En 1997, Nicolas Werth a publié dans la collection «Découvertes Gallimard» La Russie en révolution. L’idée fondamentale de Werth est de montrer la multiplicité des révolutions qui agitent le pays tout au long de l’année, sans lire l’ensemble du processus à la lumière de sa conclusion bolchevique. Dans La Révolution russe, une histoire française, Eric Aunoble pose le jugement suivant sur cet ouvrage :
«Pour la première fois, on sort totalement de la scansion en deux temps – Février/Octobre – qui rythmait tous les récits, pour redécouvrir le foisonnement de discussion et d’organisation qui avait saisi toute la société russe, faisant de l’ex-empire des tsars «le pays le plus libre du monde». Le vent libertaire qui souffle dans certaines pages de sa Russie en révolution donne corps à l’affirmation qui ouvre son chapitre dans le Livre noir (du communisme, 1997 également).
Il se présente comme un de ces historiens «qui refusent le schéma simpliste de l’historiographie libérale aujourd’hui dominante» et, sans adhérer à «la vulgate marxisante», il se réclame plutôt de la démarche de Marc Ferro et ne se situe pas du tout dans la filiation d’une analyse réactionnaire. C’est sans doute une des raisons de la tempête provoquée par le Livre noir : les auteurs font la critique du communisme «parce qu’ils demeurent ancrés à gauche», selon les mots de Courtois.
Dans le Livre noir, la démonstration de Nicolas Werth qui suit cette déclaration de principes est d’autant plus implacable. Comme Marc Ferro avant lui, il montre le décalage entre ce que les soldats, les paysans, les ouvriers ou les allogènes mettent derrière le «pouvoir aux soviets», derrière les slogans de Paix, de Terre, de Contrôle ouvrier et de Droit des peuples, et le contenu qu’en donnent les bolcheviks. Seule force réellement organisée dans un pays qui se délite, ils prennent le pouvoir grâce à ce malentendu et s’y maintiennent par la force.
Après quinze pages de révolution, suivent quatre-vingt-dix pages de répression en tout genre (notamment contre les protestations ouvrières) qui amènent le lecteur jusqu’en 1922. Les citations sont nombreuses et l’érudition difficile à prendre en défaut.»
La Révolution russe, une histoire française par Eric Aunoble, La Fabrique, 264 p., 14 euros
Source : Peut-on encore célébrer la Révolution russe? – Bibliobs – L’Obs
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