Certains membres des Sonderkommandos, les unités spéciales d’Auschwitz chargées de brûler les cadavres, ont réussi à laisser un témoignage des atrocités que les nazis leur faisaient commettre.
Ce que l’on appelle les «Rouleaux d’Auschwitz» sont plusieurs documents de différentes natures, réalisés par des membres du Sonderkommando, ou unité spéciale, un groupe de prisonniers principalement juifs obligés de travailler dans les crématoriums d’Auschwitz-Birkenau. (Les Rouleaux ont inspiré le film Le fils de Saul, Grand Prix du dernier Festival de Cannes et qui vient d’être nominé pour l’Oscar du meilleur film en langue étrangère.)
Ces écrits furent enfouis dans le sol des crématoires en 1944. Entre 1945 et 1980, huit cachettes de documents de cinq auteurs identifiés ont été découvertes, la plupart du temps par hasard; peu de ceux qui en connaissaient l’existence avaient survécu. Comme le montre notre ouvrage publié récemment, Matters of Testimony: Interpreting the Scrolls of Auschwitz, les documents enterrés à Auschwitz permettent de voir sous un angle nouveau et primordial le Sonderkommando et les témoignages de la Shoah.
Les récits des survivants du Sonderkommando d’Auschwitz sont principalement des réactions d’horreur et d’incompréhension face à leur abjecte situation. Les gardes étaient souvent décrits comme des brutes avinées, qui avaient trahi leurs coreligionnaires juifs en échange d’un sursis de quelques mois. Les auteurs les plus compréhensifs les présentaient quand même comme des hommes traumatisés et dépourvus d’émotions, et les survivants de l’unité spéciale eux-mêmes racontèrent souvent qu’ils n’avaient été capables de supporter leur sort qu’en abandonnant toute vie intérieure. Les Rouleaux d’Auschwitz nous offrent la possibilité d’entendre les vraies voix de membres des Sonderkommandos, depuis ce qu’ils décrivaient eux-mêmes comme le cœur de l’enfer. Loin des automates qu’en a fait la légende, on peut ici les voir comme des humains, qui pensent et qui ressentent.
Il est communément admis aujourd’hui que la Shoah est impossible à représenter. Les tentatives de représentation sont toujours accusées d’être des trahisons des expériences des victimes. Les Rouleaux nous montrent que certaines de ces victimes, pendant qu’elles le vivaient, ont fait tout leur possible pour faire savoir ce dont elles étaient les témoins.
Ces extraits donnent une idée de l’éventail d’écrits que produisit le Sonderkommando.
Lire ces extraits : Ce que racontent les «rouleaux d’Auschwitz» | Slate.fr
Illustration : Auschwitz-Birkenau State Memorial Museum
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