et la capitulation est à peine entendue :
« On nous invita à nous rassembler dans une salle du Bureau des communications. Une radio avait été arrangée, et lorsque je pénétrai dans la salle, il y avait déjà foule. Je m’adossai à l’entrée et attendis. Au bout de quelques minutes, la radio se mit à ronronner et crépiter bruyamment sous l’effet de l’électricité statique. On pouvait entendre une voix indistincte, qui ne se faisait claire que par moments. Je ne parvins à percevoir qu’une seule phrase, qui disait quelque chose comme : « Supportez l’insupportable ». Puis le parasitage cessa ; l’émission était terminée.
M. Okamoto, le chef du Bureau, qui était resté debout près de l’appareil, se tourna vers nous et nous dit : « L’émission a fait entendre la voix même de l’Empereur, et il vient de nous dire que nous avons perdu la guerre. Jusqu’à nouvel ordre, je veux que vous mainteniez vos activités. »
Une fois la stupeur passée, l’hôpital est en proie au tumulte. Le choc de la capitulation est plus considérable que celui du bombardement pour toutes les personnes présentes :
« Soudain, l’hôpital fut en proie au tumulte, et personne ne pouvait rien y faire. Beaucoup de ceux qui avaient été de fervents partisans de la paix, ou d’autres qui avaient perdu toute inclination pour la guerre à la suite du pika, exigeaient maintenant à grands cris que la guerre continuât. À présent que la capitulation était un fait accompli, irréfutable et définitif, il n’y avait plus moyen de calmer ceux qui venaient d’en être informés. Puisque tout était perdu et qu’on ne pouvait donc craindre de perdre davantage, tout le monde cédait au désespoir. Je commençai à partager le même sentiment –il fallait se battre jusqu’au dernier sang et puis mourir. Pourquoi s’acharner à vivre dans un corps mutilé ? N’était-il pas préférable de mourir pour son pays et de couronner son existence de perfection, plutôt que de vivre dans la honte et le déshonneur ?
Le seul mot de « capitulation » avait produit un choc plus considérable que le bombardement de notre ville. Plus j’y pensais, plus je me sentais affligé et misérable.
Mais l’ordre de capituler avait été donné par l’Empereur, et nous ne pouvions rien objecter à cela. »
« Journal d’Hiroshima, 6 Août – 30 Septembre 1945 » de Michihiko Hachiya, Simon Duran – http://amzn.eu/h4bnzwL
Lire le début du journal : http://www.tallandier.com/pdf/9791021010772.pdf
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